1 - Du golf

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Allongé de tout mon long sur le canapé, mon bol de céréales posé sur mon torse, je fixe la télévision avec attention. Pourtant, je connais ce tournoi. C'est une rediffusion, je sais qui gagne, mais en me levant ce matin, j'avais envie de regarder du golf. Juste pour pouvoir me détendre avant le weekend de fou que nous allons vivre puisque c'est Noël.

J'enfourne une cuillérée de Choco Pops et prends mon temps pour mâcher. Je baragouine quelque chose d'incompréhensible pour tout être humain – même pour moi et jure quand le sportif rate une opportunité.

— Qu'est-ce qui t'énerve de si bon matin ?

Je tourne légèrement la tête et vois Dorian dans l'ouverture qui se trouve entre le salon où je suis vautré et la cuisine où il semble se préparer un petit-déjeuner. J'oublie mon golfeur, ses fers, ses balles et ses coups... Mes yeux préfèrent, sans hésiter, dévorer le corps de Dorian. Il me dépasse à peine de quelques centimètres de plus que moi, mais il a un physique à faire pâlir un nageur professionnel ou en tout cas, à me faire baver...

Tout chez lui est beau. Tout me plaît. Tout est... bandant. Ses formes, ses muscles, ses bras, ses quelques tatouages, ses cheveux, ses yeux, ses lèvres, son grain de beauté dans le cou... OK, je me perds !

— Alors ? insiste-t-il en se tournant vers moi.

Il m'adresse un grand sourire parce qu'il a compris pourquoi je ne disais rien. Je renifle en me secouant la tête et lui apprends finalement :

— Le golf !

— Le golf ? Y'en a à cette heure-là, un vingt-trois décembre ? s'étonne-t-il à juste titre, avant de porter son mug Batman à ses lèvres.

— C'est une redif...

Je sais déjà ce qu'il va me répondre, mais je m'en fiche. J'aime le golf même si c'est lent, même si ça a un côté snob, même si lui déteste ça. Je reporte mon attention sur mon écran parce que je n'ai aucune envie de me prendre la tête ce matin et encore moins pour ça. Je l'entends ricaner, mais à mon grand étonnement, il ne lance aucune remarque.

Je continue de regarder mon tournoi, mais je vois du coin de l'œil qu'il m'observe. Je me redresse légèrement, mal à l'aise. Dorian a des yeux marron, un regard profond, qui vous transperce le cœur. C'est ce qui m'a plu en premier chez lui quand nous nous sommes rencontrés à mon arrivée à Doncaster.

Je cherchais un petit boulot dans les restaurants du coin et quand je suis entré chez Eli, j'ai eu l'impression que mes problèmes se terminaient. J'ai marché jusqu'au comptoir et j'ai demandé s'ils avaient besoin de quelqu'un pour la plonge. Bien que je sois un jeune diplômé en comptabilité, je savais laver des assiettes.

Eli m'a souri, s'est excusée de ne pas pouvoir m'aider et m'a offert une boisson chaude. Je me suis alors assis sur un tabouret et dix secondes plus tard, Dorian s'accoudait au bar à ma droite. Il a commandé deux cafés à emporter et a ajouté de mettre le mien dans un gobelet. Il s'est tourné vers moi et m'a affirmé, sûr de lui comme toujours : « Toi, tu me suis. J'ai peut-être un truc à te proposer. »

Maintenant que j'y pense, j'ai été complètement fou de le suivre sans demander plus d'explications. Mais ses yeux m'ont envoûté et m'ont donné l'impression que je pouvais lui faire confiance. Trois ans plus tard, je le suis toujours partout...

— Pourquoi tu regardes ça ce matin ? m'interroge-t-il en croquant dans une barre de céréales.

— Parce que j'avais envie et que je n'aurais pas le temps avant mercredi !

— Pourquoi ?

Je tourne la tête vers lui, surpris.

— Pourquoi ? répété-je. Euh... peut-être parce que c'est Noël !

— Tu auras le temps aujourd'hui !

— Je te rappelle que je bosse aussi ce matin. Cet après-midi, je fais les courses pour le déjeuner de Noël. Et je dois finir les cadeaux, on a toujours rien pour Ruth, énuméré-je ce qui le fait lever les yeux au ciel. Et ce soir, dîner chez Gareth !

— OK, OK... Regarde ton truc...

Il s'approche de moi, me tapote l'épaule pour me signifier qu'il souhaite s'installer à l'endroit où je suis. Je râle pour la forme parce que je sais que s'il veut se mettre là, c'est pour pouvoir me prendre dans ses bras. Je me déplace juste assez pour qu'il pose ses jolies petites fesses et je vais aussitôt me caler contre lui. Il m'embrasse la tempe et je souris comme un idiot.

Les minutes passent sans que nous nous parlions, heureux. Dorian n'est pas un bavard contrairement à moi qui ne supporte pas le silence. J'ai dû m'habituer et apprendre à le laisser se réveiller complètement avant de l'inonder de paroles ou pire de questions. Son bras gauche est appuyé sur le dossier du canapé derrière moi et lui permet de me caresser l'épaule, l'air de rien, et ça me plaît.

— Putain ce qu'il est bon ce mec ! m'exclamé-je quand Rory McIlroy, mon golfeur préféré, fait un coup d'enfer.

Je termine mon lait et me mets en position assise pour m'immerger encore plus dans la partie parce que je sais déjà ce qui va suivre.

— Et BAM ! Il serait devant moi, je l'embrasserais pour un si bon jeu, ajouté-je quand Rory finalise un magnifique eagle

Dorian gigote sous moi et finit par se lever.

— Tu vas où ? lui demandé-je, en fronçant les sourcils.

— Y'en a qui bosse, je te rappelle.

— Hé ! je bosse aussi !

— Ouais, mais moi, j'ai pas le cul visé sur une chaise derrière un bureau, assène-t-il.

Je lève les yeux au ciel. Quelle mouche l'a encore piqué ? J'ai du mal à tout le temps le suivre, il est trop lunatique pour ça.

— Donc on va pas au boulot ensemble ? Je croyais que ta voiture faisait un bruit bizarre !

Il hausse les épaules tandis qu'il met son mug dans l'évier au lieu du lave-vaisselle. Comme toujours.

— Elle fera bien la journée.

Il retourne dans la salle de bain pour finir de se préparer et en ressort moins de cinq minutes plus tard.

— Qu'est-ce qui t'arrive ?

— Rien, me répond-il. C'est ton golf qui me gonfle, là !

— Je...

Il vient m'embrasser la tempe en me soufflant :

— À ce soir. On se retrouve chez Gareth.

Il ne me laisse pas le temps de réagir qu'il a déjà quitté de l'appartement. Je jette alors un œil à mon émission. Je n'ai plus envie de la regarder maintenant.

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