quatorze

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Visiblement, l'appartement des Aurors n'était pas le seul à avoir sombré dans la décadence. Poudlard semblait être atteint du même mal.

Tonks croisa la prof de divination dont elle oubliait toujours le nom dans le couloir du cinquième étage, empestant l'alcool bon marché, qui lui demanda fébrilement si elle savait où étaient les pamplemousses. Après avoir répondu que non, elle continua sa ronde, hésita devant le bureau de Dumbledore, et chuchota sorbet citron à la gargouille. Celle-ci lui répondit d'une voix sèche :

- Le directeur est absent. Vous feriez bien de prendre des vacances, et de manger un peu. Et vos cheveux, aussi...

Tonks lui adressa un splendide majeur levé, puis bifurqua à gauche et le regretta aussitôt.

Ginny Weasley et Harry Potter s'embrassaient à pleine bouche, et à peine avait-elle tourné dans le couloir suivant qu'elle vit deux élèves de septième année, un pack de bières à la main.

Elle aurait adoré leur mettre une retenue (c'était son rêve, de dire retenue, trucbidule !), mais elle n'était que garde, pas prof. D'ailleurs, les profs sombraient eux aussi. Elle croisa le professeur Chourave en pantoufle, visiblement tirée du lit, marmonnant des paroles incompréhensibles ; le professeur McGonnagall manqua de la renverser en courant dans les escaliers, le chignon défait, sa robe de chambre aux cadeaux écossais trainant dans la poussière ; elle croisa un Slughorn bien soûl, rentrant visiblement d'une soirée bien arrosée, se maintenant tant bien que mal à Flitwick et Vector ; et, à son grand étonnement, un groupe de profs, constitué des professeurs Sinistra, Gobe-Planche, Binns et deux autres qu'elle ne connaissait pas dansaient dans le couloir du sixième étage, non loin de la loge de Rusard, qui, lui, était au lit depuis dix-huit heures.

A trois heures du matin, le château sembla retrouver son calme, et Tonks resta seule, avec comme seule compagnie les étoiles. En théorie, John Dawlish aurait dû être là, lui aussi. Elle ne l'aimait pas, elle le trouvait stupide et influençable, mais ce soir elle ne voulait pas être seule, elle ne voulait pas arpenter les couloirs avec comme seule pensée sa tristesse.

Pendant des années elle avait vécu avec insouciance, virevoltant dans une existence pleine de couleurs, ne s'attachant jamais, pour ne pas avoir à se projeter. Le futur lui faisait peur, alors elle entourait son présent de joie, pour ne pas penser.
Et puis Remus était arrivé, il avait sourit et son cœur avait fondu. Foutu cœur. Ils étaient devenus si complices qu'elle avait cru que quelque chose était possible. Et elle s'était prit un rejet en pleine face.

Le portrait de Neal O'Well lui sourit. Il se redressa, et déclara, grandiloquent :

Cesse donc de te morfondre ! Allez, courage, haut les cœurs !
Mets moi un joli sourire, et montre lui ce qu'il rate ! Tu n'as jamais abandonné, et tu vas le laisser s'en aller comme ça ?

Tonks sourit tristement. Elle hocha la tête et monta les escaliers qui menaient au septième étage.

Dumbledore, gardien de la décadence de Poudlard, maître suprême de ces profs méconnaissables, devait être de retour et trôner dans son bureau. Du moins c'est ce que pensait Tonks. Elle s'engagea dans le couloir du septième étage, bien décidé à dire ce qu'elle pensait à Dumbledore. Elle vit alors Harry, qui se précipitait sur le mur, y donna un grand coup de pied, et s'étala au sol. Ce soir, les hommes semblaient développer un amour pour les murs, songea t'elle en pensant à l'idiot devant les Trois Balais.
Elle s'approcha de lui, stupéfaite.

- Harry ?

Il se releva, tenant son orteil douloureux, se tourna vers elle et tomba à nouveau à la renverse. Le Survivant était légèrement stupide, par moments.

C'est toi que j'aime {REMADORA}Where stories live. Discover now