Chapitre 14: Gamine

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Après plusieurs minutes à marcher entre de grands arbres et à longer le cours d'eau, nous finissons par arriver face à un très joli village fait de chalets modernes en bois dont certains encerclent un beau lac. Quelques personnes se promènent sereinement dans le camp, parlant joyeusement et rigolant de bon coeur.

Lorsque nous traversons le village, ses occupants adressent à cet Evan un regard solennel et empli de fierté. Puis ils me regardent avec curiosité, épluchant une à une mes blessures. Et ce, jusqu'à ce que nous arrivions devant un grand et splendide chalet en bois se trouvant en bordure du lac. Une petite jeune femme en sort à grand coup de porte et dévale les marches du perron pour se précipiter vers nous. Elle s'arrête net devant moi, les mains dans les poches, et m'étudie minutieusement. Discrètement, j'en fais de même pour elle. Jamais je n'ai vu quelqu'un coiffé et habillé ainsi. Ses cheveux sont rasés sur le côté de son crâne, tandis que de belles mèches acajou basculent de l'autre côté et retombent en dessous de ses oreilles. Cette femme a beau être petite, elle ne semble pas être la personne à qui on aimerait se confronter. Son tempérament d'acier vibre tout autour d'elle telle une aura combative, se manifestant à travers ses grosses rangers, son blouson en cuir, son jean déchiré, ou encore tous ses bijoux. En effet, un anneau perce le haut de son oreille et plusieurs bagues en argent de différentes formes décorent ses doigts, dont l'une d'entre elles est ornée d'une pierre précieuse bleue. J'aperçois aussi le début d'un tatouage dans son cou.

La femme rapproche son visage du mien pour dévisager mes blessures, puis passe sa langue sur ses dents avant de la faire claquer et vivement redresser son buste.

- D'où tu viens, gamine ?

Je ne parviens pas à lui répondre, bien trop intimidée par sa prestance. Elle sort donc une main de sa poche, puis dévoile le pendentif caché par mon t-shirt.

- Rubis.

Un sifflement s'échappe d'entre ses dents et les traits de son visage se durcissent.

- Ces chacals.

J'avoue être perdue... Mon Clan n'a rien d'horrible, il est aussi respectable que les autres.

- Tu connais ce Clan, Gaëlle ? demanda Monsieur Distant avec interêt.

- Ma soeur en a fait partie à un moment.

- Ta soeur n'est-elle pas—

- Morte, ouais, répondit Miss Bizarre en interrompant le blond. C'est d'ailleurs dans le Clan Rubis qu'elle a passé ses dernières heures. Enfin... dans ce Clan... Ils l'ont chassé à mort, dit-elle pince-sans-rire.

Aux paroles de cette étrange jeune femme, je fronce les sourcils. Jamais maman, Marraine, Père, ou Zack nous en a parlé. Et jamais je n'ai vu de telles pratiques. Toutefois, maman nous a toujours dit que le Clan est notre famille, et nous devons défendre notre famille. Je cesse donc de rentrer ma tête dans mes épaules et affronte la femme aux propos absurdes.

- Je pense que vous vous trompez de Clan, jamais le mien n'a eu recours à de telles manières.

- Ohhh, gamine... c'est que tu n'as pas vu les coulisses de ton Clan.

- Vous n'en faites même pas partie, comme pouvez-vous affirmer de telles absurdités ?

- Regarde-toi, tu obtiendras ta réponse.

Instinctivement, je porte ma main à mon visage qui me pique aussitôt à ce contact, et la descends dans mon cou où je sens de petites perforations encore douloureuses.

- Je maintiens mes propos, vous ne savez rien.

- Ah non ? Qui t'a fait ces marques alors ?

Je baisse la tête, aucune réponse ne parvient à franchir mes lèvres. L'étrange jeune femme soupire et tourne les talons pour remonter les marches du perron. Cependant, elle s'arrête en mi-chemin et se retourne une dernière fois vers moi, l'air grave.

- Tu connais la réponse, donc si je peux te donner un conseil: quitte ton Clan, gamine.

Puis elle finit de gravir les marches restantes et entre dans le grand chalet. Une main se pose soudainement sur mon épaule et me fait sursauter. Je tourne brusquement la tête pour apercevoir le grand blond: Gabin.

- Ne te tracasses pas trop pour ce qu'a dit Gaëlle. Aucun Clan n'est mauvais, ils sont juste différents. Rassures-toi, me dit-il avec un grand sourire, tu vas pouvoir rentrer chez toi demain après une bonne nuit de repos.

Sur ce, Gabin me guide à travers le village après qu'Evan et Roxanne nous aient quittés devant le grand chalet.

Nous nous avançons sur le porche d'un chalet, et Gabin sort une clef de sa poche pour en déverrouiller la serrure.

- Bienvenu chez moi !

Il ouvre la porte et dévoile un sublime intérieur composé d'un feu de chemin, de tables en bois brut, et de canapés en cuir sur lesquelles reposent coussins et plaids. Il y a aussi une jolie cuisine américaine et une immense baie vitrée donnant sur le lac à deux pas.

-De manière générale nous n'aimons pas trop inviter des gens chez nous, mais la situation est exceptionnelle. Comprends qu'on ne peut pas te laisser un chalet pour toi toute seule, question de sécurité. Oh ne le prends pas personnellement, mais c'est notre Alpha qui préfère être prévoyant. Alors c'est moi qui t'accueille. Suis-moi, je vais te montrer ta chambre.

Je le suis à travers le salon, puis nous montons un escalier en bois avant qu'il m'ouvre une porte donnant sur une très belle chambre. Un lit king size, une télé au mur, un bureau en bois, un petit balcon, et même quelques fauteuils couverts de coussins et de plaids, exactement comme ceux du salon.

- Fais comme chez toi. Ah, et tu as une salle de bain juste là.

Il m'indique une porte à côté du lit.

- Merci beaucoup...

 Aucun souci. Si tu as le moindre problème, tu m'appelles. Je dors juste à côté. Je me lève assez tôt normalement, donc je serais surement réveillé avant toi. N'hésite pas à descendre pour prendre ton petit déjeuner. D'ailleurs si tu as faim ce soir j'ai quelques trucs dans le frigo.

- Je... C'est gentil, mais ça va pour l'instant...

Bien évidemment, c'est un mensonge. Mais je ne veux pas abuser de leur hospitalité, bien que ma virée aquatique m'ait complètement affamée. Je mangerai demain matin, pour l'heure, j'ai surtout besoin de me reposer.

-  Comme tu veux. Oh j'allais oublier, mais il doit y avoir des habits dans les étagères, tu peux les emprunter sans problème. Sur ce, bonne nuit, Elisabeth !

Il m'adresse un grand sourire qui fait ressortir ses fossettes.

- Vous... Vous aussi...

Puis il repart et me laisse découvrir ma chambre, ainsi que la salle de bain. J'ouvre le tiroir d'une belle armoire en bois et y trouve quelque chose à me mettre pour la nuit: un jogging et un t-shirt. Le pyjama sur le bras, je pars prendre une douche chaude. J'en profite pour nettoyer mes plaies. Mais... lorsque je sors de la douche, je vois mon visage griffé dans le miroir. Trois griffures entaillent mon visage de la tempe à la lèvre en passant par mon oeil enflé. Heureusement, les blessures ont déjà commencé à cicatriser. Toutefois, ne pas manger n'aide pas à la cicatrisation, mais je m'en passerai pour une fois. Mon regard est ensuite attiré sur mon cou, et en l'exposant, je remarque quatre perforations profondes dans ma peau, deux de chaque côté. Non, c'était un accident. Je prends une profonde inspiration et me glisse sous les couvertures. Demain je retourne chez moi, j'y retrouverai mon petit frère, Marraine, Père, et Zack. J'ai déjà hâte de tous les revoir, ils me manquent terriblement, mon Clan me manque.

Sans PrétentionWhere stories live. Discover now