27. Le rêve

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Pendant ce temps, sur Éden. Assoupi dans les bras de Marie Madeleine, éreinté par les aventures qu'il venait de vivre, Jean ne tarda pas à sombrer dans un sommeil profond...

Un rêve étrange m'emporta très vite vers les sombres profondeurs de cet océan gigantesque. Son chant et ses odeurs firent chavirer mon subconscient vers des endroits féeriques, peuplés de créatures extraordinaires.

J'avais l'impression de pouvoir respirer sous l'eau. Je frôlais les bancs de corail comme j'avais effleuré les montagnes d'Éden, quelques heures auparavant... D'énormes monstres marins semblaient m'observer du fond des abîmes.

Une faible lueur apparut alors, au loin, entre les roches et les coraux qui tapissaient la surface de l'océan. Elle sembla me parler, tout en m'attirant vers elle. Elle était entourée d'un halo violet, donnant à l'endroit où je me trouvais l'allure d'une véritable cathédrale sous-marine !

Soudain, une voix familière résonna en moi...

— Bonjour, Jean... n'aie pas peur, je suis ton Guide : ton ami de toujours. Respire calmement, profondément. Concentre-toi sur ce que ton corps ressent. Quelles douleurs, quelles tensions, quelles pensées sont présentes en toi ? Écoute-les avec attention. Détends-toi et sois entièrement dans l'instant présent... Remplis tes poumons à fond, et puis vide-les complètement. Quelles sont les émotions qui habitent ton cœur ? De quelles conversations te souviens-tu ? Comment le chaos mental de tes pensées et de tes peurs, affecte-t-il ton corps ? Visualise-toi comme un voyageur du temps et de l'espace en route vers sa destinée... Ce n'est pas facile, tant d'obstacles ont déjà parsemé ta route. Imagine revoir, en face de toi, le Maître qui vous a guidés jusqu'ici. Il est assis sur un tas de pierres au fond de l'océan. Il t'y attend, va le rejoindre. Il se penche vers toi et prononce quelques mots à ton esprit sans même avoir à ouvrir la bouche... comme il le fit lors de votre toute première rencontre, au début de ton long voyage au fin fond de l'espace.

— Mon enfant, ces pierres qui t'entourent représentent les obstacles auxquels tu fus confronté au long de ton existence. Choisis celles que tu as décidé de garder en toi durant toutes ces années et place-les dans ce sac que tu porteras sur ton dos. Respire profondément... Concentre-toi... Prends les pierres une à une. Choisis attentivement celles qui représentent tes frustrations, tes doutes et tes révoltes qui ne peuvent être contrôlées... Remarque comme en les prenant ton corps se crispe d'avantage. Concentre-toi sur ta poitrine, ta gorge, ta façon de respirer, cette sensation d'étouffement qui s'installe en toi. Chacune de ces pierres sera non seulement un poids additionnel que tu auras à transporter, mais aussi une crispation supplémentaire qui t'empêchera de respirer profondément et de te détendre.

— Regarde le Maître assis en face de toi en soulevant les pierres que tu as décidé de mettre dans ton sac. Il vient murmurer quelque chose à ton esprit...

— Jean, je suis fier de toi, tu es presque arrivé au terme de ton parcours... Il te reste encore une dernière pierre à prendre. Elle représente tous ces soucis et ces rages que tu as oubliés, que tu as enfouis depuis si longtemps dans ton subconscient. Sens le poids de cette dernière pierre. Remarque comme elle est lourde. Regarde comme elle est lisse, ronde et érodée par la friction du temps. Mets-la également dans ton sac... Maintenant, lève-toi et place-le sur ton dos. Sens son poids, ses lanières qui s'enfoncent dans la chair de tes épaules.

— Sans mot dire, continua la voix qui m'avait entraîné jusqu'ici... le Maître sort une main de son manteau blanc et pointe le doigt vers le haut en te désignant l'endroit où la surface de l'eau touche la falaise. Tu dois marcher, escalader les fonds marins pour te rendre là où il t'a indiqué d'aller. Ressens le poids de tes obstacles, tes révoltes et tes soucis en remontant péniblement cette colline sous-marine... Les lames aiguisées du corail qui tapisse le chemin que tu empruntes cisaillent tes pieds. Ressens la peur, la crispation qui entravent ta respiration en rendant tes efforts de plus en plus pénibles. Tu as peur d'étouffer, de te noyer, ici, au fond de l'océan ; sans que personne ne puisse venir t'aider. Tu aperçois enfin, en arrivant à la surface de l'eau, l'entrée d'une grotte nichée au pied de la falaise. Elle est gardée par une femme qui t'observe... Son visage est ridé et ses yeux perçants semblent voir à travers toi ! Elle t'invite à entrer. Tes vêtements mouillés et ton sac sont si lourds qu'ils risquent de te faire trébucher à chaque pas qui te rapproche de cette femme. En passant tout près d'elle, tu remarques son parfum familier. Tu la regardes dans les yeux. Elle te sourit tendrement... C'est ta mère, tu la reconnais à présent. Elle te fait signe de continuer vers l'intérieur de la grotte. Tu y aperçois un feu qui brûle dans l'obscurité. Sa lueur et les bruits de son crépitement te guident vers son âtre. Tu remarques la silhouette accroupie d'un homme, penché sur les flammes, les observant danser au gré du vent qui s'engouffre dans la falaise. Il se redresse lentement pour te fixer dans les yeux. Tu reconnais ce regard perçant. C'est celui de ton père... Il n'a pas changé ! Il te sourit avec amour et admiration. Il te donne l'impression de t'avoir attendu ici depuis très longtemps. Tu sens qu'il est fier de l'homme que tu es devenu, qu'il croit en toi... Cette sensation vient lentement effacer le poids de ton sac et enlever le masque de colère et de douleur que tu portes sur ton visage éreinté par ce long voyage. Tu fermes les yeux en inspirant profondément. Tu sens sa main prendre la tienne, cela te rappelle tant de souvenirs. Ses yeux t'observent avec admiration et amour... Il t'aide à te débarrasser de ton fardeau, te donnant l'impression de pouvoir t'envoler comme le ferait ta tendre compagne dans l'atmosphère d'Éden. Tu as tellement de choses à lui raconter, tu aimerais tant qu'il la rencontre. Tu ressens la chaleur du feu qui vient sécher tes vêtements et te réchauffer le cœur. Tu te sens libéré par ce regard plein d'amour, de confiance et d'admiration. Il te donne tellement de force que rien ne te semble plus impossible... Tu retires le sac des mains de ton père, il est déjà bien plus léger. Tu te sens si fort à présent. Et tu le jettes dans le feu ! Un nuage d'étincelles s'élève alors dans la grotte, venant en éclairer les parois. Le feu reprend de plus belle, attisé par ton geste libérateur. Cette explosion de lumière a fait disparaitre ton père, pour faire place à une assemblée d'êtres étranges, habillés de vêtements amples et dorés... Tu es de retour chez toi, Jean ; bienvenu à « Shambhalla » !

Homo Sum 2 : l'éveil de l'humanité (Episode 2 : Révélation)Where stories live. Discover now