Lettre n°2

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Luke,

Tu sais que j'ai peur chaque fois que tu poses les yeux sur moi ? J'ai peur que tu me regardes comme si je ne te plaisais plus, comme si t'avais réalisé à quel point j'en vaux pas la peine.

J'ai peur que tu me juge et que tu me méprise.

J'ai peur que d'un seul coup, tu cesses de me prêter de l'attention, comme cet après-midi, et que je retombe dans l'enfer d'où tu m'as tiré.

J'ai été odieuse avec toi, et tu sais parfaitement que je ne m'excuserais jamais assez.

C'est vrai, n'est-ce pas, que je n'ai jamais donné l'impression de te croire, que j'ai toujours fais comme si aucun de tes mots ne me percutaient, et que de tout ce que tu me disais, je ne croyais rien.

Mais tu es conscient que c'est faux, non ? Parce que ça l'est, et j'aimerais que tu le sache.

Je me rappelle de tous les reproches que tu m'as fait, je me rappelle de chaque remarque que tu m'as dit. Parce que j'y crois dur comme fer.

Je pensais que c'était simplement lié au fait que tu sois le seul à me parler. Mais c'est pas ça. C'est tout autre chose.

C'est peut-être parce que dans tout ce qui sort de ta bouche, il y a une pointe de vérité, et qu'on est obligé de te croire. T'es comme l'étoile du berger, tu brilles tellement que les gens te reconnaissent instantanément comme un guide et que tout le monde te suit, parce que tout le monde sait que t'es quelqu'un de bien.

Je t'écris dans mon lit, comme hier. Sauf que ce soir, il ne me reste plus qu'une semaine, et je n'ai encore aucune idée de ce qui m'attend.

C'est excitant, au début. Comme un compte un rebours, comme un sablier. Et puis lorsque je réalise que c'est ma vie qui est en jeu, j'ai peur, soudain. J'ai peur de ce qui m'attend.

Si tu n'avais pas été là, j'aurais simplement noté 358 sur ma main, sans arrière-pensée. J'aurais attendu la mort, tranquillement allongée sur mon lit. Ça aurait donné une bonne leçon à ma mère que je parte, et j'aurais rejoint mon Ange plus vite.

Mais maintenant que c'est si près de moi, qu'est-ce que je dois faire ? Tu es là, et je ne veux pas te quitter. Pas si vite.

Parce que j'ai pas eu le temps de te remercier d'avoir fait tout ça pour moi. Je voudrais pouvoir te dire tout ce qui ne tourne pas rond dans ma tête, j'aimerai pouvoir t'expliquer. Mais même dans l'infini je ne trouverai pas les mots.

Et puis, après tout, c'est horrible ce que je compte faire à ma mère, elle serait tellement seule sans moi si je l'abandonne.

Alors je suis perdue, encore plus qu'avant. Il y a 50 de chaque côté de la balance, et j'ai l'impression qu'il faudrait une montagne pour changer la donne.

Dis-moi une chose. Si je te faisais lire mes deux lettres demain, est-ce que tu rirais, ou est-ce que tu m'aiderais ? Est-ce que tu ferais les deux, ou bien tu te mettrais en colère contre moi pour avoir pensé ce genre de chose ?

Tout est tellement imprévisible que ça m'effraie au plus haut point.

Je voudrais une carte, s'il-vous-plait, avec une boussole. Pour savoir où me rendre, vers qui me tourner, et à quel moment. J'ai vraiment besoin de quelque chose, de quelqu'un.

Peu importe qui, peu importe quoi, mais surtout, Luke, j'espère que c'est toi.

De nouveau, je ne sais pas comment clore cette lettre, mais de toute façon, tu ne l'as verras peut-être jamais.

Je te dis juste à bientôt.

Et Luke, n'oublie jamais que je t'aime, même si je n'arrive pas à le dire. Parce que chaque fois que je respire, c'est comme si l'air que j'inspirais chuchotais en moi des centaines de "je t'aime" qui t'étaient destinés.

Diana.

PS : encore une fois, excuse-moi d'être moi.

365 Jours avant la Mort - [Terminée]Where stories live. Discover now