XXXIV- Un mot : culpabilité

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Helder ne pouvait pas rester une minute de plus dans cette pièce. Il étouffait et après s'être lavé et habillé plus rien ne le retenait dans cette foutue chambre qui criait le mauvais goût. Des fleurs et des sièges de velours, sérieusement ? Il en avait sa claque de cette chambre, il en avait sa claque de ce Palais de malheur, il en avait sa claque d'avoir échoué une fois de plus dans sa mission et de n'avoir rien pu faire pour sauver Elena.

Une fois de plus, sa colère monta et il ressentit une immense envie de la laisser sortir. Il passa pour la cent millième fois sa main dans ses cheveux et essaya de se calmer en inspirant et expirant bruyamment. Il devait sortir d'ici.

Sans plus attendre Helder se précipita vers la porte et l'ouvrit brusquement avant de se diriger dans un endroit où il pourrait remettre au calme ses idées et où il pourrait extérioriser sa colère et sa peine. Car oui, il ne le montrait peut-être pas, mais chaque fois qu'il posait le regard sur le corps d'Elena entreposé dans ce foutu cercueil, il sentait son cœur se serrer et le chagrin menacer de l'engloutir. Sauf qu'au lieu de le laisser faire, il transformait ce chagrin en colère et essayait ensuite de l'extérioriser. C'était moins douloureux. Plus facile à surmonter. Mais pas toujours...

Sans s'en rendre compte, ses pas le menèrent jusque devant la porte de la Grande Salle où était entreposée Elena. Pourquoi est-ce qu'il était venu jusqu'ici ? Est-ce que revoir son visage pâle et figé allait le faire aller mieux ? Non ! Alors pourquoi se faire souffrir de la sorte ? Bon il devait garder son calme. Il s'apprêtait finalement à tourner les talons et à s'en aller loin d'ici, lorsqu'il sentit quelque chose l'attirer dans cette pièce. Il n'aurait su comment l'expliquer mais... quelque chose le poussait à se retourner et à entrer là dedans. Il devait perdre la raison, c'était du n'importe quoi. Mais il observa néanmoins la porte avec un attention, son sang battant plus fort dans ses tempes tandis qu'un fourmillement se propageait dans sa poitrine. Avec un soupir, il se décida finalement à entrer.

C'était une grande salle en longueur qui se séparait en deux par une sorte de chemin menant au cercueil, avec de chaque côté des sièges, un peu comme dans une église. Elle servait de salle du trône pour la reine et le roi ou de salle pour la Cérémonie lorsqu'un des membres de la famille royale décédait. Elle était très lumineuse grâce à toutes les fenêtres qui laissaient passer de larges rayons de lumière afin d'éclairer la pièce. Pour les Marcheurs de rêves, la lumière était très importante. Elle symbolisait la purification et le bien, tout ce pourquoi ils se battaient. Mais le noir était aussi présent sur les bougies et les reliures pour rappeler que l'un ne va jamais sans l'autre. C'était même la devise des Marcheurs de rêves, et de tout le monde ici : « Pour éclairer, il faut de l'obscurité. » C'était un peu niais selon Helder mais je ce n'était pas lui qui décidait.

Il repéra le cercueil et se dirigea vers lui en jetant des coups d'œil un peu partout. Il n'était pas censé être ici. Pas avant la cérémonie et il le savait. Mais Helder n'était pas du genre à suivre les règlements. Et puis maintenant qu'il y était, autant ne pas s'arrêter là.

Il monta les quelques marches de l'estrade puis m'arrêta devant le corps d'Elena tout en continuant de garder les yeux rivés en face de lui. Il ne voulait pas la regarder dans cet état. Il ne voulait pas faire comme Danaël et se noyer dans le chagrin en la voyant dans ce putain de cercueil de verre. Il voulait garder en lui le souvenir de ce qu'elle était avant : son sourire qu'il réussissait à lui arracher grâce à mon humour à deux balles, ses levés de sourcils dès qu'il disait une bêtise et surtout, le simple fait de la voir vivre.

Helder prit une grande inspiration et tourna enfin le regard sur elle. On aurait dit Blanche-neige allongée dans son cercueil de verre, vêtue d'une robe blanche, le teint très pâle et les yeux fermés, ses cheveux reposants des deux côtés de son visage à l'allure serein. Si elle avait été vivante il se serait moqué d'elle et l'aurait appelé « princesse » puis elle l'aurait sans doute envoyé balader en riant néanmoins. Mais elle ne l'était pas. Plus.

La Marcheuse de rêves - TOME 1Donde viven las historias. Descúbrelo ahora