88 - Maturité

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Lorsque Chiyo et son père quittèrent Nagaoka, Chiyo n'avait toujours pas donné sa réponse.

– Serait-il possible de me laisser un peu de temps pour réfléchir ? Avait-elle demandé au notaire. Je suis très jeune et c'est une grosse responsabilité.

– Évidemment, avait répondu le notaire. Voici mon numéro de téléphone. Appelez-moi dès que vous aurez pris votre décision.

Dans le train qui les ramenait vers Tokyo, Chiyo contemplait le paysage sans le voir.

Moi ? Propriétaire de la salle de sport ?

Cette pensée lui donnait le vertige, mais surtout elle lui donnait l'impression d'être une mauvaise blague.

Pourquoi aurait-il voulu me donner la salle à moi, alors que j'ai ruiné la chance qu'il m'avait offerte ? Il a bien vu que je suis une gamine immature. Comment il a pu penser que ça pouvait être une bonne idée ?

À côté d'elle, son père lui jetait de temps à autre des regards silencieux. Finalement il lui demanda :

– Qu'est-ce que tu vas faire, Chiyo ? À propos de cette salle ?

Elle soupira, le menton dans la main.

– Je ne sais pas papa, répondit-elle. Je ne sais vraiment pas.

– Est-ce que je peux te donner mon avis ?

Elle tourna les yeux vers lui.

– Évidemment, dit-elle.

Bunji choisit ses mots avec soin.

– Je pense que tu devrais accepter, dit-il. Je suis d'accord avec toi, tu es jeune, mais tu peux apprendre sur le tas. Tu ne serais pas la première à le faire et c'est sûrement moins compliqué que tu l'imagines. En plus, le coach n'aurait pas fait ça s'il t'en pensait incapable. Enfin... n'oublie pas qu'il s'agit de ses dernières volontés. Il est important de respecter les dernières volontés d'une personne qui nous a quittés.

C'est vrai, se dit Chiyo. Je n'avais pas pensé à ça.

Elle ramena les yeux sur le paysage qui défilait derrière la fenêtre sans dire un mot.




Ils arrivèrent à Tokyo au milieu de la nuit, mais malgré l'heure tardive, Chiyo eut envie de sortir marcher. Il lui semblait qu'elle étouffait depuis qu'ils avaient quitté la cérémonie.

Dehors, la nuit tokyoïte était chaude et l'on entendait les grenouilles coasser au bord du fleuve.

Sans surprise, ses pas l'amenèrent devant la porte de la salle.

Deux jours plus tôt, elle l'avait verrouillée après avoir affiché sur la porte la raison de la fermeture. Depuis elle n'y avait pas remis les pieds. Lorsqu'elle était partie, elle pensait que c'était la fin pour ce gymnase.

Elle posa la main sur la poignée.

Est-ce que c'est vraiment la fin ?

Le métal sous ses doigts conservait encore la trace de la chaleur de la journée. Il semblait presque en vie. Chiyo sentit son cœur se serrer. Le vieux n'aurait pas voulu ça. Il voulait que sa salle continue à exister.

Si c'est moi qui en hérite, avait dit son fils, je finirai par la vendre. Je n'ai ni le temps ni la passion nécessaire pour m'en occuper. La boxe, ça n'est pas tout simplement pas mon monde.

Oui, mais moi est-ce que je peux vraiment prendre la suite ? Se demanda Chiyo. Je suis qui pour croire que je peux marcher dans les pas d'un homme comme Yoshio Gojō ?

Bad boy [Wakasa x OC]Where stories live. Discover now