Chapitre 24 : Les confessions.

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Contrairement à la dernière fois, je réponds.

- Oui, je le sais Angelo. Mais ce n'est pas ta faute. C'est de la mienne. Dis-je d'un ton particulièrement sérieux.

- Pourquoi dis-tu ça ? Me demande-t-il perplexe.

- Tu veux dire, au-delà du fait que tu sois mon détenu ? Lançais-je ironiquement.

Il acquiesce.

- Angelo...

Je soupire.

- Tu es malade ... Et j'ai tendance à l'oublier. C'est à moi de mettre des limites, pas à toi.

- Tu es sérieuse là ? Tu joues la carte du bipolaire maintenant ?! S'énerve-t-il.

- Non, non. Je ne joue pas la carte du bipolaire. Dis-je doucement en reprenant ses mots.

Je me rapproche.

- En fait, ta bipolarité ne change rien. Ni de ce que je pense de toi, ni de ce que je ressens pour toi. Elle justifie simplement certains comportements. Elle explique pourquoi tu fais tout pour qu'on s'embrasse, et pourquoi tu le regrettes la seconde d'après. Elle rend compréhensible ton excessivité, ton obsession. 

Je continue. 

- Mais elle ne change strictement rien. Parce que même si tu n'étais pas bipolaire, tu es toujours un détenu, et moi une surveillante et cette porte qui nous sépare existe encore.C'est pourquoi, c'est à moi de mettre des limites et pas à toi. Je suis la seule responsable, tu n'as pas à t'en vouloir. C'est donc ma faute Angelo.

- Tu ressens quoi pour moi ? Répond-il avec un sourire narquois que je devine facilement dans l'obscurité.

- Sérieusement Angelo, c'est la seule chose que tu as retenue ? Dis-je en riant doucement.

Il ne répond pas cette fois. Il se contente de me regarder.

Attend-il réellement une réponse ?

Sans doute.

- Je ressens pour toi une grande affection. Dis-je en faisant attention aux mots que j'emploie.

Est-ce un mensonge ?

- C'est tout Madame ? Dit-il faussement vexé.

On se pose la même question, Monsieur.

- Non, Angelo. En fait, c'est plus qu'une affection.

Je prends mon courage à deux mains.

- Dans ce monde, tu es le seul à te soucier de moi, comme tu es le seul dont je me soucie vraiment. Moi aussi, je n'ai que toi.

À mon tour de me dévoiler.

- Pendant trois mois, j'ai imaginé nos retrouvailles. Je voulais te remercier pour mon anniversaire. Je ne pensais qu'à ça. Et finalement la seule chose que je n'ai pas faite, c'est te remercier. Alors laisse-moi le faire, maintenant. Merci Angelo. Pendant l'espace d'une soirée, tu m'as fait me sentir spéciale. Et aujourd'hui, je suis vraiment heureuse de te revoir. Mais c'est moi qui suis désolée de t'avoir embrassée. D'accord ?

- D'accord Sarah. Lâche-t-il simplement.

Déçue de sa réponse ? Oui.

Surprise ? Non.

Il est comme ça.

- Maintenant, mange. Je reviens chercher le plateau tout à l'heure. Dis-je gentiment.

Il acquiesce.

Je souris. Et je m'en vais ramasser les plateaux-repas des détenus.

Comme à mon habitude, je ramasse d'abord celui de Liam.

Je suis songeuse. Je ne pense qu'à la froideur, qu'à l'indifférence, qu'au détachement de Lorenzo.

Pourquoi n'a-t-il rien répondu ? Pour se venger ? Parce que je n'ai pas, non plus, répondu plus tôt ?

- Ça ne va pas, Sarah ? Me lance Liam visiblement observateur.

- Si, si Liam. Et toi ? Je me rends compte que je ne lui pose jamais la question.

- Moi ? Demande-t-il visiblement troublé.

- Oui. Est-ce que vous allez bien Monsieur Fimez ? Dis-je avec un grand sourire.

- Tu connais même mon nom de famille ? Dit-il perplexe.

- Bien sûr quand même ! Tu es une star ici !

Il sourit. Je souris. Je ne sais pas si c'est lui ou moi que je réconforte.

Mais maintenant, nous sommes deux avec le sourire aux lèvres.

- Merci Sarah. Dit-il timidement.

- Avec plaisir Liam. Répondis-je en reprenant son plateau.

Avant de repartir, il m'annonce une bonne nouvelle.

- Tu savais que je partais bientôt ?

- Comment ça ?

- Je sors de prison la semaine prochaine.

- Sérieusement ?! M'écriais-je en sautant de joie.

- Oui. Répond-il en riant.

- Je suis tellement heureuse pour toi ! Tu me promets de ne plus jamais revenir ? Dis-je un peu plus sérieusement.

- Oh oui ! Plus jamais je ne volerais ! S'exclame-t-il.

- Mais pour ma défense, j'avais arrêté mes médicaments. Je croyais que cette montre me parlait... Ajoute-t-il honteusement.

Je ris doucement avant de répondre.

- Alors promets-moi de ne plus jamais arrêter de les prendre Liam. Ta schizophrénie ne doit pas gâcher ta vie. D'accord ?

Il acquiesce.

Je suis vraiment heureuse pour lui.

Je le félicite une dernière fois avant de m'en aller.

Je reprends un à un les plateaux. En passant par la cellule de Sylvestre, puis par celle de Yanis et d'autres. En finissant par la cellule n°3.

Le sourire qui était plaqué sur mon visage s'en va.

J'appréhende toujours ce moment. Celui où j'ouvre cette porte. Je ne sais jamais ce qui va se passer, ce qui va suivre. 

Une joie, ou une déception ?

Un rêve, ou une désillusion ?

À nouveau, je plaque un sourire sur mon visage. Cette fois-ci forcé.

J'ouvre la porte.

J'aperçois son plateau.

Je m'en rapproche.

Il est toujours plein. Il n'a rien mangé. Je décide de ne rien dire. S'il n'a pas faim, ou s'il ne veut pas manger, cela ne me regarde pas.

Au moment où je tends ma main pour attraper son plateau, la sienne l'intercepte doucement.

Je sursaute. Je ne l'avais pas vu.

- Qu'est-ce que tu fais ? Lâche ma main Angelo. Dis-je froidement.

- Moi aussi. Répond-il tout en libérant ma main.

- Quoi toi aussi ? Dis-je plus gentiment.

- Moi aussi, j'ai imaginé nos retrouvailles. Tous les jours, tous les soirs, pendant 3 mois. Elles ont dépassé toutes mes attentes, mes projections, mes rêves. On s'est embrassé ! Et même si ça ne se reproduira pas, je m'en contenterais. 


La cellule n°3.Where stories live. Discover now