La Marcheuse de rêves - TOME 1

XXX- Retrouvailles (réécrit)

Il n'y avait pas de doute, la personne qui se tenait devant moi était bien ma mère biologique. Je n'avais beau l'avoir vu qu'une fois en rêve et une autre fois sur un tableau, j'étais certaine de ne pas me tromper. Ses yeux marrons en amande semblables aux miens me dévisageaient avec douceur et un sourire chaleureux illuminait son magnifique visage, entouré d'une chevelure châtain qui tombait en cascade le long de son dos. Elle ne parut pas surprise par ma présence, comme si elle m'attendait depuis tout ce temps. Un sentiment étrange s'empara alors de moi, la nostalgie d'une personne que je n'avais jamais connue qui me comprima la poitrine et instilla mille regrets. La femme debout en face de moi était celle qui m'avait mise au monde et s'était sacrifiée pour que j'échappe à Mendrac, et moi je restais clouée sur place, ne sachant quoi dire ou quoi faire.

C'est elle qui fit le premier pas. Elle s'approcha lentement et je vis ses yeux briller tandis que son sourire s'agrandissait. Elle était exactement la même que dans mon rêve qui me l'avait montré dix-sept ans plus tôt, pourtant, c'était comme si elle n'avait pas vieilli d'une seule journée. L'émotion me serra la gorge à la pensée de sa mort violente et prématurée qui nous avait privé l'une de l'autre. Alors qu'elle s'arrêtait à un mètre de moi, mon regard fut attiré par ce qu'elle tenait entre les mains : une clé. Celle-ci, attachée à une corde, me paraissait ancienne et portait des inscriptions gravées sur tout le long. D'un geste, elle la plaça autour de son cou et mon cerveau se mit à réfléchir à ses potentiels usages, mais Tatiana y mit brusquement un terme en prenant enfin la parole.

- Bonjour Elena.

Je reportai immédiatement mon attention sur elle et compris soudain que c'était elle qui m'avait sorti du Néant, où les Ténèbres me retenaient. C'était elle la reine déchue dont ce monstre avait parlé. Elle avait la même voix, sauf que son timbre fut chaud et empli de douceur lorsqu'elle s'adressa à nouveau à moi.

- Je suis tellement heureuse de te voir, continua-t-elle avec un sourire ému, tu as bien grandi depuis la dernière fois que je t'ai prise dans mes bras.

Ses paroles me touchèrent profondément. Même si je ne la connaissais pas et aimait ma mère adoptive de tout mon cœur, je ne pouvais nier la tristesse qui s'emparait de moi en dévisageant Tatiana, la femme qui aurait dû m'élever, la mère qui aurait tout fait pour moi et qui injustement, n'avait pas eu l'occasion de me voir grandir.

- Bonjour maman, dis-je en sentant une larme dévaler ma joue, preuve du bouleversement qui me submergeait et dont j'étais victime.

Je vis le même émoi traverser les prunelles de Tatiana puis elle écarta les bras, m'invitant à entrer et à nous permettre ainsi d'être enfin réunies. Je n'hésitai pas et la laissai me serrer contre elle. Je blottis mon visage dans son cou et me laissai enfin aller, me sentant en sécurité pour la première fois depuis longtemps. Par réflexe, j'inspirai une grande bouffée de son odeur présente dans ses cheveux et un sentiment étrangement familier m'envahit.

Une odeur.

Un visage.

Une berceuse.

Un collier.

Ces quelques souvenirs s'imprimèrent dans mon esprit tandis que Tatiana resserrait son étreinte avant de me relâcher pour de bon. En posant à nouveau mes yeux sur elle, je remarquai qu'elle avait laissé échapper quelques larmes mais elle me sourit néanmoins en les essuyant d'un geste.

- Allons marcher un peu, d'accord ? Proposa-t-elle et j'acquiesçai de la tête avant de saisir la main qu'elle me tendait.

Au moment où nos doigts se nouèrent de nouveaux brides de souvenirs me parvinrent des recoins de ma mémoire.