14 | Break Stuff

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Ley

Il y avait des arbres à perte de vue et leurs feuillages s'embrasaient d'une couleur entre le vert et le gris qu'on ne connaissait nulle part ailleurs.

Épinettes blanches et noires, sapins baumiers, pins gris, bouleaux à papier,
chênes bruns, hêtres, saules, on ne compte plus les essences que cette terre promise propose à nos yeux.

Partout, la nature règne et son cœur bat si fort qu'en posant son oreille sur n'importe lequel de ces troncs, nous pouvons ressentir sa pulsation.

L'automne, tout particulièrement, emplissait ces murailles d'une aura qu'on pourrait croire oubliée dans les abysses du monde post-moderne.

Le vent hurle dans la vallée du Vercoups. À l'horizon, ces gigantesques murailles trônent la forêt.

Le cours d'eau traverse un champ non loin de ma demeure, continue son chemin dans la forêt de Licon, il semble finir sa traversée près du mur.

Est-ce que le cours d'eau trouve sa source dans Atma ?

Personne ne vit aussi loin du centre ville, ce qui se comprend dans un sens. Ici, rien n'est à disposition. Mais une chose est sûre, ce cadeau en vaut la peine.

Mes voisins les plus proches habitent à plus de quatre kilomètres, ce qui est une chance énorme. Loin de la population, mon business n'en est que plus florissant.

Et personne n'a attendu l'autre groseille crier dans le cabanon la nuit passée.

C'est ici que ma vie à recommencé et c'est la nature qui m'a donné une seconde chance. Ma vie, c'est cette vallée.

Mon monde.

J'ai cherché la résilience dans le crime, je n'ai trouvé que la douleur et la honte.

Loin de l'autre monde, je me fais oublier.

Les idées s'entremêlent, et les souvenirs se livrent une guerre acharnée dans ma boîte crânienne, les dégâts collatéraux de ce triste chaos se matérialisent en une jolie migraine qui pointe doucement le bout de son nez.

Il me faut un Doliprane.

En quittant le balcon de ma chambre, le visage de cette fille inonde mon champ de vision, comme si mon subconscient voulait me faire passer un message.

Je vois son visage angélique déformé par la peur. Ses traits tirés, ses yeux remplis d'une angoisse qui d'ordinaire ne me fait ni chaud ni froid.

Ce n'était pas qu'une simple peur, c'était comme si j'étais rentré dans son esprit en la regardant derrière cette caméra.

J'avais honte.

Ce sentiment n'intervient que quand la mission est finie, mais hier soir, c'était différent.

Les ordres sont les ordres, mais...

C'est peut-être un résidu d'humanité qui gît encore en moi. Un espoir ? Suis-je vraiment un monstre, parfaitement déshumanisé, comme je l'ai toujours pensé ?

Le doute m'éviscère, l'inconnu, lui, m'étouffe. Aigel a certainement raison, je me pose trop de questions.

Après avoir traversé ce couloir en quelques secondes, qui m'ont semblé durer des heures, je me retrouve à descendre machinalement les marches de mon escalier en colimaçon.

Save Me AtmaWhere stories live. Discover now