Chapitre 1; Part 1

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Avant-propos: Le personnage principal est bien un garçon. Vous aurez ici son point de vue. Bonne lecture !


Les 24 cartes magnétiques ont été envoyées. Les recrues sont en route.

  0.1

Le soleil tape fort, c'est encore une de ces matinées où on a l'impression que les premiers rayons du soleil peuvent être les plus agréables, que la chaleur va s'immiscer dans l'air bien des heures après mais il n'en est rien. Je pars souvent à l'aube de sorte que la luminosité soit suffisante pour circuler entre les bâtiments mais surtout pour éviter les rayons cuisants qui m'ont déjà brûlé la peau. Aujourd'hui il me faut des bouts de tissu pour ma mère: ma sœur a déchiré ses vêtements en escaladant un grillage. Elle venait de voler un kit de premiers secours pour soigner le front de notre frère qui s'était battu avec le voisin  pour rapporter un fond de lait à la maison, très certainement trouvé dans la gamelle d'un animal. Elle s'est faite courser par le Rempart, un autre de nos voisins, dans sa fuite. On l'appelle ainsi à cause de sa taille: bien plus grand que nous et bien plus costaud mais il court vite, on ne peut pas lui enlever ça. Sa famille arrive à dénicher pleins de produits médicaux et beaucoup de nourriture. On ne voit jamais le père et sa mère loge pratiquement au marché. Le Rempart est seul le plus clair de son temps, il fait ses affaires de son côté et de rares fois à nos côtés lorsque nous partons voler.

J'habite dans une « résidence enclos » avec les miens. C'est en périphérie de la ville, rapidement joignable par les ponts. Notre appartement est regroupé dans trois blocs d'immeubles rassemblés en « U ». Le notre est le bloc 1.1.1 : premier bloc sur la gauche en entrant, premier étage, première porte. Il y a trois appartements par étage, six par bloc, dix-huit pour notre résidence. Au milieu, la cour sert de jardin commun bien qu'il n'y ait pas d'herbe ou de quoi étendre ses vêtement. Certaines femmes ont placées des plantes en pot et quelques caisses pour s'asseoir pour se rassembler les nuits qui suivent des journées comme celles-là. 

Tous les hommes de la résidence travaillent à la maintenance des rails de la gare. Pas celle pour voyager non loin du centre des affaires mais celle proche des usines qui réceptionne les marchandises ou en expédie d'autres. Les femmes quant à elles travaillent sur les marchés, la mienne est affectée à celui près des quais d'autres sont en ville sous la verrière mais elles représentent une minorité: c'est difficile d'avoir une place en ville. La plupart restent non loin des blocs. Notre avenir en est tout assuré: employé de maintenance comme nos aïeules avant nous et nos descendants bien après. 

Le matin à l'aube je fais souvent mes premières affaires, les gens ne sortent pas après encore moins l'après-midi. Ma sœur Lyra m'accompagne quelques fois mais généralement on se sépare pour couvrir plus de terrain avant de se retrouver vers huit heures pour faire le reste de la ville ensemble, c'est moins long à deux. Lorsque le soleil est à son zénith il nous indique l'heure pour récupérer notre petit frère, Caeli, de l'école. Nos parents ne rentrent qu'une fois la nuit installée sur la ville. Les journées sont ainsi rythmées, elles ne diffèrent guère. Je passe le plus de mon temps avec ma fratrie.  Déjà petits, nous restions collés l'un à l'autre,  on attendait ensemble le retour de nos parents même si à cette époque notre frère s'occupait de nous.

Techniquement, je ne suis pas tout à fait l'aîné: nous avons un frère aîné, Noah mais il a quitté la maison il y a de ça sept ans. On ne l'a jamais revu. Depuis ce jour, je suis plus le cadet et les responsabilités m'incombent mais pour Lyra et Caeli je suis prêt à endosser ce rôle. Notre famille est soudée et elle l'est encore plus avec depuis la récessions: les vivres viennent à manquer, la ville manque de tout et les quartiers pauvres ne cessent de gagner du terrain. 

Notre huit clos résidentiel qui nous sert de fort ne nous protège plus de cette misère désormais. Avec le temps, la précarité s'est installée entre nos murs. Nos parents déplorent notre comportement mais par les temps qui courent, plus personne n'a d'autre choix que la mendicité ou le vol pour survivre. Nos parents sont persuadés que c'est le Rempart qui nous a apprit à voler et à mentir alors que c'est Noah qui nous a tous initier, Rempart inclus. Notre famille est très disparate: nos parents travaillent honnêtement pendant que nous volons tous ce qui pourra être revendus plus tard ou troqués contre quelque chose d'autre. Le seul qui se démarque par son caractère est Caeli en qui toute la famille place ses espoirs. 

Le petit dernier n'aspire pas au même train de vie que sa famille, il a déjà compris que l'école serait son salut. Ramenant des notes toujours plus excellentes, il espère travailler assez pour poursuivre ses études à l'inverse de Lyra et moi qui nous sommes arrêtés une fois notre certificat d'aptitudes obtenu. Le quartier n'hésite pas à répéter à nos parents que de leurs trois enfants, Caeli est le seul qui s'en sortira. Intérieurement j'y crois de toutes mes forces: qu'il quitte le huit et sa périphérie et vive une meilleure vie que la nôtre.

Les « quartiers populaires » où ma famille vit se ressemblent tous : pleins de petites résidences pour former une communauté à échelle réduite. Toutes plus ou moins petites avec des problèmes de canalisation, très peu voire pas du tout de végétation, des installations électriques plus qu'insalubres si bien que l'on capte le courant lorsque le soleil est couché ou pas encore levé. Pendant la journée, les disjoncteurs surchauffent et provoquent plusieurs court-circuit. Certaines familles installées depuis des décennies ont pu garder leurs maisons avec jardin. Les vrais avec de la pelouse et parfois même avec un arbre qui apporte de l'ombre et de la fraîcheur. 

J'espère pouvoir me payer une de ces maisons plus tard pour y  loger mes parents, Lyra pourrait rester le temps qu'elle se trouve un cocon à elle. Je n'exclus pas mon frère, mais je suis persuadé qu'il s'en sortira mieux que nous. C'est un garçon très intelligent, et incroyable lecteur. Avec Lyra on doit lui rapporter de nouveaux livres chaque semaine, ceux qu'il possède à la maison sont finis et ceux empruntés à l'école également. Une fois, Lyra n'avait pas hésiter à voler un livre dans une bibliothèque du centre, j'avais dû la mettre en garde concernant la différence entre voler chez nous et au centre. Si une personne est arrêtée pour vol, elle se fait embarquer pour « vol de la société »,« incitation à la criminalité », « marché noir, contrebande, braconnage » et tellement d'autres choses complètement absurdes.

En général, ces personnes se font marquer la nuque d'une série de chiffres qui les répertorient dans un fichier avec les autres criminels de la ville. D'ailleurs ici comme partout en ville, on les appelle des marqués. On ne peut pas s'approcher d'eux sans être soupçonné de faire partie de leur bande. Dans tous les cas, les marqués deviennent des parias, rejetés de la société. Des marginaux en quelque sorte. Sauf pour les personnes aisées, celles qui logent ou possèdent un appartement en ville. Là les marqués sont très largement employés pour la main d'œuvre bon marché qu'ils représentent. Ils constituent du personnel de maison plus qu'abordable pour entretenir leur bien, laver les voitures, leur servir de chauffeur, de bonne à tout faire... Tout ça à moindre frais. J'ai déjà essayé de me faire embaucher par un de ces gars, je jouais de mes charmes auprès des dames, en vain. J'ai même tenté de faire embaucher Lyra comme nourrice sans plus de succès. Apparemment nous étions bien au-dessus du marché. Je suis sûr que si nous étions venus toquer à leurs portes en exhibant notre belle série de numéros nous aurions eu le poste. Quelle ironie que nous ne nous soyons jamais fait prendre. 

L'Organisation [ TERMINÉE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant