Chapitre 37

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5 décembre

Recroquevillé dans son lit, son casque audio sur les oreilles, Chris écoutait à s'en abrutir la même chanson en boucle. 

Il se sentait vide. Nul. Et n'avait pas décoléré contre lui-même depuis la veille. 

Il avait fui ses amis. Fui Cam. Fui le live.

La team lui en voulait. Certes, aucun ne lui avait fait de reproches, mais il avait senti une froideur s'installer dans les échanges du tchat. Lui-même n'avait plus osé parler. Il avait fini par couper son téléphone, couper son ordinateur pour aller se blottir avec Chardon sous sa couette. Renoncule n'avait pas tardé à le rejoindre et Chris avait profité de leur apaisant ronronnement pendant l'heure qui avait suivi.

Cam avait tenté de lui parler, sans succès. 

[C'est peu de le dire, il s'était carrément retrouvé face à un mur. Mais un mur encore plus désagréable que s'il avait été privé de café pendant toute une semaine.]

Puis Lizzie était venue, sans plus de résultats. Lise aussi s'y était cassé les dents, tout comme la mère des trois jeunes. 

Il n'avait accepté de sortir de sous sa couette que pour Ely. 

[Sortir, c'est un bien grand mot. J'ai juste pointé le bout du nez, la couette rabattue sur ma tête comme une cape à capuche. Puis Chardon a fait comme moi et sa petite tête toute douce a popé sous mon menton pendant que Renoncule pétrissait mes cuisses et mordillait mes doigts.]

La conversation avait été à sens unique, mais suffisante pour que Chris ne sombre pas complètement dans la déprime. Encore que déprime eut été un mot bien faible.

[Je n'ai pas souvent fait de « burn-out autistique », comme dit Capucine. En fait, je n'en ai fait que trois. Cette fois où mon géniteur a voulu nous parler. Après ma rupture avec Côle, et... il y a quelques jours. Encore une fois à cause de Côle.

Connard.

Mais on s'en fout. Pour le moment.

Le burn-out autistique... honnêtement, je ne sais pas trop ce que c'est. J'ai bien fait des recherches sur google... fatigue morale et physique intense. Anxiété exacerbée (encore pire qu'en temps normal, quoi). Baisse des capacités à gérer le quotidien (comme manger, se laver, et même aller aux toilettes devient dur.) Tout ça causé par un trop-plein d'efforts, une surcharge émotionnelle, une accumulation d'éléments qui te fait complètement vriller.

Est-ce que c'est vraiment ce qui m'est arrivé ? Je n'en suis pas certain. Certains points concordent. D'autres non. Ou peut-être que je m'aveugle ?

Oui, sans doute que mon cerveau refuse juste cette probabilité qui me pousse un peu trop sur la pente d'un diagnostic officiel.

Je sais que j'y viendrai, un jour. Mais pas maintenant. Pas encore. 

Je suis pas prêt.]

À peine Ely avait-il fermé la porte que la colère avait balayé l'abattement. Chris s'était levé. Avait fait les cent pas. Était allé se doucher dans l'espoir que l'eau glacée, puis brûlante le tirerait de cet état. Il s'était fait un café qu'il n'avait pas réussi à avaler. Il avait mis un film qu'il n'avait finalement pas regardé.

La seule chose qui l'avait apaisée, c'était cette chanson. En boucle. Très fort. 

Ça martelait dans ses oreilles. Ça tapait dans son crâne. Ça empêchait les pensées de se former. 

Soudain, alors que le jeune homme ne demandait rien à personne, quelqu'un lui retira sa couette. Presque aussitôt, une bonne odeur de fromage grillé chatouilla ses narines. 

Chris, ou comment se prendre pour Cupidon à Noëlحيث تعيش القصص. اكتشف الآن