Chapitre 36

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— Tu as de la chance, ce n'est pas la pleine lune. Profites de ce temps libre pour te préparer.

Le roi s'éloigna, accompagné de ses compagnons. Il avait voulu punir Zora en poignardant Kieran, même si ce qu'il avait fait perturberait quelque peu le rituel. Le sacrifié devait être en bon état pour qu'ils puissent procéder correctement au rituel. Il avait agi avec impulsivité. Zora n'eut même pas l'idée de porter son épée sur le roi. Elle se précipita vers Kieran qui gémissait de douleur contre le mur. Le couteau était toujours planté dans sa chair. Le vieil homme s'arrêta devant la porte.

— Je suis sûre que tu ne le laisseras pas mourir, occupe-toi bien de lui.

Son ton était devenu horriblement froid. Le sacrifice de Kieran n'était pas encore aujourd'hui. Il jeta un dernier regard derrière lui et scruta la reine. Elle l'avait plus qu'impressionné aujourd'hui. Il avait été subjugué par sa force et sa cruauté déroutante. Il détourna enfin la tête et sortit de la pièce. Aussitôt, les yeux de la reine vinrent se poser sur la plaie de Kieran. Elle déglutit tandis que son cœur commençait à battre plus vite dans sa poitrine. Ses mains se mirent à trembler. Elle ne voulait pas perdre Kieran. Non. Elle n'allait pas perdre une personne qui lui était chère encore une fois.

Elle décrocha une à une les entraves qui le tenaient à la parois. Une perle de sueur apparut sur le front de Kieran. La douleur commençait à se propager lentement dans tout son corps tandis que Zora le posa doucement sur le sol. Elle s'agenouilla près de Kieran et lui serra la main plus fort qu'elle ne le voulut.

— Je vais devoir le retirer, dit-elle en déposant son regard sur le couteau enfoncé dans sa chair.

La jeune femme regarda autour d'elle. A part les murs oppressants et quelques bougies, il n'y avait rien qui pouvait l'aider à soigner Kieran. La panique commença à monter dans son corps. Le regard agité et le cœur battant, elle s'apprêta à déchirer son tee-shirt pour bénéficier du tissu.

— Prends...le mien, bafouilla Kieran en posant une main moite sur son bras.

Il ne pouvait pas la laisser se déshabiller ici, pas dans cette situation. Malgré la douleur qui lui montait jusqu'au cerveau, il essaya de passer son tee-shirt par-dessus sa tête. La reine prit l'initiative de l'aider tandis que Kieran grimaça de douleur. Un seul mouvement suffisait pour lui provoquer une décharge dans tout le corps. Toutefois, il essayait tant bien que mal de se contenir devant Zora qui semblait paniquée. Il ne l'avait jamais vu dans un tel état de panique.

Désormais torse nu, Zora pouvait voir ses veines injectées de noires à travers sa peau. Il souffrait. Kieran souffrait par sa faute. Elle n'avait pas su le protéger, incapable comme elle l'était. Maintenant, il risquait de mourir devant ses yeux. La reine passa une main sur son front, essuyant la sueur. Elle s'empara du tissu et le déchira pour en faire un chiffon. De ses mains tremblantes elle posa celui-ci autour du couteau. Le sang ne lui avait jamais fait peur, mais penser qu'elle allait voir celui de Kieran la terrifiait.

— Zora, laisses-moi le faire, balbutia le jeune homme.

Il passa une main affectueuse dans les longs cheveux de la reine. Il détestait être impuissant. Les yeux verts de Zora rencontrèrent les siens. Kieran n'était pas sûr, mais il crut voir ses yeux embués de larmes. La reine s'était promis une nouvelle fois de ne plus pleurer après ce qui s'était passé hier. Sa mère disait que pleurer était pour les faibles. Et elle n'était pas faible, loin de là.

— Je vais le faire.

Avec un élan de bravoure, elle agrippa plus fermement le couteau, puis elle commença à le soulever légèrement quand une main faible se posa sur sa nuque. La reine se retourna maladroitement tandis que Kieran en profita pour poser ses lèvres sur les siennes. L'infime mouvement qu'il avait fait pour faire ce mouvement lui arracha une nouvelle plainte de douleur, mais à ce moment-là, plus rien ne comptait. Leur baiser était fiévreux dû à la température affolante de Kieran. Ses lèvres avaient le goût d'un adieu, peut-être même d'un pardon. Zora se recula brutalement.

𝑳𝒂 𝒓𝒆𝒊𝒏𝒆 𝒓𝒐𝒖𝒈𝒆Where stories live. Discover now