Chapitre 67 - Jack

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Mes pensées se ressemblaient, toutes. Tristes, sombres et amers.

Deux mois. Deux mois que je ne dormais plus, ne souriais plus. L'appétit m'avait quitté. L'oxygène me manquait. Tout s'était envolé avec elle. Le meilleur de moi s'était évaporé. Et pourtant, depuis cette froide soirée de janvier, je continuais de jouer ce jeu malsain. Celui de me persuader que son absence ne m'était pas intolérable, que je n'avais pas besoin de me perdre dans l'odeur de son parfum pour trouver la force de respirer. C'en était devenu pathétique. J'étais devenu pathétique.

Ses effets personnels étaient tous à leur place. Je n'avais pas eu le courage de les lui retourner. Ils attendaient son retour.

Mensonge.

C'était moi qui l'attendait. Encore moi qui espérais qu'elle me rattrape. Mais après deux mois, aussi sinistre qu'elle l'était, la vérité me frappa enfin. Ashley ne m'appartenait plus. Nos vies n'étaient plus liées.

 Pour ne pas perdre l'esprit, chaque matin, en entrant dans mon dressing, je m'efforçais de détourner le regard afin de ne pas m'égarer dans la vision de ses tenues. Mais chaque soir, en rentrant du restaurant, je capitulai. Assis à même la moquette, le dos appuyé contre le miroir séparant nos penderies respectives, j'empoignai un vêtement au hasard et y plongeai mon visage. Son odeur, son essence imprégnaient chaque fibre de tissu. C'était l'un des ponts qui me ramenait auprès d'elle et qui maintenait son aura entre les murs de mon appartement. Voilà pourquoi maintenant, il n'était plus qu'un lieu dévasté où mon âme errante ne trouvait plus le repos. Mon enfer sur Terre. Pour y échapper, je rallongeais mes journées de travail. Seulement, le prince des enfers n'était pas homme à m'accorder un instant de paix. Il étendait mon calvaire bien au-delà de la sphère de mon appartement. Dès que mes paupières s'alourdissaient, mes songes m'emportaient vers elle pour me faire revivre notre amour. Dans cette illusion diabolique, j'étais à nouveau la source de ses éclats de rire. Je retrouvais la saveur de ses lèvres ainsi que la chaleur enveloppante de ses yeux verts. Sa voix d'ange déversait sur ma peau des frissons lorsqu'inlassablement elle répétait combien elle m'aimait. Puis pour me punir, avant que je ne puisse lui répondre, elle s'évanouissait transformant mes larmes en une multitude de lames crantées. Chaque nuit, ce cauchemar me hantait, me poussant à me réveiller dans des draps trempés de sueur. Et alors la douleur était telle, son absence devenait si suffocante que dans un rugissement, je me frappais la tête pour essayer de la chasser.

Mais en vain.

Le cycle reprenait encore et encore.

En dehors de l'appartement, je n'exprimais pas ma souffrance. Faire bonne figure était mon artifice pour couper court à toute forme de compassion. Dommage que ma famille ne l'entendait ainsi. Tous m'inondaient de textos, d'appels et de visites impromptues. Même ma belle-soeur, Camille, habituellement si discrète, s'y était mis. Seulement, leur bienveillance me rappelait davantage la perte qui m'accablait. S'en était insupportable. Alors, je préférais les ignorer. En toute sincérité, il n'y avait qu'elle que je désirai revoir. Il n'y avait qu'elle dont je souhaitais que les messages et les appels saturent mon téléphone. Combien de fois avais-je espéré découvrir son prénom en déverrouillant l'écran de mon portable? Un bien trop grand nombre.

L'espoir, quel foutaise.

Il n'avait cessé de m'habiter dès l'instant où elle avait franchi le seuil de la porte. Une perte de temps. De rage d'un revers de main, j'envoyai valser le vase de la table à manger. Entre elle et moi, je ne savais pas qui je détestais le plus? Elle pour ne pas s'être battue. Elle ne s'était pas retournée. Elle n'était pas revenue sur ses pas. Moi pour avoir été si inflexible. Ce soir-là, ma désillusion était telle que renoncer à elle m'avait paru moins douloureux. Voir notre avenir se volatiliser. Le foyer que je brûlais de construire, les enfants que je rêvais de bercer, les soirées pelotonnées sur le canapé. En une fraction, Ashley m'avait arraché à tout cela. Comment avait-elle pu? Elle disait m'aimer, et pourtant elle avait tourné le dos à toutes ses promesses.

Notre valse en trois temps - tome 2 - Et siNơi câu chuyện tồn tại. Hãy khám phá bây giờ