Chapitre 8

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"They judge me like a picture book, by the colours like they forgot to read"
Brooklyn Baby // Lana Del Rey

Je me réveille dans mon lit, comme si tout ce qui m'était arrivé la nuit n'était qu'un rêve.

Pourtant, lorsque je m'assoie dans mon lit pour regarder la neige qui tombe par la fenêtre, ma main froisse un petit papier.

"Attends encore 26 jours, mon costume n'est pas près et la fleuriste est malade"

Un sourire se dessine sur mon visage malgré moi. Je sais sans hésitation de qui il s'agit. Je me demande réellement comment j'ai fait pour atterrir dans mon lit. Je me rappelle être tombée et après, le trou noir.

Et surtout, je me demande comment Luke m'a retrouvée. Pourquoi était-il dehors à cette heure-là de la nuit ? Je me concentre et tentent de reformer les évènements de la veille. Je ne sais pourtant toujours pas ce qui s'est abattu sur ma tête pour que je perdre connaissance si vite, mais peut-être que ce n'était que mon chagrin car je n'ai aucun mal de crâne.

Mais lorsque je me rappelle ses mots de la veille, tranchants et froids comme la glace, un dégoût de moi-même et une honte surdimensionnés m'envahissent.

Je ferme les yeux, et compte jusqu'à cent avant de les rouvrir, comme pour me réveiller d'un mauvais rêve.

Mais nous sommes toujours samedi, un samedi de plus, empli de solitude et de temps à tuer.

Je pourrais appeler Luke, j'ai son numéro de téléphone. Mais il ne veut surement pas entendre parler de moi. Je l'ai déçue au possible, je le sais.

Mon ange me manque tellement... Toutes ces soirées passées avec lui, sur le toit de ma maison, à regarder les étoiles jusqu'à ce que le soleil pointe le bout de son nez. Lorsque la nuit était tombée et avait envahie tout un côté de la planète, il prenait sa guitare et nous chantions Florida Kilos, sans nous soucier de la justesse de nos voix.

« We could get high in Miami, dance the night away / People never die in Miami, that what they all they all say. » (1)

(1) On pourrait se défoncer à Miami, danser toute la nuit / Les gens ne meurent jamais à Miami, c'est ce qu'ils disent tous

C'est comme si à travers une tristesse infinie et plus qu'apparente, elle cherchait tout de même à être éternelle. Comme si rien n'avait vraiment d'importance, parce que tout était important. Comme si la vie était horrible, mais que chanter la rendait plus douce, plus vivable.

Dans chacune de ses chansons, elle décrit la vie comme une blague, comme si tout n'était qu'un jeu auquel chacun jouait. Je crois que je suis en partie d'accord avec elle. On nait, on vit, on meurt. C'est ainsi depuis toujours, et il ne faut pas en être triste. Il ne faut pas avoir autant d'attachement pour les battements de son cœur. Il faut faire des bêtises, prendre la totalité des choses à la légère, comme si la seule erreur à faire était de continuer à vivre.

Je crois que c'est en partie pour ça que je devenue ce que je suis : une fille qui n'a pas peur des gens, mais qui a peur de la vie. C'est normal d'avoir peur de mourir. Tout le monde est effrayé à cette idée. Mais pas moi. Au contraire, c'est tellement plus simple de se dire que si quelque chose va mal, que si notre vie devient un véritable calvaire, il suffit d'y mettre fin. C'est étonnant. Mais mes peurs n'existent pas tant qu'au bout du compte, la mort m'attend et guette chaque faux pas.

Je soupire. Je pense trop, tout le temps. Luke l'a dit, je m'attarde trop sur les détails, et c'est ce qui me tue.

Mais il n'y a pas que ça. Il y a une multitude d'autres choses qui se sont agglomérées, comme de la poussière, comme une boule de neige que l'on roule et qui grossit au fil de sa course. Mon cœur n'est plus qu'un bout de papier froissé qui n'a jamais servi qu'à éponger les peines des autres.

365 Jours avant la Mort - [Terminée]Where stories live. Discover now