XVI- Sombre et amère réalité (réécrit)

534 60 56
                                    

Je me réveillai brusquement et retrouvai la sombre et amère réalité que j'avais momentanément quittée. Ma tête tournait et je pouvais entendre les battements de mon cœur affolé résonner dans mes oreilles alors que la sueur me collait à la peau. Je me sentais encore plus exténuée qu'avant ma sieste involontaire. Mon esprit tentait de se désengourdir pour mettre de l'ordre dans mes pensées chaotiques et confuses, avec difficulté. Finalement, lorsque mon pouls commença à ralentir et que je pris peu à peu conscience de mon environnement, ma mémoire refit surface.

Je me souvins de mes retrouvailles avec les deux garçons et du soulagement qui m'avait envahi, mais également de l'attaque de l'Inferno. Je me rappelai parfaitement m'être précipitée aveuglément auprès de Danaël blessé alors que Helder continuait de combattre seul la bête couverte de flammes. Puis après avoir mis ce dernier hors d'état de nuire, elle s'était précipitée sur moi. Je me revis brandir l'arme de Danaël et l'Inferno qui s'empalait dessus alors qu'une espèce de lumière blanche et crépitante sortait de moi pour désintégrer la créature. Comment avais-je fait ça ? Je baissai le les yeux sur mes mains pourtant intactes. Je pouvais presque toujours sentir le crépitement de cette magie étrangère dans le bout de mes doigts.

Cependant, une peur plus lancinante encore vint se rajouter à la liste quand l'image du torse lacéré de Danaël s'imposa à moi. Était-il mort ? Je tentai de me lever précipitamment du lit devant l'urgence de la situation, mais à peine avais-je posé pied à terre que le monde tourna autour de moi. Le cœur au bord des lèvres, je me ruai vers le pot de chambre vide posé près de l'armoire et vomis tout ce qu'il me restait dans l'estomac. Une fois vidée et certaine que je ne pouvais plus rien régurgiter, je m'essuyai les lèvres et m'adossai encore tremblante contre le bois de l'armoire ancienne. Je ne comprenais pas ce qu'il m'arrivait mais je me doutais que le rôle que j'avais joué pour vaincre cet Inferno dans la forêt devait en être pour quelque chose.

Je m'efforçai de faire cesser les tremblements de mes mains et pris une profonde inspiration pour chasser les pensées noires menaçant de m'engloutir toute entière. Rien ne disait que Danaël était mort, alors je ne pouvais pas l'affirmer. Il fallait que je garde espoir. La porte s'ouvrit soudain et Lydia réapparut. J'avais l'impression que sa dernière visite remontait à il y a des heures mais mon escapade onirique devait altérer mon horloge interne. Lorsqu'elle me vit par terre dans une position affaiblie, un sourire satisfait s'étira de part et d'autre de son visage.

- Il est l'heure de passer à table, princesse.

Elle avait dit ça comme si c'était moi qui allait faire office de dessert. Je fis un effort pour ne pas paraître plus pathétique que je ne l'étais déjà et me relevai pour la suivre sans discuter. Cette fois-ci, elle s'abstint de me tirer par le bras durant tout le chemin et je lui en fus reconnaissante. Je ne suis pas sûre que mon corps aurait supporté d'être à nouveau malmené de la sorte après l'épisode avec l'Inferno. Je la suivis dans un dédale de couloirs sombres illuminés ça et là de chandeliers aux flammes dansantes. Plus je faisais le tour de ce château, plus je l'avais en horreur. Néanmoins, je pris sur moi pour me concentrer sur le chemin que nous empruntions afin de le mémoriser et d'inspecter les portes devant lesquelles nous passions. Je ne devais pas oublier que mon but principal était de me sortir d'ici. Je me mis donc à guetter la moindre sortie.

Malheureusement pour moi, on aurait dit que Mendrac avait construit son château comme un labyrinthe afin que l'on s'y perde en tentant de trouver sa sortie. Je devais avouer que c'était ingénieux. Finalement, nous parvînmes devant les deux énormes portes à l'allure calcinée donnant sur la salle du trône que j'avais déjà pu longuement étudiées un peu plus tôt aujourd'hui. Je remarquai que nous étions arrivés par la gauche, c'est à dire par le chemin opposé à celui que nous avions emprunté en venant des cachots. Si je continuais tout droit, je pourrais sans doute retrouver l'endroit où j'avais été enfermée. Qui sait, peut-être que ce lieu infâme abritait également une échappatoire.

La Marcheuse de rêves - TOME 1Where stories live. Discover now