Chapitre 13: Anxiété

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Durant toute la semaine qui suivit, personne ne vit Violette. Elle ne venait plus en cours, ni au réfectoire et encore moins dans la salle de club. Elle s'était enfermée dans sa chambre, avait barricadé sa porte d'entrée et descendu tous les stores afin d'être certaine de ne pas être dérangée par ses amis un peu trop bruyants. Si elle voulait produire quelque chose d'assez complet pour impressionner le jury malgré l'absence du téléphone mobile, elle ne pouvait pas se permettre de perdre une seule seconde.

Nuit blanche après nuit blanche, tenant uniquement grâce à quelques sandwichs qu'elle engloutissait en trois bouchées tout en faisant sa toilette, et sans jamais lâcher son stylo, la jeune femme réussit à reproduire la plupart de ses calculs sur l'intrication quantique. Le dossier d'une centaine de feuilles qui s'accumulaient sur son bureau était toujours très loin d'être exhaustif, mais était plus que suffisant pour occuper le temps dédié aux questions. Cependant arrivait la partie la plus difficile à présent : l'accroche.

Une soutenance de thèse, même informelle, ne se résumait pas à une simple présentation ennuyeuse de plusieurs mois, voire années de travail sur un sujet avec un nom à rallonge. Le but était de capter l'attention du public, lui faire comprendre ce que ces travaux représentaient pour le doctorant, mais également montrer en quoi ceux-ci allaient servir la science. Mais, plus que tout, il fallait se différencier des autres.

Évidemment, Violette aurait pu, comme quatre-vingt-dix-neuf pour cent des gens, réciter un discours machinal, carré et sans saveur ni originalité. Néanmoins, elle refusait de se contenter du minimum en présence des plus grands physiciens de son temps. Elle avait besoin de quelque chose pour se démarquer, une phrase en mesure de toucher l'auditoire en plein cœur, et qui leur donnerait envie d'approfondir ce domaine de la recherche qu'était l'étude du Kvantiki.

La fatigue finit par avoir raison de la volonté de l'étudiante qui, à bout de forces après ne s'être reposée que cinq heures sur les six derniers jours, sombra dans un profond sommeil sans rêves.

Lorsqu'elle revint à elle, Violette sursauta en voyant la date sur son poste de radio. Elle avait dormi plus de quinze heures d'affiler et il ne lui restait plus qu'une demi-journée pour finaliser son compte rendu !

Paniquée, elle rassembla tous ses papiers en un unique dossier et tenta de joindre Soichiro pour lui demander de relire une ultime fois ses travaux. Toutefois, à sa grande surprise, le président du club de sciences ne décrocha pas. Pensant qu'il devait s'être rendu à la cabane pour travailler, Violette s'y dirigea d'un pas rapide. Là, elle fut accueillie par Édouard et Masamune, en pleine expérience de synthèse d'un nouvel arôme de thé explosif. En temps normal, la jeune femme les aurait mis à la porte avant qu'une catastrophe se produise, mais, à ce moment-là, elle avait bien plus urgent à régler.

— Vous deux, où est Soichiro ? les héla-t-elle sans même les saluer.

— Soichiro ? Excellente question, fille aux cheveux de paille, lui répondit Édouard, pensif. Peut-être a-t-il été enlevé par le Népal pour...

— On ne l'a pas vu de la journée, le coupa Masamune avant que son amie assomme le jumeau. On croyait qu'il était avec toi.

Violette se mordit l'intérieur de la joue si fort qu'un désagréable goût de sang envahit sa bouche.

— Non. Et il n'est pas chez lui non plus.

Masamune se raidit. L'apprenti policier sentait quelque chose d'anormal. Soichiro n'était pas du genre à disparaître sans prévenir. Pire. Depuis le début de l'année, il passait la majorité de son temps libre dans la salle de club. Il était totalement illogique de penser qu'il ait pu partir se balader dans un moment aussi critique.

Comme deux atomes intriquésWhere stories live. Discover now