Chapitre 3: Et j'aimais maman

292 20 0
                                    

 Mon petit frère et moi étions en train de jouer à lancer des cailloux dans la rivière, lorsque nous avons entendu un cri, puis des grognements. Du village, s'est élevé tout un tas de bruits que l'on entendait seulement dans les films que maman regardait. Mon petit frère s'est transformé en ourson à lunettes, et nous avons couru en direction du village. Puis nous nous sommes figées.

Il y avait tout un tas d'animaux qui se battaient, des cris dans tous les sens, des coups à tout va. Un élan tentait d'échapper aux griffes d'un guépard. Deux loups se battaient sauvagement en duel. Un boeuf musqué se retrouvait entouré par plusieurs hyènes tachetées. Un gypaète barbu ne cessait de piquer sur un coyote qui se débattait de l'emprise d'un python royal.

Puis un immense lion est sorti de la grande maison de Père. Il avait une cicatrice sur l'oeil comme Scar dans le roi lion, sauf que lui, était grand et fort. Il a rugi férocement, et s'est jeté sur un lycaon et l'a envoyé contre un arbre, avant de venir en aide au Clan. L'ambiance était assourdissante et aveuglante. Mon petit frère a poussé un petit gémissement et m'a attrapé par la manche pour m'emmener derrière un gros rocher sur lequel nous aimions bien jouer. Tout avait dérapé, tout le monde se battait. Certains gagnaient, certains perdaient.

Rapidement, il y eut beaucoup de corps humains, tous à la peau arrachée d'où dégoulinait du sang. Mon frère avait repris forme humaine et s'était mis à pleurer. Je l'avais pris dans mes bras. Maman nous avait un jour dit qu'un câlin pouvait guérir tous les maux. J'aimais maman, mais je ne la voyais pas dans le combat, il n'y avait pas d'ours à lunettes ressemblant à maman. Maman était donc en sécurité...

L'immense lion a donné un puissant coup de patte au jaguar, et celui-ci est tombé à terre en retrouvant sa forme humaine. Les quelques oiseaux qui restaient s'envolèrent, les grands carnivores partirent en boitant, et un serpent se faufila sur le sol feuillu. Il n'y avait plus de bruit, plus de coups, plus de grognements, juste du sang et des cadavres sanguinolents. Une odeur de métal flottait dans l'air. Mais Père était vivant, il reprenait forme humaine, pressant son bras qui saignait. Et maman était en sécurité. Les blessés s'aidèrent, les intrus agonisants furent tués.

Soudain, quelqu'un cria. C'était Marraine, elle sortait de derrière la maison de Père, les mains recouvertes de sang. Elle s'effondra aux pieds de Père, versant toutes les larmes de son corps. Père baissa son regard sur elle, et Marraine s'accrocha désespérément au bras blessé de Père. J'aimais Père, je ne voulais pas le voir blessé. J'aimais Marraine, je ne voulais pas la voir pleurer.

- Jeff, c'est terrible ! C'est... C'est ma soeur, Yasmine ! Elle... Elle a été tuée !

Puis Marraine, en pleure, s'effondra au sol. Je ne comprenais pas toujours tout au discours des adultes, mais ça, je l'avais compris. Maman nous l'avait expliqué une fois, devant la télé. J'aimais maman... Maman ne nous ferait plus de câlins, maman ne nous ferait plus de bisous, maman ne nous ferait plus à manger, maman ne nous sourirait plus, maman ne nous emmenait plus à la rivière. Maman n'était plus là. J'aimais maman, tout le monde aimait maman.

- Tu t'occuperas de ses enfants, Aya.

Puis Père est rentré dans sa grande maison. Marraine pleurait toujours autant que ses mains étaient couvertes de sang. Les cadavres se faisaient ramasser par les blessés. Et dans un coin, près du feu éteint, se tenait Zack. Zack s'est accroupi près d'un corps à la gorge tranchée, mais dont la poitrine se soulevait toujours. Zack a souri et de sa main, a couvert la bouche de la personne. Elle a gesticulé, puis s'est arrêtée. Zack a croisé mon regard et m'a souri. Je n'ai jamais aimé ni son sourire ni son regard. Mais j'aimais Père, et Père aimait Zack. Marraine aussi aimait Zack. Tout comme j'aimais maman et petit frère, j'aimais Père, et j'aimais Marraine. Alors j'aimais Zack.

Sans PrétentionOnde histórias criam vida. Descubra agora