45. Les Retombées

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ALISON

Mes iris marron plongés dans le miroir, je lève les mains jusqu'à mon visage pour les déposer sur les poches noires qui se dessinent parfaitement sous mes yeux. La fatigue est flagrante et si j'aurais pu faire quelque chose pour y remédier, je n'en ai pas trouvé la force. Chaque jour est l'exacte même réplique du précédent : un peu moins douloureux que la veille. Le sommeil ne m'a pas trouvée ; il ne semble même plus faire l'effort de me chercher. Tout comme la faim. Elle aussi m'a abandonnée. Un par un, ils sont partis et m'ont laissée seul face à mon propre sort. Mon corps me laisse seule. Je ne le blâme pas parce que je sais que je n'ai jamais été aussi forte que je prétends l'être. Je n'ai jamais sur avoir la tête haute comme il le faut. À force d'essayer, je n'y arrive plus. Les efforts sont trop intenses pour que mon corps puisse suivre.

Cinq jours se sont écoulés depuis la tragédie. Trois longs et interminables jours durant lesquels je n'ai fait que sombrer un peu plus dans la douleur. J'ai mal. Je ne me suis jamais sentie aussi mal depuis quatre ans. C'est comme si on m'arrachait de nouveau mes organes. Et exactement comme avant, c'et ce sentiment d'impuissance qui prime. Il est plus fort, tellement plus ancré en moi. Il me montre à quel point je suis minable. Pathétique. Ce sentiment de n'être qu'un parasite dans la vie des autres devient de plus en plus réel à chaque battement de cœur. Je devrais partir de cette ville. Ne plus jamais revenir. Comme je l'ai fait avec Los Angeles, il ne me suffirait plus que de changer de vie. Recommencer depuis le début. Prendre un nouveau départ. Mais la douleur est toujours là. Elle me ronge de l'intérieur et ne veut plus me quitter. Imprimée dans mes veines, elle ne me quitte plus. Elle ne me quittera jamais.

Le souvenir de son visage me revient et mon cœur se comprime aussitôt. Je peine à me souvenir de la mélodie de son sourire et du son de sa voix. Ils se fondent un peu plus chaque fois que je plonge dans ma mémoire. Et je me déteste pour ça. Cameron est mort ; je ne veux pas l'oublier. Je ne veux pas oublier la personne qu'il était ni la personne qu'il aurait pu devenir. J'ai besoin de son souvenir, de me raccrocher à cette dernière chose qui me rattache à lui. Jamais plus je ne sentirai son odeur. Je ne pourrais plus l'entendre parler. Je n'aurais plus la chance d'assister à son sourire contagieux. Il était là, tout juste devant moi et je n'ai jamais pu lui dire ce qu'il représentait vraiment pour moi. Je n'ai pas eu la chance de lui dire à quel point il compte pour moi et à quel point il m'a aidé. Je n'ai pas pu lui dire au revoir et rien au monde ne me range plus que cette pensée.

J'entoure ma gorge d'une main pour calmer le nœud qui s'y est installé avant d'inspirer profondément. Je cligne plusieurs fois des yeux dans l'espoir de remettre mes idées en place avant de finalement retrouver le courage pour me retourner. Je prends une seconde inspiration.

Devant moi se dresse la chambre de Cameron. Quelque peu en désordre, je peux dire qu'il l'image exacte de son propriétaire. J'effectue un pas en direction de son bureau, passant la main sur ce dernier tout en fermant légèrement les yeux, comme si ce simple geste pouvait me reconnecter à lui. Mes doigts glissent sur toute la surface jusqu'à atteindre la chaise qui a été replacée contre le bureau. Je la tire et m'y assois, posant m'accoudant au meuble. Ma curiosité me pousse à fouiller dans les tiroirs qui se trouvent en dessous du meuble. Je commence par le premier et retrouve des cours. Son écriture recouvre la page, elle dessine chaque ligne qui la soulèvent. Ses notes sont si détailles que je me demande comment il a pu écrire sans perdre le rythme de ses profs. Je souris. Cameron a toujours été quelqu'un hors du commun.

J'entreprends d'ouvrir le deuxième tiroir, mais il bloque. Je pousse un soupir avant de réessayer, mais il ne cède toujours pas. À la troisième tentative, toutefois, il s'ouvre violemment, faisant éjecter tout ce qu'il contenait. La panique me prend de court. Je me jette par terre et m'empresse de tout rassembler dans un seul et même tas. Mon regard se met à observer un peu plus attentivement ce que je tiens entre mes mains tandis que je les ordonne. Des photos. Je regarde les autres, mais ce sont également des photos. Je fronce les sourcils. Cameron n'a jamais été un adepte de la technologie mais, apparemment, il a collectionné des photos. La première est une qui imprime le sourire de Leyla alors qu'elle est en train de raconter quelque chose. Je retrouve la carte et retrouve une date : elle a été prise le six mai. Je m'attarde sur d'autre photos qui ont tous le visage de sa copine, parfois avec son regard qui croise l'objectif.

Sensitive Love II : SubmersionМесто, где живут истории. Откройте их для себя