Chapitre 17 : Confidences

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Logan n'a plus vraiment de raison de rester dans un coin de l'abri de jardin, sans un bruit. Il s'avance vers Laura pour retirer son bandeau lui-même. Lorsque cette dernière peut à nouveau voir ce qui se trouve autour d'elle, son expression passe de l'étonnement à la satisfaction. Je pourrais me tromper, mais j'ai même l'impression de pouvoir lire de la fierté sur son visage. C'est une drôle de réaction pour une victime d'enlèvement, mais nous sommes à Providence, après tout. On dirait bien que rien ne peut se passer normalement ici.

— Vous vous êtes déjà trouvés, constate Laura. Parfait, ce sera plus simple comme ça.

— Oui, c'est vraiment génial, rétorque Logan d'une voix monotone. Alors, c'est à cause de vous que mes souvenirs n'ont pas été effacés. Si vous le saviez depuis le départ, pourquoi vous n'êtes pas venue me voir dès que vous êtes arrivée sur l'île ?

— Je comptais avoir une discussion avec toi, mais les circonstances dans lesquelles on se trouve ne rendent pas les choses faciles. Imogen vit sous le même toit que moi et j'ai dû avoir recours à un subterfuge pour lui parler en privé. Avec toi, ça aurait été encore plus compliqué.

Son explication paraît logique. Qu'est-ce qui justifierait qu'une mère de famille s'entretienne seule à seul avec un lycéen qui n'est pas ami avec ses propres enfants ? Il aurait fallu faire preuve d'une extrême discrétion. La réponse de Laura a beau ne pas être suspicieuse, Logan n'arrête pas de froncer les sourcils pour autant. L'interrogatoire ne fait que commencer.

— Admettons que ce soit vrai, dit-il. Si vous voulez nous aider, alors ça ne vous dérangera pas de répondre à quelques questions.

— Si ça peut vous aider à me faire confiance, répond Laura, bien sûr.

— On va commencer par le plus évident. Quel est le but de Providence, exactement ? Pourquoi se donner autant de peine pour créer une ville où tout est artificiel ?

— Officiellement ? C'est une expérience sociologique. Une manière de voir si le comportement de jeunes criminels triés sur le volet peut être modifié grâce à de meilleures conditions de vie. Ils vous forcent à jouer le rôle de personnes qui ont réussi dans la vie grâce à l'éducation exemplaire qu'ils ont reçue. Tout ça dans l'espoir que vous deveniez des citoyens modèles menant une vie sans péché.

Dit de cette manière, on pourrait croire que nos ravisseurs nous font une fleur. Comme si nous étions des brebis égarées qu'ils s'étaient donné pour mission de sauver. Lorsque je croise le regard de Logan, je réalise qu'il pense la même chose que moi. Quel ramassis de conneries.

— Et officieusement ? rétorqué-je après un moment de silence.

— C'est un malade qui se prend pour dieu et qui pense sûrement pouvoir changer le monde. Probablement un ancien habitant de Providence, étant donné qu'ils sont un modèle de réussite selon elle ou lui.

— Tu connais la personne derrière tout ça ? Tu l'as déjà rencontrée ?

— Non, son identité reste un mystère pour tous ceux qui travaillent pour lui. Il ne communique que par des messages écrits.

J'imagine que cette partie-là pourrait être un mensonge, mais il me paraît cohérent que le marionnettiste tirant les ficelles en coulisses conserve son anonymat. Avec autant de personnes sous ses ordres, le risque serait trop grand. Cela nous permet tout de même de confirmer notre hypothèse en ce qui concerne la ville et l'époque choisies pour cette expérience.

— Vous dites que nous sommes « triés sur le volet », dit Logan. Sur quels critères nous choisissent-ils ?

— En priorité, votre niveau scolaire, répond Laura. Que ce soit pour certaines ou toutes les matières. Ils veulent des éléments capables de suivre une éducation digne d'une prestigieuse école privée. Ensuite, ils essayent de trouver des profils correspondant au maximum aux personnalités des habitants dont vous jouerez le rôle. Sinon, vous risqueriez de rejeter cette nouvelle réalité et de...

Les marionnettesWhere stories live. Discover now