Chapitre 9

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Le cuisinier revient trois minutes plus tard et s'installe à mes côtés.

— Je me présente, Elden, vingt-trois ans, div deux.

Je me doute qu'il doit savoir qui je suis vu que je suis nouvelle, mais je préfère me présenter comme lui.

— Je m'appelle Adilya, j'ai vingt ans et je suis en division quatre.

— En divis... quatre ?! Toi ?!

Je rougis une nouvelle fois. Pourquoi personne ne me croit ?

— C'est ce que m'a dit le coach. Mais apparemment, tu n'es pas le seul à ne pas me croire.

Elden se confond en excuses tandis que j'avale une tartine de confiture à la prune.

— Non, c'est pas que je ne te crois pas ! C'est juste que des filles en div quatre... Il n'y en a que neuf. Et elles ne sont que deux en div cinq.

— Mais alors je ne suis pas la première ! Pourquoi tout le monde est choqué ?

Elden me regarde droit dans les yeux et me dit :

— Écoute. Tu ne le sais pas, mais le tiers des personnes qui vivent ici sont nées ici, à l'écart de la société. L'Union ne sait même pas qu'elles existent. Ces personnes, elles sont entraînées depuis leur naissance pour être des machines de combat. Toutes ces personnes finissent dans des divisions hautes, au minimum la division trois. Et pour le moment, toutes les femmes qui étaient en division quatre et cinq étaient des originelles, des personnes nées à la grange.

— Alors je suis la première fille de l'Union à atterrir aussi haut dans la hiérarchie ?

— Yep.

Puis il me fait un grand sourire et continue :

— Et je dois dire qu'être le premier ami de la seule meuf non-originelle à être en div quatre, ça en jette !

Je suis contente qu'il dise être mon ami. Au moins une personne qui m'apprécie ! Par contre, j'ai peur des réactions des gens que j'ai croisés tout à l'heure. Est-ce que maintenant tout le monde va être comme ça avec moi ? Méchant et moqueur ?

— Mais pourquoi alors les personnes qui étaient à l'extérieur de la salle quand je suis sortie ne m'ont pas crue et m'ont regardée avec méchanceté ? Et d'ailleurs, qu'est-ce qu'elles faisaient là ?

Elden me sourit une fois de plus, et me désigne une nouvelle tartine qu'il vient de me faire. Apparemment, avec lui c'est simple. Je mange et il parle.

— Ces gens, c'est la div trois qui a un entraînement à sept heures chaque matin. Mais ils n'ont pas pu l'avoir à l'heure, ce qui les a mis en retard pour le reste de la journée parce que le coach était occupé avec toi. D'habitude, les nouveaux sont hiérarchisés en moins d'une heure, et cela n'interfère pas avec le programme de la grange. Mais cette fois-ci... Et bien tu as pris ton temps pour être classée ! Et puis les gens ne t'aiment pas parce que tu as mieux réussi qu'eux. Alors qu'eux ils font des efforts tous les jours pour essayer de passer dans la div supérieure, qui est celle à partir de laquelle on considère que tu es... comment dire... supérieure ?

— Chupérieure ? Ch'est-à-dire ?

J'aurais dû avaler avant de parler... Mais Elden ne s'en formalise pas et répond à ma question :

— Supérieure dans le sens où si jamais tu te bats avec quelqu'un, les gens prendront ta défense face au général, ou si tu réclames quelque chose à quelqu'un, il a intérêt à avoir une excuse en béton pour te refuser ses services, enfin voilà quoi.

— Mais il y a beaucoup de personnes dans les divisions... supérieures ?

— Pas vraiment. En gros, cinquante pour cent des gens sont en div deux, comme moi. Puis vingt en div une, dix en div trois, dix en div quatre, cinq en div cinq, et cinq en div six. Les pourcentages restent les mêmes et ne changent pas beaucoup. Les femmes représentent quatre-vingt pour cent de la div une et cinquante pour cent de la div deux. Après elles sont en minorité dans les autres divisions.

Je hoche la tête. Ces informations sont peut-être inutiles lors d'une bataille, mais pour moi qui ai fait des études de sociologies, elles m'aident à mieux comprendre le fonctionnement des gens d'ici, et de la grange en générale. Je fais partie des vingt pour cent des personnes les plus compétentes de la rébellion, et je suis une étrangère. Je comprends ce que peuvent ressentir certains rebelles, de se sentir trahis ; mais je ne pense pas que ce soit la bonne façon de réfléchir, il faut plutôt se dire que je suis un atout, et que si je suis venue ici c'est pour aider la rébellion, pas pour me faire des ennemis ni pour me montrer supérieure à tout le monde et le leur faire sentir...

L'Union FéminineDonde viven las historias. Descúbrelo ahora