Chapitre 68 - Ashley

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Du plat de la main, j'appuyai fortement sur mon sternum. Cette oppression dans la poitrine était dorénavant mon quotidien. Sans vergogne, mon coeur, cet organe que je pensais dompter, me faisait payer le prix de la perte de Jack. Dès que son souvenir me hantait, ce qui ne se produisait un nombre incalculable de fois par jour, j'éprouvais cet élancement douloureux. Allongée, je me redressai et m'assis en tailleur sur le lit king size de ma chambre d'hôtel. La bouche fermée, une main posée sur le ventre, l'autre toujours sur ma poitrine, j'inspirai amplement, doucement. Consciemment, je laissai l'air emplir mon ventre, ma poitrine et pour finir mon buste. Puis, je l'expirai longuement en empruntant le chemin inverse. Après cinq répétitions, mon pouls reprit un rythme quasi-normal.

C'était l'été. La nuit avait apporté son manteau sombre. D'ici peu, je saurai si je devrais dire adieu à cette part de ma vie. La seule qui me rendait pleinement heureuse. Nous étions vendredi. S'il n'avait pas changé ses horaires de travail, il serait bientôt de retour à son appartement. Un vent de panique déferla soudainement sur moi, m'obligeant à ramener mes genoux contre ma poitrine et à les encercler à l'aide de mes bras. Et si ce soir, il avait décidé de prendre un verre dans un bar branché. S'il recevait des amis. S'il était parti en vacances. Ou pire si une autre femme réchauffait son lit. Mon pouls repartit de plus belle.

Quelle folie m'avait conduite ici?

Appeler Catherine me traversa l'esprit. Elle seule savait. Ni Claire, ni Hurl n'avait connaissance de mon escapade. Et en l'état actuel des choses, mieux valait qu'ils n'en sachent rien. Leur déception avait été bien trop grande après ma rupture avec Jack. Quant à leurs mots, ils avaient été bien trop blessants. Les laisser dans l'ignorance était donc la meilleure option. Ça nous préservait tous les trois d'une énième discussion houleuse.

Ce fut sur la route en direction de l'aéroport que je prévins Catherine.

— Tu as raison, avais-je avoué avant même de lui dire bonjour. Je ne suis pas heureuse. Je pars réparer ma bêtise.

Cette confession matinale aurait pu s'expliquer par un manque de sommeil. Après tout, je sortais d'une garde de vingt-six heures, mais quatre jours avant, pendant que Catherine et moi dinions tranquillement à la maison, elle m'avait questionnée. Son absence te pèse-t-elle encore? Une question somme toute banale, et pourtant juste avant d'apporter ma réponse, ma voix avait défailli. En mettant un terme à notre relation, Jack avait renoncé à nous. Je l'avais supplié de ne pas me quitter, mais en vain. Pour surpasser ma peine, mon orgueil avait détruit toute volonté de me battre pour notre histoire. Pour minimiser chaque touche de bonheur qu'il avait tatoué sur ma peau, je m'étais volontairement enfoncée dans le déni. Dès que mon coeur se pinçait à son souvenir, je lui répétai sèchement que Jack n'était rien, à l'exception d'une erreur. Il n'était pas la variable manquante à l'équation pour que j'atteigne le bonheur. Alors que mon travail, l'hôpital, mes patients, oui.

Un mensonge que Catherine avait dévoilé par une simple question.

J'étais malheureuse. Jack était une empreinte indélébile que je ne parviendrai jamais à effacer. Et en vérité, je ne désirai pas y parvenir. J'étais marquée au fer rouge. Il faisait parti de moi. Il était mon tout. Mon unique. Éprise par l'urgence de le lui dire, j'allai dans la salle de bain. Après une douche froide pour rendre la chaleur de cette soirée plus supportable, et un maquillage discret pour cacher mes nuits blanches, j'optai pour une robe longue kaki, boutonnée sur tout le devant. Nos initiales liées dans un alliage d'or et de diamants attiraient le regard sur mon décolleté. En voyant mon pendentif qui jamais ne m'avait quittée, j'espérai lui rappeler notre lien unique. Mes cheveux lâchés, à l'aide de mes doigts, je détendis mes boucles. Après un dernier coup d'oeil dans le miroir XXL de l'armoire, je claquai la porte de ma chambre. L'hôtel n'étant qu'à cinq rues de son immeuble, je renonçai à prendre un taxi. À mon étonnement, les trottoirs bondés où savoir jouer des coudes était essentiel pour se faufiler dans cette marée humaine où les touristes se mêlaient aux habitants des hautes tours, m'avaient manqué. Je me déplaçai avec le sentiment étrange d'être de retour à la maison. Comme après une longue période à l'étranger.

Notre valse en trois temps - tome 2 - Et siOù les histoires vivent. Découvrez maintenant