Chapitre 27 - L'enfant submergée

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Pernelle ne parvint pas à se dérider. Elle lançait des regards noirs à Nicolas dès qu'il ouvrait la bouche, beaucoup trop jovial pour le goût de sa femme. Il avait fait preuve d'une cruauté sans nom en assénant la triste vérité à cette enfant. Car, elle avait beau avoir vingt-cinq ans, elle était une enfant pour les wiccans qui ne considéraient pas l'âge mais la capacité magique comme un gage de maturité. Sophie, justement, accepta un plat que Wolfgang lui conseilla avec à plomb. Des algues épicées, un met peu ragoûtant dont le musicien raffolait. Il semblait, comme la plupart des membres du cercle, résolu à faire passer l'humeur maussade de la jeune femme.

Pourtant, c'était plutôt à son compagnon qu'il fallait changer ses idées. Léandre buvait beaucoup et mangeait peu, ne desserrant les dents que pour s'adresser à Sophie et passant le reste de son temps à fusiller l'hôte de son regard bleu. L'alchimiste trouva enfin l'occasion d'évoquer la situation, littéralement entre le fromage et le dessert ce qui ne manqua de faire grincer les Français :

"Je pense que nous avons tous la même idée en tête et qu'il n'est pas trop tard pour en parler. Même notre cher Yves, pourtant friand de la boisson, ne roule pas sur la table !"

Personne ne rit à la boutade. L'intéressé fit tout de même mine de s'indigner, pour la forme, avant de fixer son plat comme si c'était la chose la plus intéressante de ce repas. Marc-Antoine Moreau se leva :

« Si je puis me permettre, je pense qu'il est temps que nous prenons la parole.

-Je vous en prie. Répondit Nicolas en se rasseyant.

-Avant tout, nous devons nous présenter. Déclara Alfred Moreau. Mon frère et moi-même ne devons certainement pas être familiers de vos connaissances. Nous sommes les deux sorciers personnels du roi des Belges mais en ces temps il n'est pas conseillé à un roi d'afficher ce genre d'entourage.

-Je ne serai vous contredire déjà de mon temps ce n'était pas approprié. Ricana Niccolo. Et donc ?

-Nous sommes venus rencontrer M. Flamel pour l'avertir d'un fait très important. Un village wiccan entre les Pays-bas, la Belgique et le Luxembourg a disparu. Le paysage n'a pas été modifié mais ses habitants, de tout âge et de toute nature magique, sont tous portés disparus. Après avoir fait de nombreuses enquêtes, nous avons conclu que cela ne pouvait qu'être le fait de Hubert Villers. Nous savons qu'il reste dans cette partie de l'Europe où les congrégations se multiplient et où il est plus facile de se cacher. Cependant, nous avons pu remonter sa trace jusqu'à il y a trois ans. Il séjournait alors dans le pays de Phaslsbourg où il est réapparu, il y a quelques mois."

Sophie glapit. Elle songea à Maya restée dans sa région d'origine. Elle, qui avait été morte d'inquiétude en apprenant le lien entre sa camarade et le criminel, aurait été affolée de le savoir dans sa terre natale. Ces derniers jours l'avaient fait oublier son amie qui ne s'était pas non plus montrée. Elle s'inquiéta soudainement. Sous la table, Léandre glissa sa main sur la sienne. Il était tout aussi crispé par la conversation :

"Il est donc arrivé à nos frontières beaucoup plus vite que prévu. Déclara sombrement Yves.

-Pourquoi est-il allé dans ce trou paumé ? Soupira Niccolo.

-Parce que je m'y suis rendue, il y a de ça quelques jours." Intervint Sophie blême.

Les frères Moreau regardèrent en coin Léandre. Tout le monde devait être au courant de sa fuite :

"M. de Broglie nous a mis au courant. Et nous devons justement nous entretenir à ce sujet."

Nicolas Flamel se redressa. Il posa ses mains des deux côtés de son assiette. Son regard pervenche passa sur la tablée. Sa voix puissante, sortie de sa cage thoracique, résonna :

Souvenirs de la Côte d'OpaleWhere stories live. Discover now