Chapitre 32

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 4 décembre

— Maman !?

Chris dérapa dans la cuisine et s'arrêta à un mètre à peine de sa mère. 

— Oui, mon ange ? S'enquit-elle en réduisant la distance pour glisser une main tendre dans ses cheveux.

Un frisson parcourut le jeune homme qui échappa de justesse au contact. Il avait l'habitude, c'était un tic dont sa mère avait du mal à se passer.

— J'ai besoin d'argent. S'il te plaît, énonça-t-il avec aplomb.

Chris ne la regardait pas et, pourtant, il sut aux infimes signes corporels de sa mère qu'elle écarquillait les yeux de surprise. Un léger mouvement des épaules. Une brusque inspiration. La tension subite dans ses bras.

— Je ne m'attendais pas à ça, d'habitude tu tournes autour du pot pendant des heures. Oh et... tu es tout en beauté aujourd'hui !

Les orteils du jeune homme ses recroquevillèrent dans ses chaussettes. Gêné, il tira sur le bas de son T-shirt et remonta la fermeture de son gilet jusque sous son menton.

— Ça change de tes pulls dix fois trop grands ! C'est pour Cam que tu...

— Je suis pas trop à l'aise. Trop serré. C'est Ely qui a voulu. Elle... il m'a mis du gel aussi.  Et des trucs sur mes cils pour que mes yeux ressortent.

— Du mascara.

— Je connais le nom, mais ça gêne alors c'est un truc. Et pour les sous ? Tu veux bien ? S'il te plaît ? 

Chris releva la tête pour croiser le regard de sa mère. Il se força à maintenir le contact visuel, faisait fi de son malaise grandissant.

[Et de mon impression que mes yeux allaient sortir de les orbites. J'ignore par quelle étrange magie les gens ne s'aperçoivent jamais de mon malaise. Je sais me forcer à les regarder dans les yeux. Histoire de convention sociale. Je n'apprécie pas ça pour autant. C'est dérangeant. Ça remue jusque dans le ventre. Ça crispe. Ça donne envie de fuir. 
Je le fais uniquement parce que durant mon enfance, mes parents m'ont appris que, par politesse, on devait regarder dans les yeux pour parler.

Honnêtement, tous ceux qui se foutent de cette convenance gagnent une place particulière dans mon coeur. Cam en tête, bien sûr.]

— De combien as-tu besoin ? Et j'aimerais bien savoir ce qui te pousse à être aussi sociable ce matin. Pas que je m'en plaigne !

N'y tenant plus, le jeune homme décrocha et commença à tourner autour de la table de la cuisine.

— Oui, je sais. En fait, c'est plutôt pour Lise. Elle n'a plus rien, et elle a un rendez-vous avec Lizzie, mais je pense que tu le sais. Merde... tu le sais, hein ?

— Oui, ne panique pas, je sais que tous mes enfants sont tombés dans une marmite d'arc-en-ciel quand ils étaient petits.

Après une hésitation, Chris esquissa un sourire.

— C'était drôle, ça !

— Je suis quelqu'un de très drôle, rétorqua sa mère. C'est juste que personne ne comprend mon humour la plupart du temps !

— Bref, donc, Lise, pour sortir avec Lizzie. Et aussi, je dois de l'argent à Cam, parce que l'autre jour, je t'en ai demandé et j'ai oublié de le prendre. Je vais pas le faire payer encore pour moi sur le marché de Noël ! Enfin, il est pas prévu que j'achète des trucs, mais au cas où, tu vois. Et aussi, je vais peut-être en profiter pour faire des cadeaux de Noël, pendant que j'y suis. J'ai ma carte, mais imagine les guichets de banque sur le marché de Noël ?

Chris, ou comment se prendre pour Cupidon à NoëlDonde viven las historias. Descúbrelo ahora