XV- Souvenirs et tensions

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Gabriel


Après de longues minutes de silence, Angi finit par s'allonger et sombrer dans un sommeil agité. Nul doute que les révélations de la journée ont dû la choquer suffisamment pour l'atteindre jusque dans ses rêves.

- Combien de temps comptes-tu jouer à ce petit jeu ? lance une voix sur ma gauche.

Fenris, tout à fait réveillé et assis sous son abri me regarde sans sourire pour une fois, l'air même légèrement inquisiteur.

- Tu n'étais pas censé dormir, toi ?

Il affiche à nouveau son sourire amusé.

- Tu devrais savoir qu'un démon ne dort jamais que d'un œil, depuis le temps.

Je laisse échapper un sourire en coin.

- Alors ? me relance-t-il.

- Quel jeu ?

Il désigne la jeune femme étendue sur sa couchette et profondément endormie.

- Combien de temps comptes-tu lui laisser croire qu'elle pourra survivre à ce qui l'attend ?

Je soupire en regardant la silhouette gracile de mon amie avant de répondre à voix basse.

- Elle est assez forte pour survivre. N'oublie pas qui elle est.

- Je ne l'oublie pas, bien au contraire. Justement. Vu son rang, j'imagine que tu t'es bien gardé de lui apprendre à se défendre comme il se doit.

- Je devais assurer sa protection, pas lui apprendre à être assez puissante pour m'écarter de son chemin.

Le silence s'installe à nouveau avant d'être rompu à nouveau par le démon.

- Tu es un imbécile, mon ami.

Je lève les yeux au ciel, me demandant encore comment les geôliers ont bien pu faire pour survivre à ces bavardages incessants, insipides et sans but pendant un siècle.

- Et pourquoi donc serai-je un imbécile, mon ennemi ?

- Parce que ce n'est pas avec ses petits poings qu'elle va pouvoir venir à bout des hordes démoniaques à nos trousses ni terminer son initiation. Dois-je te rappeler que la dernière Fille de la Terre est morte avant même d'avoir atteint le Sanctuaire ?

- Inutile de remuer le couteau dans la plaie, grogne-je.

La mère d'Angi était morte une vingtaine d'années plus tôt alors que trente de mes anges l'escortaient jusqu'au Sanctuaire. Une attaque aussi soudaine qu'inattendue. Personne n'avait survécu. Maintenant que j'y pense, c'était certainement l'œuvre d'un des jumeaux de l'Enfer. Mais au faite... Attends, quoi ?

- Comment tu peux savoir ça, toi ? dis-je, soudain sur la défensive.

Il me regarde du coin de l'œil en souriant fièrement.

- Bah, tu sais, les nouvelles vont vite, que ce soit chez moi, sur Terre ou chez toi. Les anges ne sont pas si sages que tu semble le croire, et personne ne résiste au besoin, que dis-je, au désir de divulguer une pareille information, même avec un paria prisonnier.

- Arrêtes un peu de cracher dans le dos de mes soldats, je te prie. Ce sont des anges, aucun d'eux ne ressent ni besoin ni désir, alors inutile d'essayer de me mettre en colère sur ce plan, j'ai toute confiance en eux.

Il laisse échapper un rire sec et sans joie.

- Moi aussi j'avais confiance autrefois. Et on sait bien où ça m'a mené. 

Ex Nihilo -1- Homo homini lupus est [Wattys 2020 - Paranormal]Where stories live. Discover now