Chapitre 27

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Athalia


Je secoue la tête, le cœur lourd. Je n'arrive pas à m'arrêter, même quand Alexeï vient se placer debout devant moi. Cela fait de nombreuses minutes qu'il arpente le salon de l'appartement en passant et repassant ses doigts entre ses cheveux couverts de reliefs dorés grâce aux néons du plafond.

Ils sont désormais aussi décoiffés que le pelage de George, lorsque je passais toutes mes nuits à pleurer contre lui.

Mais Dieu merci, ce ne sont plus des choses qui arrivent depuis qu'Alexeï est entré dans ma vie.

— Athalia, arrête de regarder ça.

Il soupire une nouvelle fois et s'arrête machinalement près de l'immense baie vitrée du salon, où se reflètent contre le verre des centaines de points lumineux qui viennent de la ville en contrebas.

Feux rouges, fards de voitures, lampadaires. La vitre est un réverbère parfait du parallèle de la ville en effervescence à l'extérieur et de la panique qui court entre les quatre murs du studio depuis que nous y sommes revenus.

Une poignée s'enclenche, une porte s'entrouvre, et Jenny sort de la salle de bain, les yeux rougis par la fatigue et l'alcool. Elle est emmitouflée dans son pyjama jaune pastel constitué d'un simple débardeur et d'un short. Une odeur de gel douche à la cerise la suit quand elle vient s'asseoir près de moi.

Elle se répand dans le salon pendant quelques instants, et me fait oublier durant une dizaine de secondes ce que je suis en train de contempler sur l'écran de mon téléphone.

— Il a raison tu sais, ça ne sert à rien de regarder ça. On sait déjà ce qu'ils disent sur nous.

Elle pose ses yeux sur moi, deux mèches blondes encadrant ses joues rougies par la douche qu'elle vient de prendre. Silencieuse, elle attend mon autorisation, et lorsque je la lui donne, elle vient doucement se blottir contre mon bras.

La chaleur de son corps se diffuse instantanément au mien, toujours aussi froid après ce que nous venons de vivre avec Alexeï, sur la plage près du bar.

Nous nous sommes fait poursuivre comme des animaux. Traqués comme des bêtes sauvages.

Où est passée l'humanité là-dedans ?

Je crois qu'il n'y en a jamais eu. J'ai du mal à me souvenir des rares fois où on m'a traitée avec respect depuis que je suis devenue célèbre. Tout ça me semble si irrationnel. Irréel.

— J'ai besoin de savoir ce qu'on dit sur moi, je...

— Pourquoi faire ? Est-ce que ça te fait te sentir mieux ? me demande Alexeï en s'adossant contre l'immense vitre.

Il joint ses bras fermes sur son torse en une posture stricte, et me fixe de ses yeux clairs en attendant ma réponse. Je me sens soudain déstabilisée, prise au dépourvu, tel un enfant qu'on vient de réprimander.

— Non, mais j'ai encore besoin d'avoir ce contrôle sur ma vie, je réplique en resserrant l'emprise de mes doigts autour de mon cellulaire.

— Athalia, tu n'as pas de contrôle sur ce que les gens disent. Je sais que tu fais ça pour essayer de te rassurer, pour te dire que si tu vois ce qu'ils racontent à ton sujet, ça serait moins pire que si tu ne le voyais pas, mais c'est faux, argue-t-il. Tu te fais du mal pour rien.

Je reste silencieuse quelques instants, les yeux perdus sur le tapis molletonné présent sous la table basse. La colère que j'ai ressentie plus tôt revient pulser sous ma peau, malgré la volonté que je tente de forger pour la repousser.

𝑵𝒆́𝒎𝒆́𝒔𝒊𝒔Where stories live. Discover now