39 | The sky's burning

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(tw: violences, sang, armes à feu)

Jude

Le tonnerre gronde dans la vallée alors que des rafales de vent meurent contre les vitres de la maison. J'écrase l'oreiller contre mon visage comme si ce simple geste pouvait faire taire la nature. Impossible. Atma hurle ce matin. C'est si puissant, à la façon d'un cri d'agonie.

En me levant de mon lit, je peine à m'approcher de la fenêtre, mes jambes douloureuses me font plus que souffrir. À travers le verre, les jardins sont étrangement sombres, comme éteints.

Je décide de sortir dans le couloir, vêtue de mon pyjama de fortune — un t-shirt large emprunté (volé) et un jogging gris également emprunté (volé) à Ley. L'air est fortement chargé en humidité, j'ai l'impression d'étouffer, de manquer de place, d'être oppressée.

J'ouvre la porte de chambre de Ley. Personne. Celle de Zaka. Personne. Puis celle d'Aigel, mais personne n'est à l'intérieur.

Anna a certainement dû partir tôt ce matin, et Aigel en tant que bon canard (connard) a dû la reconduire.

Prise d'un mauvais pressentiment, je descends les escaliers avec précipitation pour trouver un signe de vie dans cette énorme baraque.

Une fois en bas, les larges baies vitrées m'entourent et la noirceur des jardins me met mal à l'aise. Je me sens perdue au milieu de nulle part, suspendue dans le vide, observée par mille yeux.

Mes jambes, comme possédées, me conduisent malgré moi vers la cuisine. Les portes battantes claquent l'une contre l'autre derrière moi, dans un bruit qui me paraît plus morbide que d'habitude. Je contourne l'îlot central une fois, deux fois, peut-être dix fois mais rien. Je ne trouve rien. Aucun indice sur l'abandon imprévu de la maison, je suis seule, abandonnée et livrée à moi-même un jour de tempête.

Tu vas me le payer, Ley.

Salon, salle de bain, cuisine, buanderie, chambres, toutes les pièces de la maison sont atrocement vides mais rien n'est rangé. J'ai l'impression que le temps s'est arrêté et que tous mes amis ont disparu alors qu'ils menaient leur vie normalement. Le temps s'est figé.

C'est parfaitement impossible que le psychopathe de Ley, et tous les tocs qui l'accompagnent, aient pu laisser sa chambre dans un bordel pareil avant de quitter la maison. Et pourquoi ne pas m'avoir prévenue ? Ce n'est vraiment pas son genre.

Telle une navigatrice solitaire, je vogue dans un marécage boueux, vers l'inconnu. Les gens ont peur de la mort ou de la solitude. Pourtant le plus terrifiant c'est l'inconnu, marcher sur un sol instable, avancer dans le noir, vivre sans raison. Il me glace le sang, car à Atma il n'y a que l'inconnu qui peut vous tuer. Il tue sans vergogne, sans remords. Il vous éviscère pour se nourrir de vous, seulement de la viande, c'est ce que vous êtes. L'humanité est une utopie ici.

Debout face au vide sur un des nombreux balcons de la maison, j'observe la route qui mène au centre ville. Le vent, lui, s'est calmé, même si j'ai la forte impression que l'accalmie est temporaire. Un sifflement inquiétant me parvient d'un coup dans l'ombre du décor, près de la jonction entre la route avec la forêt. C'est quoi ce putain de bruit ? Je regarde frénétiquement à gauche, en bas, à droite, partout pour trouver une explication logique et rassurante à ces étranges bruits. Mais rien ne me vient.

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