Sensitive Love II : Submersion

07. Point de Départ

AARON

Quatre ans auparavant,

Dans la voiture, il n'y a aucun bruit. Aucun son. Aucune musique. Tout est calme. Trop calme. Je déteste ce silence qui pèse sur ma propre conscience. J'ai juste envie de le briser, que quelqu'un – n'importe qui – le brise.

Je veux que mon frère à côté de moi mette fin à ce supplice en disant quelque chose. Qu'il m'avoue pourquoi il a fugué. Qu'il m'explique ce qui lui est arrivé. Je veux pouvoir comprendre ce qui a bien pu se passer pour qu'il se retrouve avec les mains en sang. Ne rien savoir, ça me ronge.

Mes veines brûlent d'impatience et de peur au fur et à mesure que les minutes s'écoulent.

Dans mon esprit, un million d'hypothèses se superposent, allant de la simple idée qu'il s'est battu à une image bien plus violente que je ne souhaite même pas visualiser. J'aimerais pouvoir me mettre à sa place, voir ce qui se trouve dans sa tête.

Depuis que je l'ai retrouvé dans la voiture avec Darragh, Wesley observe la route défiler avec un regard vide. S'il sonnait terrifié au téléphone, cette émotion a totalement disparu maintenant que je l'ai retrouvé.

C'est comme s'il était dénué de toute émotion depuis que la voiture a démarré.

Sans vouloir le précipiter, je cesse d'essayer de le sonder et me concentre sur la route pour le reste du trajet jusqu'à la résidence. En voyant le portail, mon cœur se met à s'agiter dans ma poitrine. Je recommence à paniquer parce que j'ai conscience que ce que Wesley a à m'annoncer n'a rien de bon.

Une fois qu'il le fera, il n'y aura tout simplement aucun retour en arrière envisageable. En tant que frères, on s'est toujours promis de rester soudés quoi qu'il arrive et c'est exactement ce que je compte faire. Il était là lorsque j'en avais besoin ; c'est à mon tour de prendre cette place de sauveur.

Dans notre famille, il n'y a rien de plus important que ce lien qui nous unit. Je ne compte plus le nombre de fois que mon père nous a répété de toujours se reposer l'un sur l'autre. On ne peut toujours que compter sur notre famille et c'est une leçon que j'ai rapidement comprise.

Lorsque la voiture s'arrête enfin, je me précipite d'ouvrir la portière tandis que mon frère reste immobile dans mon dos. Je jette un coup d'œil à Darragh, mais ce dernier est de marbre, ayant été entraîné pour ne rien dire ni ne rien laisser paraître. Avec toujours ce même silence qui pèse entre nous, je me tourne vers mon frère pour essayer de le faire parler.

Au même moment, il sort de la voiture, le regard baissé afin d'éviter tout contact visuel avec quoi que ce soit. Toujours sa capuche sur la tête et ses mains dans les poches, il se dirige vers la résidence, ce qui m'invite à me hâter pour le suivre afin de ne pas le perdre de vue. Dans l'état dans lequel il se trouve, je crains ce qu'il peut faire. J'ai peur.

Tout de suite, je peux m'attendre à n'importe quoi de sa part ; il est imprévisible. C'est bien ce pourquoi je m'inquiète autant pour lui : à tout moment, je pourrais le retrouver en train de faire quelque chose qu'il regretterait.

— Wesley ?

Lorsque nous atteignons le salon, j'ose enfin lui adresser la parole. De son côté, mon frère s'installe sur le canapé, la tête dans les mains et la jambe droite extériorisant toute sa nervosité à travers des gestes rapides et répétitifs.

— Ça... Ça va ?

J'ignore pourquoi cette question ne m'apparaît que maintenant. Ça aurait dû être la première question à lui poser, mais elle n'avait même pas traversé mon esprit. Quand Wes lève les yeux vers moi, ma respiration se coupe. J'ignore comment décrire ce que je perçois dans ses pupilles, cette froideur, cette peur, cette noirceur que j'y retrouve.