Chapitre 22

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–       Qu'est-ce que tu veux faire, ce soir ? demande-t-il alors que nous venons de terminer notre dernier cours de la journée.

Mon sac pèse lourd sur mes épaules et j'ai un mal de tête affreux. J'ai l'impression que cette heure d'histoire-géo a duré trois heures alors qu'en vérité, je ne suis même pas restée une heure sur ma chaise.

–       Je ne sais pas, comme tu veux.

–       C'est toi qui choisis, ajoute-t-il avec un sourire.

Je lui lance un regard surpris et plisse les yeux.

–       Qu'est-ce qu'il se passe ?

–       Bah rien, pourquoi ?

–       Je ne sais pas : il n'y a pas raison spéciale pour que tu me proposes de sortir ce soir ?

Il pince les lèvres et retient un sourire.

–       J'essaie de faire en sorte d'oublier qu'il ne nous reste que cinq jours ensemble.

–       Oh... je souffle. Tu sais, si tu tiens vraiment à ce que je reste, pourquoi tu ne te débrouilles pas pour m'endormir jusqu'à ce que j'ai dépassé les « un an » et que je doive attendre 365 jours de nouveau ? Ou alors, tu pourrais m'enfermer dans une pièce et...

–       Oui, je pourrais. Mais non, je ne le ferais pas, me coupe-t-il. Je n'ai pas passé tout ce temps à prendre soin de toi pour au final te faire du mal.

J'acquiesce, parce que je n'ai rien d'autre à dire. Que voulez-vous répondre à cela ? C'est tellement agréable quand vous savez que l'on vous protège... Je préfère changer de sujet avant que le terrain de devienne trop glissant ; je ne sais pas si je survivrais a la chute.

–       Tu devrais me remercier. Sans moi, on ne se serait jamais connu, je dis en riant.

–       C'est ridicule ce que tu viens de dire, Diana. Parce si tu n'avais pas été comme ça, je n'aurais pas fait attention à toi. Alors oui, heureusement que je te connais, mais j'aurai aimé te connaître autrement que dans cet état pitoyable.

–       Tu n'avais qu'à choisir quelqu'un qui allait bien. Et si ça ne te convient pas, personne ne t'oblige à rester avec moi.

Je lui décroche un regard noir et fixe un point devant moi. Je sais que je lui fais du mal en disant ça, mais je ne peux pas m'en empêcher. J'en ai assez qu'il me répète toujours la même chose, que je suis quelqu'un qu'il aime, mais qu'il déteste mes défauts.

Alors,  sur un coup de tête, je décide comment nous nous occuperons ce soir.

–       Attends ! dis-je en plaquant ma main sur sa bouche avant qu'il ne réponde.  Je sais ce qu'on va faire. Tu vas venir chez moi, j'ai quelque chose à te montrer. Mais tu dois me promettre de ne pas me juger, et de ne pas m'en parler ensuite. Je sais que je te dis des choses méchantes parfois, mais tu dois savoir tout ce que tu ne sais pas.

Il ne dit rien, mais je crois sentir une certaine tension l'envahir. J'ai énormément peur de sa réaction, mais après tout, il ne me reste que cinq jours à vivre. Au pire, ce seront cinq jours à supporter ses jugements.

Nous marchons rapidement sur le trottoir et lorsque nous arrivons chez moi, je fonce en quatrième vitesse dans ma chambre. Je manque de m'étaler de tout mon long en me prenant les pieds dans un vieux carton et me relève aussitôt.

J'ouvre mon tiroir à la volée, saisi les fameuses lettres et dévale de nouveau l'escalier. Luke est debout dans le hall d'entrée, penché sur un cadre de mes parents et moi. Je m'avance vers lui et lui tends les feuilles.

–       Rentre chez toi, Luke. Attend que la nuit tombe, pose-toi sur ton lit, et lis ça. Surtout, surtout, pour l'amour de Dieu, ne pleure pas, ne me juge pas, et je le répète, ne m'en reparle jamais. Hum d'ailleurs, tu sais quoi ? Il me reste cinq jours. Nous sommes mardi. Je ne veux plus te voir avant « tu-sais-quoi ». Si dimanche soir, à une heure, je ne suis pas devant chez toi, alors ne me cherche pas, tu ne me retrouveras plus jamais. Et si je suis là, devant chez toi, alors ce sera pour la vie, crois-moi.

Il secoue la tête lentement, comme si tout ça n'était pas réel, comme si ce n'était qu'une blague de mauvais goût.

–       Si c'est une lettre, je suis prêt à la lire. Mais seulement si tu lis la mienne en retour.

Il me tend une petite enveloppe bleue clair, et je la saisie d'une main tremblante. Elle me semble lourde, mais je sais qu'elle ne contient que du papier, si ce n'est un poids considérable de chagrin, de haine, peut-être, et surtout d'aveux.

–       Diana... murmure-t-il avant de déposer un baiser sur le haut de mon front. Adieu.

Tout va tellement vite... Je n'avais pas prévu de lui donner mes lettres, je n'avais pas planifié de passer cinq jours sans le voir et surtout, je n'avais pas réalisé que justement, il ne me restait que cinq petits jours insignifiants.

J'aurais aimé que ce soit comme dans les films. Qu'il m'embrasse à pleine bouche – parce que c'est ce que je veux secrètement depuis le début –, qu'il me dise encore qu'il m'aime et qu'il reste malgré mes pleurs. Mais il n'a rien fait de tout cela, il a juste tourné les talons, et il a disparu.

Et c'est lorsqu'il est parti et que j'ai senti mon cœur se déchirer en deux que j'ai réalisé à quel point ça devait être dur pour lui aussi de me quitter ainsi.

C'est peut-être mieux comme ça : pas d'au-revoir qui s'attardent, pas de chagrin qui durent.

Je remonte dans ma chambre et dépose l'enveloppe de Luke sur ma table de chevet. Je ne veux pas l'ouvrir tout de suite, il reste encore cinq jours, cinq jours que je maudis intérieurement.

Je prends seulement un sac de couchage et quitte ma maison. Je marche dans les rues sombres et désespérément vides, et arrive enfin à destination. Et comme chaque fois, ma gorge se serre.

Je prends seulement un sac de couchage et quitte ma maison. Je marche dans les rues sombres et tristes, et arrive enfin à destination. Et comme chaque fois, ma gorge se serre.

C'est tellement vide.

Parfois je m'en veux lorsque je dis que je suis attirée par le vide. C'est en partie faux. Je le déteste lorsqu'il prend possession de mon cœur, mais j'adore celui du haut de la montagne.

Une seule question persiste : suis-je vraiment prête à me jeter de son sommet ?

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MERCI ÉNORMÉMENT 😘

PS : la fin approche à grands pas 😏

365 Jours avant la Mort - [Terminée]Where stories live. Discover now