Chapitre 20

94 22 4
                                    

30 novembre

— Hey...

Perdu dans ses pensées, Chris contint un sursaut et se redressa pour poser les yeux sur Cam. Dans l'embrasure de la porte extérieur, son voisin le dévisageait, l'air préoccupé.

— Ça va, Chris ?

Le jeune homme glissa une main dans ses cheveux sans oser croiser le regard de Cam.

— Ouais, t'inquiète. Et toi ?

C'était bien la première fois que sa voix tremblait en sa présence.

[Il faut dire que les mots de ma mère ne cessaient de tourner, encore et encore et que différentes angoisses se mêlaient en moi. Celle de découvrir chez Cam une attirance pour moi, attirance qui m'aurait certes fait plaisir mais dont je n'aurais su quoi faire (c'était beau de m'en convaincre!) ou de découvrir au contraire qu'il ne m'avait jamais regardé que comme un ami.]

Cam s'humecta les lèvre et vint s'assoir sur le lit tandis que Chris repliait les jambes pour lui faire une place. Chardon en profita pour sauter sur ses genoux et se frotter à ses cuisses.

— Ça ira mieux quand je saurait pourquoi tu m'évites. Il s'est passé quelque chose hier ?

— Je ne t'évite pas !

— Tu es distant depuis lundi, mais depuis hier soir, tu me mets carrément des vents. Je t'ai demandé si je pouvais venir ce matin, mais aucune réponse. Et là, je te retrouve à déprimer dans ton lit... J'ai fait quelque chose de mal ?

Les deux mains plongées dans le pelage de Chardon, Chris réfléchissait.

[Evidemment que Cam n'avait rien fait, bien au contraire. Il était fidèle à lui-même. Frais. Jovial. Adorable.]

— C'est vrai que d'habitude, je suis en train d'étudier ou de jouer.

[Il est vrai que j'aurais dû le rassurer au lieu de lui balancer une réponse aussi plate que la Terre rêvée des chats. Mais à présent que mon déni se fissurait, j'adoptais un comportement tout aussi désastreux : la fuite.

Si quelque chose qui n'existe pas ne peut pas être un problème, quelque chose que l'on fuit n'en pose pas.

Du moins, je m'en persuadais.]

Cal pinça les lèvres et remonta ses lunettes.

— Tu es frustrant, parfois : ce n'était clairement pas le plus important dans ma phrase. Est-ce que tu m'en veux pour une raison ou pour une autre ?

Chris esquissa une grimace d'excuse et commença à triturer un bracelet à son poignet.

— Qu'est-ce que c'est ? demanda Cam, le regard curieux. Un bracelet pop-it ? Ce n'est pas pour les enfants ?

— Non, même si les pop-it sont à la mode, c'est comme les handspinners, à la base, ce n'était pas pour les enfants, mais... peu importe. Juste, c'est agaçant que tout le monde les prennent pour des trucs de mioches.

— Désolé... tu veux bien m'en dire plus ? Il sert à quoi ?

— Ce truc est un stim-toy. C'est comme mon cube, parfois... souvent, j'ai besoin d'occuper mes mains pour occuper mes pensées. En général, le cube suffit, mais depuis hier... je sais pas, je peux pas l'expliquer. J'ai juste ressorti le bracelet, ça me rassure de l'avoir toujours à portée de main.

[Aaaah, les stim-toys et moi. Une grande histoire d'amour. Ces "jouets" sensoriels que l'on clique, que l'on pop, que l'on triture, que l'on tord. Ces objets qui servent à délester du stress, de l'angoisse, de la colère, d'un trop-plein de tout.

Chris, ou comment se prendre pour Cupidon à NoëlWhere stories live. Discover now