L'étoile brûlante.

CHAPITRE UN.

Elle regarde l'homme. Intimidée, elle dévie le regard. Elle se retrouve à regarder, l'espace d'un instant, le bureau en face d'elle. L'homme regarde l'adolescente puis il marche jusqu'à la fenêtre de la chambre. Cette fenêtre est ouverte sur le jardin, sur la froidure de l'air hivernal qui arrive par bouffées. Il ferme la fenêtre puis, il se retourne vers la jeune fille qui demande :

- Où sommes-nous?

Son regard indique qu'elle reste méfiante.

- Chez moi, répond l'homme.

- Pourquoi m'avez-vous amenée jusqu'à chez vous, s'empresse-t-elle de demander ensuite.

L'homme affiche une expression surprise. Il ne s'attendait pas à cette question.

- Je rentrais chez moi et je vous ai trouvé dans la rue, assise entre deux maisons et gelée. Je me suis dit que je ne pouvais pas vous laisser là.

La jeune adolescente éprouve un sentiment versicolore dont elle ne peut décider s'il est triste ou gai. Elle est vivante. L'homme à la chevelure rosée s'approche de l'adolescente. Elle a un mouvement de recul lorsqu'elle voit sa main se rapprocher de son visage.

- Je veux simplement vérifier votre température, explique-t-il.

Elle le regarde longuement, l'air un peu méfiante puis elle s'allonge. L'homme s'assied sur le bord du lit puis se penche pour poser la main sur son front. Tandis qu'il vérifie la température de l'adolescente, elle aperçoit les quelques cicatrices qui marquent les poignets de l'homme.

- Vous avez l'air d'aller un peu mieux qu'hier... dit-il en enlevant sa main. Reposez-vous encore un peu et ça devrait aller.

- Merci, prononce-t-elle.

L'homme lâche un sourire.

- Lorsque vous vous sentirez mieux, vous pourrez vous changer et prendre quelques vêtements propres dans l'armoire, dit-il ensuite. Les habits seront certainement grands pour vous mais ce sera toujours mieux que les misérables haillons que vous portez actuellement.

- Très bien. Merci.

- Je vais devoir vous laisser, annonce-t-il en se dirigeant vers la porte. A plus tard, Mademoiselle...

Alors qu'il s'apprête à quitter la pièce, elle demande :

- Monsieur. Vous voudriez bien arrêter de me vouvoyer? Je n'aime pas ça...

- Le Tu et le Mademoiselle, ça ne va pas ensemble, répond-t-il.

- Alors appelez-moi Lucy.

Il se retourne. Un léger sourire s'ébauche sur ses lèvres.

- Très bien. A plus tard, Lucy. dit-il en insistant sur le prénom de l'adolescente.

Il quitte la pièce et ferme la porte de la chambre. Ensuite, il descend le plus silencieusement possible à son atelier. Après avoir poussé la porte de l'atelier, il la referme derrière lui et contemple la pièce avec satisfaction. Aucun outil ne traîne, et la pièce est d'une extrême propreté. Il tourne la tête et observe un instant la rue par les vitrines nettes. Il y a beaucoup de personnes. Une foule laborieuse composée de riches et d'enfants circule et grouille sur les trottoirs. La plupart des personnes ont les bras chargés de cadeaux. Elles effectuent leurs derniers achats pour Noël. Le musicien regarde toutes ces personnes. Son regard semble triste et nostalgique. Il envie ces personnes qui passeront ce Noël entourée des leurs. Il s'approche ensuite de sa vitrine et regarde ses dernières nées avant d'en saisir une. Il vérifie sa création sous toutes ses coutures. Il l'accorde et plaque quelques accords avant de la reposer dans la vitrine. Et il soupire. Il n'a rien à faire. Il s'approche d'une petite chaise et s'y assied. Il rejette sa tête en arrière et regarde le plafond. Il songe et imagine la fête qu'il passera ce soir. A dix-sept heures, il essayera de se rendre à l'hôpital où il souhaitera une bonne fête à son grand-frère qui est étendu sous les draps depuis presque sept mois. Il lui raconterait sa journée et le bruit mécanique de la respiration de son frère et les bip de la machine lui répondraient. Ensuite, il irait s'acheter une bouteille comme l'année dernière et il passerait Noël seul dans son salon. Quel beau programme. Ce sera un moment convivial et joyeux où il sera accompagné d'une bouteille de whisky et de sa télévision.