Chapitre 48 - Reine des Neiges

10 1 0
                                    

Jamais Sophie n'avait eu l'envie de courir ou de faire du yoga. Pourtant, c'était les seules activités qu'elle avait chez Léandre. Elle avait découvert son impressionnante bibliothèque wiccane qui recelaient à la fois de vieux parchemins égyptiens jusqu'aux nouveaux traités des canadiens. Ses journées étaient donc dédiés à l'étude mais à force de se nourrir de théories, elle avait voulu pratiquer toutes ces magies qu'elle entrevoyait.

Elle avait notamment lu que la magie de l'eau, à l'instar de celle du vent, pouvait se pratiquer partout puisque le monde était parcouru d'humidité. La montagne lui permettait notamment de travailler la glace. Elle s'éloignait donc tous les jours plus loin pour  mettre des images sur la théorie.

Elle devait adapter sa danse de l'eau à la matière. Contrairement à l'élément liquide qui lui permettait des ondulations harmonieuses, elle jouait avec son corps ayant des mouvements plus secs, plus précis créant des figurines de glace abstraites. Elle se gelaient souvent les doigts s'obligeant à avoir toujours une thermos d'eau bouillante pour ne pas les perdre. Mais, elle progressait de plus en plus vite. Jusqu'au jour où elle forma une statue de plein pied.

Elle n'avait pas réfléchi lorsqu'elle avait dansé laissé porté par la mélodie aux intonations rêches et dramatiques qui bourdonnaient dans ses oreilles. Aussi, elle hoqueta quand elle se retrouva nez à nez avec une Maya au regard téméraire. Elle voulut la faire fondre en vain :

"Elle est magnifique." Remarqua Léandre.

Sophie fit volteface. Il était ruisselant de sueur. Son débardeur mouillé collait à son torse. Admirant la statue, il tourna autour recherchant des défauts mais, il n'en trouva aucun. Son regard bascula sur Sophie. Elle avait les joues et le nez rouges. Ses doigts étaient gercés. Il combla l'espace entre leurs corps et saisit ses mains qu'il porta à ses lèvre. Sophie hésita à les retirer mais, elle aimait trop ce contact. Tout en la réchauffant, Léandre planta ses yeux dans les siens. Il finit par poser ses lèvres sur ses doigts et y déposa un baiser doux. Elle rougit d'un coup. Sans la laisser répliquer, il la lâcha et se tourna vers la statue :

"C'est dommage qu'on puisse pas la déplacer. Ses parents l'auraient adorée.

-Ils vont être là..." Réalisa Sophie.

Il se tourna de trois-quarts la jaugeant de bas en haut avant de la rassurer :

"Ils ne te tiennent pas pour responsable. Personne ne le fait, au contraire.

-Et toi, tu as obtenu ta rédemption ?"

Il esquissa un sourire désolé en secouant la tête. Son corps se tourna totalement vers elle, comme retenu par un élastique. Les mains dans les poches, il se balança sur ses pieds :

"Pour tout te dire, personne n'est pas au courant pour tes dons de Lucide à part les Flamel, toi et moi."

Sophie écarquilla les yeux ne parvenant pas à comprendre. Léandre baissa honteusement la tête. Il passa la main dans sa barbe brune en soupirant :

"C'est... si ça se savait, on me couperait totalement mes pouvoirs.

-Et ça ne serait pas légitime ? Répliqua-t-elle froidement. C'est ce que tu as fait avec moi. Peut-être même que ça me rendrait mes pouvoirs, ils ne seraient plus retenus.

-J'y ai pensé. Avoua-t-il. Mais, ce n'est pas comme ça que ça marche. Ton pouvoir n'est pas retenu à l'intérieur du mien. Il ne suffit pas d'éclater la bulle pour le laisser partir. En fait, imagine plutôt qu'il est écrasé et qu'en enfermant mes pouvoirs, il serait enseveli sous une seconde couche.

-En somme, je ne peux qu'espérer que quelque chose le déplace."

Léandre la regarda par en-dessous. Il n'y avait rien à déplacer. Il avait déjà essayé de le faire et était tombé dans le néant de son âme. Il s'apprêta à le lui dire quand elle esquissa un sourire. Il ouvrit grands les yeux pour s'en assurer. Il l'avait déjà vue sourire quand elle parlait avec Lucille au téléphone. Mais, depuis qu'elle s'était réveillée de son année de coma, elle ne lui en avait adressé aucun.

Il fendit l'espace entre eux s'arrêtant juste assez proche pour sentir la chaleur que dégageait sa peau. Il voulait plus mais, il n'osait pas. Il était effrayé à l'idée qu'elle le repousse. Ce fut donc Sophie qui combla l'espace minuscule entre eux. Elle se hissa sur la pointe des pieds et posa ses lèvres sur les siennes. Léandre enroula immédiatement ses bras autour d'elle pour l'empêcher de s'échapper.

Ses lèvres glissèrent sur son cou. Elle rejeta la tête en arrière agrippant son tee-shirt pendant qu'il dévorait sa peau. Malgré la fraîcheur, ils retirèrent leurs vêtements s'unissant avec empressement. Leurs retrouvailles étaient lentes, sensuelles, délicates. Ils avaient si peur de se blesser, de s'éloigner l'un de l'autre. Et, en même temps, ils ne voulaient surtout pas se détacher. Leurs corps étaient comme soudés. Léandre garda quand même des réserves. Il avait peur que son désir laisse le vers dévoreur prendre le dessus. Il sentait son pouvoir désireux de sortir, de s'unir de nouveau à cette wiccane pleine de ressource. La sensation de dévorer le pouvoir d'une autre s'était révélé plus enivrant qu'une drogue. Au fond de lui, il voulait renouveler cette dégustation qu'il haïssait.

Lorsqu'ils s'arrêtèrent enfin, un manteau de neige les recouvrit. Sophie, enroulée dans son long manteau, ouvrit la bouche sans parvenir à parler. Le soleil d'été brillait au-dessus de leurs têtes dans le ciel bleu, dénué de nuages. Elle se tourna vers Léandre remarquant alors qu'il claquait des dents, frigorifié. Néanmoins, il eut un sourire en coin :

"Tu n'as pas remarqué ? C'est toi qui as fait ça quand tu as atteint l'orgasme."

Elle se mit à rougir violemment. Léandre ricana en se levant. Il s'habilla rapidement, la peau rougie à cause du froid. Ses pieds laissèrent des traces dans la poudreuse. Encore gênée, Sophie se mit à le suivre. Elle réfléchit un instant avant de s'approcher et de glisser sa main dans la sienne. Léandre eut un mouvement de surprise mais se retourna pas. Elle ne vit donc pas le sourire qui barrait son visage.

Alors qu'ils rentraient tranquillement, comme d'une ballade. Elle ferma les yeux et se concentra sur la neige qui les entourait. Cette dernière fondit formant une vapeur qui réchauffa doucement le jeune homme. Il lui fit face, les pétillants :

"Sophie, tes pouvoirs sont incroyables. Est-ce que tu as conscience qu'en deux petites années, tu as acquis la puissance que certains n'obtiendront jamais ? C'est la magie Atlante !"

Elle se dégagea. Elle ne voulait pas entendre parler de cette magie. Elle manipulait plus aisément l'eau qu'un autre élément. Mais, elle refusait d'entendre parler de cet endroit. Voyant qu'elle était mal à l'aise, il enroula ses bras autour de ses épaules et la serra contre lui. Elle s'agrippa à son débardeur en fermant les yeux.

Souvenirs de la Côte d'OpaleWhere stories live. Discover now