Chapitre 16 - Solitude

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Sophie,

Nous devons rentrer chez nous pour un moment. La Congrégation Alémanique a eu vent des agissements de Léandre. Il est convoqué au plus vite. Je dois l'assister pour leur assurer qu'il n'est pas dangereux. S'ils te posent des questions, je compte sur toi pour le soutenir comme il le fait pour toi depuis le début. Brûle cette lettre une fois que tu l'auras lue.

Je reviendrai,

Maya.

Sophie relut encore une fois la court missive de la jeune femme. Elle avait des frissons en songeant à ce qui risquait d'arriver à Léandre. Les cousins étaient partis dans la nuit, sans un bruit, la laissant à la merci dans l'immense manoir. Cette perspective la faisait aussi frissonner d'effroi.

Son regard se posa sur son bureau. Elle s'était tant épuisée la veille qu'elle n'avait pas entendu Léandre entrer dans sa chambre pour lui donner son manuel d'apprentissage. Elle aurait espéré qu'il y laissât un petit mot mais, il n'avait rien trouvé à dire. Elle sentit un déchirement dans son cœur. Léandre n'allait pas revenir, elle en était certaine.

Malgré leur départ discret, elle savait quand ils avaient claqué la porte du manoir. Les rires, les pleurs et les bruits de martèlement si propres au grenier avaient résonné au beau milieu de la nuit. Retrouvant ses réflexes d'enfant, Sophie s'était terrée dans son lit. Savoir que ces fantômes existaient la terrifiaient encore plus. Elle avait peur qu'elles se vengèrent de leur mort sur elle.

Des silhouettes se dessinèrent dans les vitres et les miroirs qu'elle croisait, mourant dès qu'elle tentait de les regarder en face. À la place, des ricanements étouffés de petite fille résonnaient. Les premières fois, Sophie gardait la tête baissée, n'osant pas les affronter. Mais, elle dérapa sur une petite marche et une chaise de la cuisine vint se loger sous sa main pour l'aider à se rattraper. Elle avait beau ne rien voir, la solitude devint un peu moins pesant :

"Merci." Bredouilla-t-elle.  

Ces derniers jours avaient été plaisants. Elle avait enfin eu les réponses à ses questions en plus de passer du temps avec des gens. Elle avait découvert qu'elle n'était pas aussi dérangée que ce qu'elle s'était persuadée. Elle appartenait à un groupe. Cette perspective la fit sourire. Elle avait toujours pensé que ce genre de choses n'était pas pour elle, qu'elle finirait sa vie seule avec Lise comme unique amie. Mais, un nouveau monde se dessina à elle même s'il était éphémère. Elle se souvint soudainement de cet ancêtre famillicide. 

Elle se fit un grand bol de café décidée à passer sa journée à étudier. Son portable vibra. Le visage de Lise apparut. La jeune femme saisit son téléphone au vol :

"J'ai eu ton message. J'arrive dans la soirée.

-Lise, tu n'es pas obligée.

-Je ne vais pas te laisser seule !

-Et ton travail ?

-J'ai posé deux jours pour raison familiale."

Sophie rit en entendant cette plate excuse :

"T'es comme ma sœur. Soutint-elle. Tu as besoin que je passe prendre quelque chose ?

-Il me manque des papiers. Tu peux aller les récupérer chez Louis ?

-Pas de soucis."

Sophie raccrocha rassurée. Elle hésita à aller attendre Lise chez Mme Clairion. Elle vivait toujours dans le village voisin. Peut-être qu'elle pourra aussi lui enseigner quelques petites choses en même temps. La voir ferait du bien à la jeune femme. Cependant, elle devait préparer le manoir. Lise voudrait le visiter et elle verra bien que rien n'avait été préparé pour le déménagement. Seul Léandre s'en occupait vraiment.

Souvenirs de la Côte d'OpaleDove le storie prendono vita. Scoprilo ora