Chapitre 25 : Ajustements

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Agir dans la précipitation sans comprendre ce qui se passe commence à devenir une habitude. Nous utilisons une partie du matériel que nous avions caché près du mur pour attacher les garçons ayant perdu connaissance. Ensuite, nous les traînons jusqu'au véhicule de la famille Dunbar qu'Eden a abandonné le long d'un petit sentier isolé avant de se lancer dans la filature de Logan. Ce dernier regarde sa fausse sœur d'un œil suspicieux tout du long, à la fois car c'est son réglage par défaut, mais aussi parce que l'arrivée soudaine d'Eden comporte beaucoup de zones d'ombre. Elle semble détecter la méfiance à son égard lorsque nous plaçons les garçons ligotés dans le coffre de la voiture.

—    Quoi ? demande-t-elle sans se tourner vers nous. Si tu as quelque chose à dire, tu devrais le faire maintenant. On est un peu pressés par le temps.

—    Comment on peut être certains que tu n'es pas en train de nous attirer dans un piège ? rétorque Logan, balayant les alentours du regard. En montant dans la voiture avec toi, on se mettra en danger.

—    En restant plantés au milieu des bois aussi. Écoutez, je ne connais pas tous les détails, mais j'ai déjà deviné certaines choses. Si j'avais eu l'envie soudaine d'aller travailler pour les tarés qui m'ont emprisonnée ici, j'aurais pu les laisser vous capturer. Quelque chose me dit que si je veux m'échapper, il vaut mieux faire équipe avec les personnes qui veulent probablement en faire de même. Est-ce qu'on peut aller dans un endroit plus discret, maintenant ?

Des remarques somme toute pertinentes. Nous ne pouvons qu'acquiescer face à la détermination et l'assurance dont elle fait preuve. Je me cache à l'arrière du véhicule tandis qu'Eden et Logan montent à l'avant. Sans surprise, ils se disputent le rôle de conducteur, mais Eden finit par le laisser à son « frère » en gage de bonne foi. Une brève conversation nous permet de trouver une nouvelle cachette potentielle. Le trousseau que j'ai volé avant de quitter la maison des Kennedy comporte la clé qui permet d'ouvrir les portes du lycée. Étant donné qu'il s'agit du premier lieu à avoir été fouillé par une grande partie des adultes, il devrait désormais être désert. Ce n'est pas vraiment l'idéal, mais c'est ce qu'on peut faire de mieux pour le moment.


L'arrivée de la nuit nous permet d'être moins facilement repérables. Mais pour plus de prudence, nous contournons les rues principales afin de passer par l'arrière du bâtiment. Logan et Eden partent en éclaireurs pour inspecter les couloirs du lycée. Une fois qu'ils ont la confirmation que la voie est libre, nous enfermons nos deux otages à double tour dans un placard à balais. Devenir une fugitive et kidnapper des personnes innocentes n'étaient pas au programme de ma journée, mais je suis bien forcée de m'adapter rapidement. Comme l'a souligné Eden, le temps nous est compté. Elle ne croyait pas si bien dire puisque notre plan original devait être exécuté dans moins de dix heures. Mais nous ne pourrons rien faire tant que nous n'aurons pas partagé nos informations. Pour ce faire, nous réquisitionnons l'une des salles libres dans la partie sud de l'école.

Je commence par expliquer tout ce que nous avons découvert au sujet de Providence ces dernières semaines. Le but du projet, le rôle joué par les adultes, le fonctionnement des implants, ou encore la localisation approximative de l'île. Eden m'écoute attentivement sans interruption, et je peux voir sur son visage qu'elle est en train d'assembler les nouvelles pièces du puzzle avec celles qu'elle détenait déjà. Pour conclure mon récit, j'explique pourquoi nous avons décidé de réaliser un test avant de nous lancer dans une évasion et pourquoi elle était la meilleure candidate, selon nous. Je suis sur le point de lui lancer un regard pour l'inviter à prendre le relais, mais Eden semble lire dans mes pensées puisqu'elle se perche sur le haut d'un pupitre tout en s'éclaircissant la gorge.

—    Eh bien, comme vous avez pu le constater, votre petit test a fonctionné. Je ne sais pas exactement quand la puce s'est arrêtée, mais dans la nuit de lundi à mardi, mes souvenirs sont revenus les uns après les autres. C'était comme une sorte de rêve lucide. Je ne pouvais rien contrôler, pourtant je savais que tout était réel. Le lendemain matin, j'avais la sensation d'avoir dormi pendant des années et j'étais certaine d'une chose : je ne suis pas Eden Dunbar.

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