Chapitre 8✅

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Le lendemain, assise à la table de la salle à manger avec ma mère, Hector nous dépose le courrier. Ma mère boit son café avec classe, dans le silence et moi, mon chocolat chaud. Elle jette un rapide coup d'œil à la pile de lettres et en saisit une en particulier, qui semble attirer toute son attention. Elle pose sa tasse et me jauge du regard. Visiblement, ce courrier me concerne. J'en ai déjà la chair de poule.

— C'est une lettre de ton université.

J'espère de tout cœur que ce n'est pas un coup de Léon pour me faire renvoyer ou la presse qui s'enflamme déjà. Elle lit rapidement la lettre en diagonale et annonce :

— De la part de ton professeur Monsieur Sarte.

Je suis surprise. De quoi peut-il s'agir ? Il est rare qu'un professeur envoie des lettres à l'un ou l'une de ses élèves. D'ailleurs, ce n'est pas celui que je préfère, loin de là. Essaie-t-il de me faire des avances par courrier ?

Voyant mon regard interloqué, elle explique :

— C'est pour un stage. Assistante dans sa maison d'édition, les éditions Sarte. Il y a même une brochure, ajoute ma mère alors que je n'ai pas demandé à en savoir plus.

J'ai failli m'étouffer en buvant une autre gorgée de lait. Il ne lâche pas l'affaire. Envoyer une lettre à mon domicile, carrément ! J'aurais dû être plus claire sur ma réponse l'autre jour.

— Je ne suis pas intéressée.

Sans m'écouter, elle continue :

— Tu pourras même participer à la soirée d'anniversaire de sa maison d'édition, s'enchante-t-elle en lisant la brochure. Il y aura plein de journalistes et d'auteurs connus, c'est bon pour ton image et celle de notre boite. Tu pourras porter une de mes créations, tu nous feras ainsi de la pub sans que nous ayons à dépenser de l'argent pour la communication. De plus, c'est un stage très bien rémunéré. Je vais lui faire parvenir ta réponse rapidement.

— C'est probable, mais... Je ne souhaite pas faire de stage dans sa compagnie.

Elle s'arrête net et pose la lettre sur le coin de la table.

— Tu ne peux pas refuser ! Nous pouvons faire une pierre, deux coups.

— Maman, je ne l'aime pas ! Il est... mauvais et malsain.

— Reste gentille et ignore-le, ça va aller. Ce ne sont que quelques jours ! Tu iras à ce stage. Vu la situation, on ne peut laisser une occasion d'être mise en lumière passer. Je vais lui faire parvenir ta réponse.

Elle quitte la table et sort de la pièce avec la lettre à la main. Une fois de plus, malgré mon avis, on en décide autrement pour moi. J'ai l'impression d'être un objet sans sentiment qu'elle manipule à sa guise. L'idée de me retrouver en stage avec cet homme m'a coupé la faim.

Une fois à l'université, je rejoins Anna près de la grille. Elle semble aller mieux et tient une boîte en plastique dans les mains.

— Salut, Anna.

— Ça va bien ce matin ?

— On va dire ça. Hier soir, j'étais chez les parents d'Antoine. On a encore parlé mariage, mais au moins lors de ce dîner je me suis réconciliée avec lui. Ça m'a fait drôlement du bien. En revanche, ce matin, j'ai reçu une lettre de notre professeur de littérature, je vais faire un stage dans sa boite... Je suis ravie. Et toi ?

On avance dans la cour. Le vent est glacial ce matin.

— Oh, tu n'as vraiment pas de chance, je suppose que ta mère a eu le dernier mot. Pour m'excuser de mon comportement de l'autre jour, je t'ai confectionné les petits gâteaux que tu aimes tant, ajoute-t-elle.

Aliénor et les garçons - Romance - TERMINÉWhere stories live. Discover now