XVIII. Alors je cours, encore et encore

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19 juillet 2019


-Je pense que tu dois te souvenir, de cette légende qui entoure notre lignée, et dont ma grand-mère avait parlé. Cette légende qui semble pourtant bien réelle, et qui a d'ailleurs provoqué la mort de ma mère. Ce jour là, je crois que je n'aurais jamais pu deviner jusqu'où ça dégénérerais.

Les yeux baissés, il marque une légère pause. Après avoir pris une grande inspiration, il reprend la parole.

-Mon père avait un attachement sans bornes à ma mère. Déjà quand elle vivait encore, il lui arrivait de faire des crises de panique à l'idée de sa mort, au point de n'en plus dormir la nuit pendant plusieurs jours. Pourtant, les premiers jours après son décès, mon père n'avait pas pleuré une seule fois. Il ne s'était pas non plus énervé. Son visage est en fait resté complètement inexpressif pendant environ une semaine. Mais c'est du jour au lendemain, et à cause d'une simple petite erreur de ma part, qu'il a disjoncté. Toute la semaine durant, il n'avait prononcé que quelques mots éparses à mon égard, se murant dans le silence le reste du temps. Mais tu connais les enfants. Et du haut de mes neuf ans, après avoir vu le corps de ma mère baigner dans son propre sang, je n'ai pas pu m'empêcher de poser des questions. Ma mère est née le 31 octobre 1967,et est morte le même jour, et c'est le dimanche 6 novembre 2011, la veille de la rentrée des vacances, que j'ai provoqué le début de l'autodestruction progressive de mon père, qui m'entraîna alors dans son sillage.

Dimanche 6 novembre 2011

Je viens de finir de ranger mes affaires dans mon sac d'école. Demain je vais y retourner, mais normalement c'est maman qui m'amène, mais vu qu'elle est partie je sais pas comment je vais y aller. J'ai décidé d'aller voir papa pour lui demander, mais comme il a pas parlé de toute la semaine, je sais pas si il pourra me répondre. Peut-être qu'il sait plus parler.

Je suis devant le bureau où il travaille tout le temps pour pouvoir lui poser la question. J'espère que je vais pas le déranger. Je toque à la porte.

-Papa, je peux te poser une question ?

-...

-Papa.

-Entre.

J'ouvre la porte et rentre dans le bureau. Papa est assis sur sa chaise en train de travailler, comme d'habitude.

-Qu'est-ce que tu veux ?

-Comme maman est plus là, je vais y aller comment à l'école demain ?

Quand papa entend le début de ma phrase, sa tête se relève brusquement et il commence à me fixer d'un méchant regard. D'un coup, il se lève de sa chaise et s'approche de moi l'air très en colère, en tapant des pieds. Je fais un pas en arrière, apeuré par son comportement menaçant.

Lorsqu'il arrive à ma hauteur, il attrape violemment le col de mon t-shirt et me soulève du sol. Il commence alors à me crier au visage.

-C'EST TOUT CE QUE LA MORT DE TA MÈRE TE FAIT ?! Pas de cris, pas de pleurs ?! Pas de hurlements à en vriller les tympans ?! Pas de besoin de réconfort ?! Ça ne t'attriste pas, toi, qu'elle soit partie pour toujours ?! TU NE POURRAS PLUS LUI PARLER, LUI FAIRE DES CÂLINS OU MÊME RIRE AVEC ELLE !! C'EST TERMINE, PLUS DE MAMAN ! DOMMAGE HEIN ?! Vas-y, explique moi, comment tu fais pour ne pas être triste ?!

-Mais je suis triste papa.

-ALORS POURQUOI TU PLEURE PAS ?! T'ES PAS NORMAL COMME GOSSE ! Pourquoi tu pleure pas, comme tous les autres ?! Dis-moi, je t'écoute !

Le Mystère de MilénaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant