P4 / Chapitre 9

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Margot découvrait l'avantage certain pour des sœurs de sortir avec des frères. Ils étaient si complices tous les deux et tous les quatre, qu'ils faisaient la plus grande partie de la conversation. Leur père s'entendait bien avec les garçons, ils avaient le même sens de l'humour taquin et même leur mère arrivait à rejoindre leurs plaisanteries. Vers la fin du repas, Margot ressentit le besoin de détacher les boutons de son short en jean pour faire de la place à son ventre plein. Elle essayait de le faire discrètement pour éviter une remarque de sa mère mais en forçant pour ouvrir un bouton, elle ripa et se cogna durement la main dans le bord de la table, secouant toute la vaisselle posée dessus.


- Merde, pardon ! dit-elle en rattrapant son verre de justesse.

- Tu saignes, la prévint Fanny en voyant son ongle cassé.


Margot se leva calmement, une main sur son bouton de short ouvert, et alla à la cuisine pour rincer son doigt. Elle s'était juste cassé un ongle mais un peut trop loin du bord. Elle se mit à chercher des ciseaux dans les tiroirs pour couper ce qui dépassait avant d'entendre la porte s'ouvrir sur Florian armé d'une boîte à pharmacie.


- Ta mère m'envoie m'occuper de toi, dit-il en s'approchant d'elle.

- C'est rien, juste l'ongle...

- Doit y avoir des ciseaux là-dedans, se mit-il à chercher dans la boîte.


Il sortit une petite paire de ciseaux qu'il tendit à Margot qui s'empressa de couper son ongle à ras au dessus de l'évier. Elle trouva un pansement qui la fit sourire, rose avec des fraises dessus, et l'enroula autour de son ongle pour le protéger.


- A-do-rable, jugea Florian qui la regardait faire.

- Tout ça pour ouvrir mon short parce que j'ai trop mangé, dit-elle.

- Quoi, un peu de tenue, fit-il en attrapant les bords de son short pour le refermer.


Margot se débattit jusqu'à se retrouver dos à lui en riant fort et protégeant son ventre. Et quand elle sentit que le jeu se transformait plus en câlin, elle se redressa, essoufflée, et posa sa tête contre son épaule. Il appuyait sa joue contre sa tête en la gardant contre lui, oubliant presque où ils étaient.


- Cette journée n'aurait pas été pareille sans toi, dit-elle soudain.

- Ça se passe plutôt bien, non ?

- C'est ce que je dis, c'est parce que tu es là.

- Elle te regarde beaucoup, on dirait qu'elle a envie de te parler.

- On ne sait pas faire...on a envie mais on ne sait pas...


Il la serra plus fort et n'insista pas. Elle n'attendait pas de lui qu'il en dise plus, il le savait. Florian devinait qu'il devait juste être là pour elle. Être là n'impliquait pas toujours d'avoir les mots, de savoir quoi faire. Sentir qu'on est pas seul face à une situation et souvent tout ce qu'il nous faut.

Ils savouraient ce petit instant volé pour être seuls quand la porte de la cuisine s'ouvrit timidement. Margot s'éloigna de Florian en voyant sa mère passer la tête dans l'ouverture pour vérifier si elle pouvait entrer.


- Désolée, je viens voir si tu vas bien ?

- Oh, oui c'est rien, elle montra son doigt pansé. Juste un ongle cassé.

- D'accord, lança sa mère en s'apprêtant à repartir.

- Merci, lança Margot un peu mal à l'aise. Merci de t'en soucier.


C'était idiot, évidemment qu'elle s'en soucier, se dit Margot. Mais elle avait essayé d'être douce...


- Tu vois, dit-elle à Florian alors que sa mère était ressortie. Merci de t'en soucier, n'importe quoi.

- Et bien elle s'est souciée de toi et c'était gentil, alors merci de t'en soucier, ça colle non ?


Elle le fixa en retenant son sourire.


- Quoi ?

- Un jour ça va m'agacer, gentiment hein, mais sûrement, dit-elle en se dirigeant vers la porte.

- Quoi ? De quoi tu parles ?

- La perfection, je parle de perfection monsieur parfait, elle engloba toute sa personne d'un geste de la main avant de secouer la tête en souriant toujours plus.

- Je ne suis pas parfait, arrête.


Il la retint dans la cuisine pour la taquiner encore en adorant la voir si détendue chez ses parents. Quand il en avait parlé avec son frère, il lui avait dit qu'elle était toujours un peu différente chez eux, plus fermée et sur la défensive. Aujourd'hui elle semblait complètement elle-même, ça le rendait heureux.


...


Les filles s'étaient retrouvées dans la cuisine avec leur père pour remplir des tupperwares avec les restes du repas et les mettre au frigo. Ils entendaient le murmure des conversations que leur mère avait avec les garçons et même leurs rires. Fanny remarqua que sa sœur les écoutait attentivement, sortant parfois dans le couloir pour essayer d'en entendre plus.


- Pourquoi tu vas pas les rejoindre pour sauver ton homme ? se moqua Fanny.

- J'ai pas besoin de le sauver, tout va bien, dit Margot un peu rougissante.

- On l'adore, déclara son père soudain. On l'aimait déjà beaucoup avant que vous soyez ensemble tu sais.

- Mais arrêtez de vous regarder comme si vous aviez toujours faim, ça devient gênant, la taquina Fanny.

- Toujours faim ? répéta leur père qui voulait comprendre.


Elles se mirent à rire de son air perdu comme deux enfants moqueuses. Margot fit les gros yeux à Fanny pour la dissuader de lui expliquer ce qu'elle voulait dire. Mais il finit par s'en douter et chasser l'idée de son esprit en balayant l'air de chaque côté de sa tête avec ses mains.


- Ah non, je veux rien savoir, dit-il en sortant de la cuisine.


Les deux sœurs riaient encore quand leur mère entra dans la pièce. Aussitôt Margot retrouva son sérieux, et son silence.


- Si vous voulez en emporter, servez-vous. Et pour les boîtes, gardez-les, j'en ai des tas.

- Oh je vais prendre du gâteau alors, lança Fanny en ouvrant le frigo.

- Tu peux m'en sortir aussi, j'ai pas osé en reprendre mais j'avais envie de tout manger !

- Tu as toujours été la plus gourmande, constata sa mère en sortant deux sacs en papier pour y mettre les boîtes.


Margot ne répondit rien, la plupart du temps ce genre de remarque anodine était suivie d'une remarque moins innocente. Fanny s'y attendait aussi et tenta de dévier le chemin emprunté par sa mère en changeant de sujet.


- Tu l'as trouvé comment le cake maman ? C'était ta recette...

- Très bon, il n'était pas sec du tout, on aurait même pu le manger froid.

- Je vais rejoindre les garçons, tenta Margot pour s'enfuir.

- En fait, l'arrêta sa mère, je me demandais si on pouvait parler ?

CrushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant