Partie IV - Chapitre 26

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Chapitre 26

Sirius laissa tomber la lettre de Lily sur la table basse de son petit appartement et se laissa aller contre les coussins avec un profond soupir. « Il me semble incroyable que Dumbledore ait jamais pu être ami avec Gellert Grindelwald ! », avait écrit Lily à la fin de sa lettre. Il ne savait trop que penser de cette information, qui était nouvelle pour lui. Bathilda leur avait raconté beaucoup d'histoires, mais jamais celle-là. Peut-être avait-elle jugé préférable de ne pas ternir la réputation de Dumbledore tant qu'il était leur directeur d'école. Lily terminait sa lettre en estimant que Bathilda avait un peu perdu la tête : ceci était loin d'être une nouvelle. A son sens, elle avait toujours été folle. Sinon, elle ne serait pas un génie.

Ses pensées dérivèrent bien vite d'un mage noir à un autre. Grindelwald était le cadet de ses soucis. Seul Voldemort occupait ses pensées. Ces derniers temps, il n'avait pas eu une minute pour lui. Il avait reçu la lettre de Lily près de trois jours plus tôt mais il n'avait pas eu le temps de la lire : il était à peine rentré chez lui qu'on l'avait appelé pour une nouvelle mission. Pour cette raison, il n'était pas repassé chez les Potter depuis le 31 juillet.

Il ignorait quelle mouche avait soudain piqué les Mangemorts, mais ils harcelaient l'Ordre sans relâche depuis le début du mois d'août. Sirius avait souvent passé des jours et des jours sans voir l'ombre d'un Mangemort, s'était occupé de missions de surveillance et de prévention. Au contraire, ces derniers temps, les Mangemorts semblaient chercher le contact, ils passaient à l'attaque frontale sans aucune crainte. Emmeline Vance avait dû quitter son appartement après avoir été suivie et logeait à présent dans le minuscule studio de Benjy. Frank Londubat avait été attaqué en pleine rue alors qu'il rentrait de ses courses, des paquets de couches sous le bras. Sirius avait la terrible impression, depuis la mort des McKinnon, que plus personne n'était à l'abri.

Cet événement apparaissait comme le déclencheur de la vague d'attaques que l'Ordre subissait. Ce coup d'éclat les avait enhardis. Il avait aussi rendu fous de rage les membres de l'Ordre, qui adoraient tous Marlène – on ne pouvait faire autrement. D'après les renseignements collectés par les hommes de Maugrey, Travers aurait mené l'attaque contre la maison des McKinnon. Gideon et Fabian avaient juré de se venger. Sirius avait fait une mission avec Fabian, et même lui avait été terrifié. Il avait lu dans les yeux de Prewett qu'il n'aurait pas de repos tant que justice n'aurait pas été accomplie. Travers avait de quoi s'inquiéter.

Il était à présent trois heures du matin, et Sirius avait l'esprit complètement vide. Il n'avait pas dormi depuis plus de vingt-quatre heures, et pourtant le sommeil ne le gagnait pas. Dès qu'il fermait les yeux, des images des derniers jours venaient le hanter. Il avait dû faire face à une attaque en pleine rue, à Bath. La ville était bondée de touristes. Il revoyait les Moldus en sang, leurs yeux révulsés par la mort, les sortilèges qui filaient dans tous les sens. Les Mangemorts aimaient tuer dans des gerbes de sang plutôt que dans la propreté d'un sortilège impardonnable. Sirius ignorait si c'était dû à de la cruauté ou à un manque de puissance magique. Tous ces morts, simplement pour l'atteindre, lui. Il avait entendu un Mangemort crier son positionnement. D'après ce que lui avait dit Gideon, il n'était pas le seul à avoir vécu une telle situation. Les Aurors étaient également concernés. Les Mangemorts cherchaient à purger le Ministère de sa force de frappe. Bientôt, il n'y aurait plus que la Brigade magique pour défendre le pays. Sirius ne dénigrait pas leur mérite, mais ils n'étaient pas taillés pour faire face aux Mangemorts.

Le jeune homme se redressa avec un grognement et se traîna finalement jusqu'à son lit. Il ne savait pas combien de temps il allait pouvoir tenir à ce rythme. A sa fatigue s'ajoutaient ses préoccupations pour les Potter, ainsi que pour Peter. Il était la clef de la sécurité des premiers. Ne ferait-il pas mieux de se mettre à l'abri, de cesser les missions ? Moins il était exposé, mieux ce serait. Tout en se laissant tomber dans son lit, Sirius se promit de lui en parler la prochaine fois qu'il le verrait. A une autre époque, il aurait sans doute demandé conseil à Remus sur le sujet. Seulement, il ne l'avait pas vu depuis une éternité – n'avait pas cherché à le voir. Il était à peu près certain qu'il n'était pas non plus passé à Godric's Hollow depuis près d'un mois. La dernière pensée consciente de Sirius fut pour cet ami qu'il était en train de perdre, cet ami pour qui les Maraudeurs avaient tout risqué. Il trouvait Remus ingrat : il s'éloignait d'eux, et peut-être, peut-être que... Mais non, il n'était pas encore prêt à formuler cette pensée. Il n'avait pas assez de preuves, seulement des soupçons.

Lily et James [corrigée]Where stories live. Discover now