Chapitre 38

4.5K 319 17
                                    

La brise fraîche du soir caressa paresseusement le visage de Kylie. Cette dernière, appréciant le contact franc, demeura immobile un instant à contempler le spectacle qui s'offrait à sa vue. Elle sourit timidement. Elle attendit encore un moment avant de prendre entre ses mains gantées, les quelques pièces de monnaie parisiennes que lui remettait le taxi Man. Sans plus attendre, elle tourna les talons, serrant sa pochette de marque entre ses doigts. Malgré la présence de son garde du corps, Kylie se sentait seule. En prenant la direction de l'ascenseur de son hôtel où elle logeait depuis peu, elle ignora les regards des clients.

Rapidement, son garde du corps la devança pour faire ouvrir les portes dorées de l'ascenseur. Elle s'y engouffra furtivement, humant l'air presque chaud de la cabine. Elle repensa à sa soirée pour se distraire. Après le départ de Bria, elle avait finalisé son achat à la boutique des robes de mariées et s'était sans plus tarder, retournée à sa chambre. Les heures de solitudes ne l'avaient pas épargné et sur conseil de la standardiste, elle s'était rendue au Moulin Rouge pour s'occuper l'esprit. Ce n'était pas que Adams lui manquait, bien sûr. Seulement, elle ignorait ce qui était à la base de ce ressentiment morbide. Elle n'était pas non plus souffrante. Elle savait une chose. Il lui manquait l'affection d'un homme. Et l'approche du jour du mariage n'arrangeait pas non plus les choses.

À un certain moment, son garde du corps s'était rendu compte de son malheur. Il n'avait pas hésité à lui demander ce qui n'allait pas, mais surtout à lui apporter les soins nécessaires. Une fois encore, elle avait gentillement refusé, rassurant le jeune homme qu'elle allait bien. Mais elle avait conscience que c'était tout simplement le contraire. Elle expira de dégoût. Comme si l'ascenseur eut vent de ses jérémiades, les portes s'ouvrirent pour la laisser passer, avec son garde du corps sur les talons. Devant la porte de sa chambre, elle se retourna pour souhaiter une agréable soirée à son garde personnel.

- Je crains fort, madame, que vous n'allez pas bien, répliqua le jeune homme inquiet. Dois-je avertir monsieur Muller?

- Ce n'est pas la peine, Sui! Je vais bien, ne vous inquiétez pas. Une bonne nuit de sommeil et je serai de nouveau gaie.

Pour appuyer ses propos, elle sourit tendrement au jeune homme. Ce dernier obligé de croire celle qu'il protégeait, s'en alla se reposer. Kylie n'ajouta plus rien et pénétra à son tour, dans sa suite. L'obscurité l'accueillit, maîtresse des lieux. Elle referma la porte derrière elle et chercha aveuglement de ses doigts, l'interrupteur. Quand ses doigts firent pression dessus,la lumière jaillit éclairant la pièce. Kylie jeta sa pochette qui atterrit paresseusement sur le canapé de cuir. Elle ôta ses gants et se dirigea dans sa chambre. À peine eut-elle à actionner l'interrupteur, qu'elle étouffa un hurlement. Son cœur fit un bond dans sa poitrine. Elle recula sous le choc, les sourcils froncés.

- Que fais-tu ici?, demanda-t-elle folle de rage.

- J'aurai appris que tu es venue chercher une robe pour ton mariage.

Kylie scruta son invité surprise de long en large. William était la dernière personne qu'elle avait envie de voir en cet instant. Elle avait assez à penser et à gérer qu'à entendre ses explications; car, elle était sûre qu'il était là pour la ramener à lui. Seulement, elle n'en avait plus envie. Elle n'était plus partante pour une passade nocturne.

- Vas-tu vraiment l'épouser?, reprit-il mélancolique.

- Que croyais-tu? Je n'ai pas l'intention d'abandonner mon fiancé le jour où nous nous marierons. Tout du moins pour le moment je n'ai pas encore pris le pli.

William accusa le coup. Il repensa à ce que Olivier lui avait dit. La veille, il avait demandé à son ami de lui trouver un vol pour Paris dans la soirée. Malgré la difficulté inhérente, le jeune homme ne l'avait pas abandonné. Il avait parcouru de nombreux aéroports, et passé d'innombrables coups de fils afin de lui trouver un vol en partance pour la capitale de l'amour. L'argent ne lui faisant pas défaut, il avait dû faire pression avant de convaincre un pilote de l'y emmener. À peine atterri, il avait filé à l'hôtel, mettre en sécurité la saccoche qu'il n'avait que pour bagage. Le reste du temps, il avait patienté afin d'avoir la localisation exacte de la jeune femme. Il s'était introduit dans la suite de Kylie, après avoir soudoyé la standardiste et négocié avec le maître d'hôtel. Il leur avait assuré que s'il atteignait son but, il ne léserait pas sur le choix de leur établissement. Bien sûr, il s'était attendu à ce que la jeune femme l'accueille avec dédain. Par contre, il allait suivre les conseils de son ami et écouter la jeune femme.

- Je n'ai pas envie de te voir, William, dit Kylie la voix enrouée. Vas t-en.

- Il est vrai que je t'ai fait énormément de mal. Je le reconnais Kylie. Seulement, je te demande de ne pas épouser Adams.

- Pourquoi dis-tu cela? Te crois-tu meilleur que lui? Cet homme, contrairement à toi, ne m'a jamais méprisé. Il m'a toujours témoigné son amour. Il a été patient même quand je continuais à te vouer un amour aveugle. Je pensais faire le bon choix, mais tu m'as déçu. Comment as-tu pu, William, te servir de moi?

- Je ne me suis jamais servi de toi.

La rage de Kylie grimpa d'un cran. Elle n'arrivait pas à comprendre comment cet homme venait jusqu'à elle pour la narguer à ce point. Il persistait dans le mensonge. Pour parvenir à quelles fins? Elle ne saurait le dire.

- Vraiment? Pourquoi m'avoir fait l'amour tout en sachant que ta femme était enceinte?

Face au mutisme de son interlocuteur, Kylie continua sur sa lancée.

- Tu n'avais pas le choix n'est-ce pas? Tu ne pouvais pas t'empêcher de satisfaire ce désir bestial qui t'habitait. Tu n'en avais cure de mes sentiments de ce que je pouvais ressentir.

- Cela n'a jamais été le cas...

- Tais-toi, menteur!

William se tut, contractant violemment sa mâchoire. Jamais il n'avait été ainsi, dans cette position de vulnérabilité, mis à nu devant ses responsabilités. Il savait que Kylie avait raison. Il l'avait bien trop souvent sali, allant jusqu'à lui balancer des obscénités. Il avait conscience qu'il s'était longtemps voilé la face, nourrissant son orgueil de ce que la jeune femme s'était éprise du jeune banquier de l'époque. Il s'était toujours programmé dans la tête, qu'en repoussant la jeune femme par ses actes ignobles, il parviendrait à lui laisser la chance de vivre une vie facile, auréolée de bonheur, puisque lui s'était enlisé dans une situation qui n'avait pour source que l'oncle de Kylie. Il tenta une nouvelle initiative.

- Tu ignores tout de la vérité, Kylie.

- De quelle vérité s'agit-il ? Quelle vérité serait différente de l'ultime? Tu m'as abandonné alors que tu savais que j'étais folle amoureuse de toi. Tu t'es servi de moi pour assouvir tes instincts de mâle insatisfait.

- Kylie...

- J'en ai marre de t'entendre. Si tu es venu pour me dire que tu es désolé, ce n'était pas la peine. Je voudrais juste te demander une faveur. Éloigne-toi de moi et de la famille. S'il-te-plaît.

William darda son regard dans celui de celle qui l'avait longtemps obnubilé. Il ne s'était jamais senti aussi impuissant qu'en se moment. Il voulait encore une fois marquer cette peau de son sceau, lui donner de sa chaleur, mais il se ravisa. Il ne fallait pas creuser encore plus l'écart.

- J'ignore si je peux résister à l'envie de te voir, Kylie.

- Je n'en ai rien à faire. Fais comme tu peux, mais reste loin de mon foyer.

William sentir son cœur se serrer douloureusement à cette dernière appellation. Kylie voulait fonder une famille et cela le rendait malade à l'idée de l'apprendre. Il n'avait pas envie d'y croire, encore moins y penser. Il se leva alors, levant son bras dans l'ultime tentative de serrer la main de son ex-amante. Mais celle-ci s'écartant vivement, réprimant son envie de la toucher.

- Kylie..., gémit faiblement William, déçu.

- Vas-t-en! Vas-t-en avant que je n'appelle la police!

William réfléchit l'espace d'un instant. L'idée de partir loin d'elle lui faisait peur. Si il partait, il craignait de la mettre définitivement dans les bras de son ami, Adams. Or, il n'avait pas besoin de ca. Pourtant, il s'était promis de laisser la jeune femme tranquille si jamais, elle venait à le repousser. Alors, sans plus prononcer le moindre mot, il s'en alla, tournant le dos à Kylie.

Quand il eut passé la porte, Kylie s'éffondra au sol. Ses jambes ne la portaient plus. Ce fut dans un bruit sourd, qu'elle s'évanouit seule, dans le silence de la pièce....

Troublantes retrouvailles.Where stories live. Discover now