Chapitre 33; Part 2

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     Elle a le visage rouge, plein de sang séché. La lèvre inférieure fendue, gonflée, elle a l'air d'avoir pris un coup au crâne, du sang colle à ses cheveux. Elle a les mains coupées. Mais au delà de ça, ce qui me choque le plus c'est qu'elle attend un enfant. Son ventre rebondit témoigne qu'elle en est à la fin. Je m'avance près d'elle pour venir à son chevet. Je viens l'embrasser au visage en faisant attention à ses coupures, j'examine ses plaies et pose fébrilement les mains sur son ventre. Elle me sourit et me caresse les cheveux. Elle pose ses mains sur les miennes et les ramène à elle.

- Je suis désolée mais ce n'est pas le tien...

     Rien. Aucun bruit. Même pas la cohue qu'il y avait en entrant. Même pas les pleurs, les gémissements des malades. Juste un sifflement dans mes oreilles.

- Dis quelque chose Loan... On était plus ensemble, tu es venu me faire tes adieux avant de partir pour l'Orsath Enterprise je ne pensais pas te revoir.

- Non je comprends Weny. Je sais pas pourquoi je me suis imaginé ça. Je t'ai vu là et... C'est idiot. Qu'est-ce qui t'es arrivée ? Pourquoi tu étais à la Draperie ?

- J'ai emmené les enfants chercher du tissu pour faire des poupées de chiffon pour les ateliers créatifs. Mais ça ne s'est pas passé comme prévu...

     Sa voix se brise. Elle pleure en me parlant. Elle m'explique que le feu s'est déclaré lorsqu'ils étaient en train de choisir les tissus, elle allait régler le marchand lorsque quelqu'un a crié au feu. Dans la panique, un mouvement de foule lui a fait perdre les enfants de vue. Certains -dont elle- ont été piétinés, écrasés, elle part dans une crise de larmes lorsqu'elle m'informe que certains de ses élèves sont morts asphyxiés. Elle en a trouvé quatre qu'elle a conduit à l'extérieur. Ils ont été amenés ici avec elle et des marchands que Bajra veut audiencier pour savoir ce qu'il s'est vraiment passé. Elle ignore complètement où peuvent être le reste du groupe. Je ne sais pas comment la réconforter, elle n'arrête pas de pleurer. Je la prends dans mes bras à défaut de savoir quoi faire d'autre. Pauvres enfants. Si Caeli avait été avec eux... Je ne comprends pas comment l'Organisation peut faire ça. Weny continue de pleurer. Je la recoiffe, essuie ses joues.

- Repose-toi.

     Je la laisse tranquille, il faut qu'elle se rétablisse. Gaci est restée à l'attendre elle prend le relais. Kah ne l'a pas quitté, il est resté avec elle. Nous sortons de l'hôpital tous les deux. Je n'en reviens pas. De l'attaque, des manières de faire de l'Organisation, de revoir Weny, de la revoir enceinte. Tout ceci me chamboule quelque peu.

- Ça va toi ? Me demande Kah.

- Ça m'a fait bizarre de la revoir, surtout comme ça.

- C'est sûr. On devrait aller voir Bajra avant qu'on ne lui monte la tête.

     Tout à fait d'accord. A l'heure qu'il est il doit être en réunion de crise. Sur le chemin, nous remarquons que les habitants des égouts n'ont pas l'air d'être au courant de la situation en surface. En même temps je doute qu'ils se préoccupent de ce qui se passe là-haut.

     Nous regagnons la salle du conseil où Bajra est avec Oskar et ses conseillers, ce qui nous étonne qu'à moitié, à notre vue il congédie ses amis. Bajra s'assure qu'ils ferment bien la porte derrière eux.

- Vous avez appris la nouvelle ?

- On revient de l'hôpital.

- Qu'est-ce qui se passe là-bas ?

- Je l'ignore Loan. Il semblerait que l'Organisation nous montre un tour de force.

- Pourquoi ? Pourquoi maintenant ? Ça fait cinq mois qu'on est parti, pourquoi ils attaquent maintenant ?

- Attends Loan, ça fait déjà la sixième attaque, m'informe Kah.

- Quoi ?

- Il y en a eu dans les gares, au centre-ville et au port. T'étais pas au courant ? Je croyais que c'était pour ça que tu restais seul...

     J'en reviens pas.

- Voilà ce qui arrive quand on ne s'intègre pas. Je suppose que Born n'est pas au courant non plus.

- Pourquoi tu ne m'as rien dit Bajra ?

- J'ai d'autres choses en tête que de me préoccuper de savoir si tu es d'humeur à être informé ou non. L'important est que nous pourrons bientôt riposter. D'ici la fin de la semaine tout ceci sera fini.

- Et comment vous compter procéder ? On va gentillement monter à l'aube pour les surprendre dans leur sommeil ?

- J'ai ma petite idée mais j'attends de voir le matériel que l'on aura. Ne vous inquiétez pas, il y aura une réunion pour tout mettre au point.

     J'émets un rire.

- Et tu pense sérieusement que d'ici ce week-end nous pourrons nous promener tranquillement l'air de rien au port. Genre ça y est c'est fini.

- Contrairement à toi, je me dois d'être optimiste. De montrer que j'y crois. Sinon personne ne me suivra. Il en va de notre survie.

- Ouais c'est vrai que tu es le chef, pas moi.

- Les gars on devrait tous mettre de l'eau dans notre vin. On ne peut pas se permettre d'être dissident entre nous. Au moins faisant semblant de nous entendre.

- Merci pour cette parole censée Kah, j'espère que tout le monde ici l'a entendu, souligne Bajra.

- Tout le monde sait qu'on ne s'entend plus. A quoi ça sert de mentir ?

     Je quitte le conseil. Quel imprudent. Jamais nous ne serons rentrés chez nous d'ici ce week-end. Je suis ulcéré de voir que personne ne m'a tenu informé de ce qui se passait là-bas. D'apprendre que maintenant qu'il y a eu des attaques répétées, que l'Organisation, contrairement à ce que je pensais, est active à nous tuer. Je me disais que c'était étrange qu'il ne se passait rien, que l'on était un peu trop à l'abri.

     Je regagne furieux l'appartement de Eileen. Au moins avec son absence je pourrais me calmer seul.

- C'est toi qui m'a amené là ?!

- Commence pas Born.

- Ho pardon, dure journée chéri ? On est où là ?!

- Chez ma garante, tu devrais t'estimer heureux qu'elle t'héberge.

- Ouais, chanceux que je suis.

     Il tourne dans la pièce. Je me pose sur le canapé pour faire le point. J'essaie de comprendre comment on en est arrivé là. Born farfouille chez Eileen. Il visite l'appartement, les tiroirs, touche à tous ses bibelots.

- Tu peux arrêter s'il-te-plaît ? C'est pas chez nous ici.

- C'est ce que je me tue à dire depuis notre arrivée. Vraiment si mauvaise que ça ?

- Quoi ?

- Ta journée ?

- On s'en fout. T'es pas censé... non oublie.

- Non pas aujourd'hui. J'ai entendu Bélem discuter avec Eileen avant son départ. Je reste sur mes gardes désormais, tout le monde ne me veut pas forcément que du bien ici.

- Qu'est-ce qu'il a dit ?

- T'inquiète bébé je peux me défendre. Après tout je n'ai pas été une recrue ?

- Non sérieusement Born.

- Apparemment ce type fait remonter de manière définitive les gens à la surface. Peut-être qu'il ne serait pas contre l'idée de nous renvoyer chez nous.

- Merde...

- Eileen pense que Bajra interviendrait dans ce genre de décisions. Donc tant qu'on l'a dans notre poche...

     Oui si tant est qu'on l'ait.



L'Organisation [ TERMINÉE ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant