Chapitre 68

54 10 3
                                    

24 Décembre

Le cœur lourd et la gorge serrée, Chris observa ses amis s'éloigner dans la ruelle jusqu'à les voir disparaître. Seule Lizzie restait à ses côtés : elle n'avait pas voulu partir en même temps que les autres et avait promis à Chris d'attendre l'arrivée d'Aggy et Ely avant de rentrer chez elle. 

Chris frissonna dans le froid hivernal et, malgré lui, son regard se porta sur la maison voisine. De la lumière éclairait les fenêtres voilées par des rideaux et des chants de Noël feutrés leur parvenaient. La mère devait préparer le réveillon.

Avait-elle vraiment mis Cam à la porte, ou bien le jeune homme utilisait-il ce prétexte pour fuir ? Chris n'était pas sûr de vouloir la réponse à cette question.

Pourtant, poussé par Lizzie, il se dirigea vers la porte d'entrée et actionna le carillon d'une main tremblante. Il espérait que les secondes s'égrèneraient, interminables, que la mère ne viendrait pas, qu'il soit obligé de rentrer chez lui bredouille, mais il avait à peine fini de penser à ça que la porte s'ouvrait.

Une femme d'une cinquantaine d'années, les mains enfarinées et la taille ceinte d'un tablier immaculé, darda sur lui un regard mécontent. Un rictus haineux et dégoûté glissa sur son visage lorsqu'elle comprit qui l'avait dérangé.

— Bonj...

— Va-t'en, feula-t-elle. Et emmène ta copine dégénérée avec toi !

Avec humeur, elle voulut refermer la porte, mais la main de Lizzie l'en empêcha. Les traits crispés, la jeune femme luttait pour ne pas invectiver la mégère en face d'elle.

[Et encore, mégère est un mot bien faible pour elle. C'est une vraie harpie !]

— Bonjour Madame, nous voudrions parler à Cam s'il vous plaît, l'informa Lizzie d'un ton glacial.

Après une seconde de stupéfaction, la mégère éclata de rire.

— Moi qui croyais qu'il t'envoyait récupérer son téléphone... 

Elle attrapa le bras de Chris et le serra avec force.

— En fait, tu l'as juste largué après l'avoir baisé. Je l'ai foutu dehors, c'est le prix de sa stupidité. Maintenant, dégage, j'ai un Noël à préparer... mais un chien comme toi ne connais sans doute pas Noël !

Chris se dégagea, la gorge nouée, incapable de parler. La reconnaissance le submergea lorsque Lizzie forma un rempart entre eux.

— Je ne sais pas si vous êtes au courant, mais l'homophobie comme le racisme sont des délits punis par la loi. Au revoir et joyeux Noël. 

Sur un rictus, la mégère leur claque la porte au nez. 

[Et une réaction très mature de Lizzie : elle lui a tiré la langue en secouant la tête et en grognant. Et elle m'a aussi tiré derrière elle à m'en décrocher le bras en râlant et pestant. Parce qu'elle regrettait de ne pas avoir fait irruption chez cette grognasse (ses mots) pour voler le téléphone de Cam.

Moi, tout ce à quoi j'arrivais à penser, c'était justement au téléphone de Cam. Chez sa mère depuis plusieurs jours alors que lui n'y était plus.]

— C'est pour ça qu'il répondait pas au téléphone.

— De toute évidence, grommela Lizzie qui n'arrivait pas à se calmer.  Et c'est sans doute la même chose pour son ordinateur portable. Je t'avais dit qu'il avait forcément une bonne raison ! En fait, il ne sait même pas ce qu'il t'es arrivé Chris. Il se morfond sans doute à attendre de tes nouvelles, ou à espérer que tu le retrouves, ou je ne sais pas.

Chris, ou comment se prendre pour Cupidon à NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant