19 | Chemistry

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Jude

J'ai trois certitudes dans la vie :

1. On ne peut jamais manger trop de Chocobon.

2. Les mecs dans la vraie vie sont toujours moins intéressants que ceux écrits dans les livres.

3. Ley à l'insulte facile au volant.

Je ne suis sûre que du troisième point parce que je suis dans sa voiture et qu'il vient de crier à travers sa fenêtre :

- ENFOIRÉ, TU CONNAIS PAS LES CLIGNOS ???

Le pauvre quarantenaire dans son Renault Kangoo répond à Ley avec un majeur fièrement dressé, mais se ravise rapidement quand celui-ci pointe son arme dans sa direction à travers la fenêtre.

Un peu radical, non ?

Nous avons quitté la bibliothèque et roulé dans trois rues différentes, son arme a déjà été dégainée quatre fois. Comment ne pas prendre cet homme pour un idiot, fou de la gâchette, qui compense sont impuissance au lit par sa violence et ses flingues ?

Quand nous quittons enfin la zone industrielle, sur le trajet du retour, personne ne parle. Aigel est assis devant moi, sur le siège passager, cet idiot s'amuse à me faire des grimaces dans le rétro.

Il tire la langue, s'étire les joues, lance des doigts d'honneur furtifs à Ley qui est parfaitement concentré sur la route.

S'il voyait ça, mon Dieu.

L'atmosphère est détendue. C'est comme si la scène à laquelle nous avions tous assisté était irréelle, une illusion, un mirage.

Ley a tué un homme, qui lui-même avait tué sa sœur. Et cet homme était l'ami de son vieux. Ce crétin a certainement grandi dans la violence. Comment lui en vouloir d'être si crétin ?

Nous avons quitté cette vieille bibliothèque abandonnée sans se dire un mot et, si ces deux zouaves sont sous le choc, ça ne se voit pas.

- Tu peux appeler Zaka et lui dire que je dois lui parler d'un truc ?

Les grandes mains de Ley serrent le volant un peu plus fort. Son regard est perdu dans l'horizon.

- Ley, tu sais bien que ce type me fait peur, c'est à cause de lui que j'ai dû mettre mon hamster en pension.

Un hamster ?

- Ley, ta maison manque d'une boule de poil. Rajouté-je.

Je suis au courant qu'un chien loup — ceux que j'adore — se cache dans sa chambre, mais mimer d'en avoir aucune connaissance laisse flotter le soupçon. Il ne doit pas savoir que j'ai tenté de rentrer dans sa piaule.

- Ley avait horreur de ma boule de poil. Continue Aigel. Je lui avais pourtant donné le magnifique nom de « Mini Ley ».

Je lutte avec moi-même pour ne pas éclater de rire. Mes joues me font souffrir et mes yeux se remplissent de larmes jusqu'à finalement exploser. Ceux de Aigel se rajoutent aux miens, ils couvrent ensemble l'infâme musique de Ley.

Save Me AtmaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant