18 _ C'est toi la plus forte

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Nous sommes dimanche. Lexie joue dans le salon. Son oncle ne travaille pas aujourd'hui. Chester fait la sieste. Je me déteste de devoir les quitter ce soir.

La maison respire le calme, chacun fait sa petite vie de son côté. Seulement, je préfèrerais que nous passions du temps tous les trois.

— Xie, tu aurais un jeu où nous pourrions tous y jouer? m'enquiers-je doucement.

La petite blonde redresse vivement un visage souriant. Eliott nous observe tour à tour, approuvant implicitement mon idée. Alors, l'enfant se relève de son coussin avant d'accourir dans sa chambre. Chester ne bouge pas d'un iota. Assise aux côtés d'Eliott, je tourne la tête vers lui. Mes valises sont closes dans sa chambre. Il a préféré prévenir Lexie au dernier moment donc elle ne le sait pas encore. Je me sens si triste, ayant envie que mon départ soit retardé au maximum.

— Ne fais pas cette tête. Tu veux qu'on se mette tous à pleurer? demande-t-il, nerveux.

— Non, souris-je.

Je me rapproche de lui sur le canapé tandis que son visage s'empourpre progressivement.

— Tu vas continuer à rougir encore longtemps? m'informé-je, amusée.

— C'est un problème? s'inquiète-t-il, un poil blessé.

— Bien sûr que non, le rassuré-je en caressant sa joue. J'adore ça.

Sa peau prend une teinte de rouge supplémentaire, agrandissant encore mon sourire. J'entoure son cou des mes bras avant de m'y blottir en riant doucement. Je crois qu'au fond, sa timidité me rassure. Pas parce qu'ainsi il n'irait pas voir ailleurs ni qu'il ne serait pas capable de violence. Plutôt parce qu'ainsi, il me fait sentir étrangement spéciale. Également parce que c'est cela qui lui donne tant de charme. Une singularité plus qu'appréciable.

— Ne change pas, lui chuchoté-je dans l'oreille avant de déposer un baiser sur l'arrête de sa mâchoire.

A cet instant, Lexie réapparaît avec plusieurs jeux de société différents dans les bras. Elle les pose sur la table basse face à nous, l'air toute contente à l'idée que nous allions jouer ensemble. J'ai rassemblé ses longs cheveux blonds en une couette haute. Bien au milieu, contrairement à celles d'Eliott. Un énorme sourire étire ses lèvres tandis que son oncle choisit une boîte. La petite installe le plateau, place les pions puis met son coussin en face de nous. Je l'observe faire, attentivement. Avec application, elle mélange les cartes. L'air très concentrée, elle tire la langue comme pour éviter de faire une bêtise.

— Tu as quel âge? m'enquiers-je soudainement.

Elle redresse vivement le visage, surprise. Ses grands yeux bleus enfantins mais trop adultes à mon goût me dévisagent intensément. Les sourcils froncés, un seul mot sort de ses lèvres :

— Cinq.

Puis, elle reprend l'installation de son jeu. Quelques bracelets colorés ornant ses petits bras s'accordent à son pull rose. Son oncle reste silencieux alors, je tente une plaisanterie :

— J'ai vingt ans de plus que toi, je ne suis pas un peu vieille pour que tu joues avec moi?

Elle relève à nouveau le regard, les traits tirés par l'agacement. Mon sourire s'évapore en comprenant que j'ai encore fait une gaffe. Bordel mais ce n'est pas possible... Vais-je, un jour, pouvoir m'exprimer sans risquer ce genre de désagrément?

— Je n'ai pas de maman alors, ce n'est pas grave, répond-elle simplement.

Mon sang se glace malgré moi. Elle a dit cela comme si ça représentait quelque chose de... normal alors qu'au fond, ce manque la gêne terriblement. En réalité, elle n'a pas l'air de savoir quoi ressentir. Cette impression d'être tiraillée entre plusieurs sentiments prédomine chez elle. Renfrognée, elle tend les dés à Eliott qui les récupère d'une main nerveuse.

MiroirWhere stories live. Discover now