14- Perte de controle

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Je me remis debout péniblement. La salle tournait autour de moi. J'espérai ne pas m'être fait de commotion en tombant aussi violemment sur la tête. Mon sang continuait de tomber sur le sol froid en pierre. Je respirai bruyamment. Tout c'était passé si vite. Je fixai, choquée, les personnages royaux en face de moi. Ménévras souriait toujours, l'air fou et semblait prêt à se frotter les mains de satisfaction. Ravenna restait debout à côté de lui, dans une parfaite représentation de la beauté, de la cruauté et de la puissance. Son regard était glacial mais elle jubilait presque autant que son époux. Et Maven quelque pas en arrière, les bras croisés, semblait à nouveau s'ennuyer ferme. Seuls ses cheveux décoiffés indiqués notre corps à corps cinq minutes plus tôt. Cela mis à part il transpirait une fois de plus le dédain et la froideur. Je pris une inspiration tremblante.

Tu n'es pas morte, me dis je intérieurement.

Je me répétai ses mots encore et encore. En boucle dans mon esprit. Je fis un premier pas tremblant. Puis un second. Ils ne firent aucun mouvements. Je continuai à marcher, chaque pas se faisant plus assuré que le précédent. Mais seulement en façade. Je pouvais littéralement sentir mon cœur trembler. Lorsque je les dépassaient, seul Maven me regarda, pour me jeter un sourire moqueur. Je gardais obstinément le regard fixé sur la sortie. Je sentais leurs regards glacés posés sur ma nuque. Je savais que je ne faisais ces pas que parce qu'ils le voulaient bien. Je fuyais cette pièce seulement parce qu'ils l'autorisaient. J'étais prisonnière jusque dans le moindre de mes mouvements. Mon mantra toujours scandé dans ma tête, j'atteignis le pied de l'escalier. Puis au bout d'une éternité, la surface de la terre. Les mots que je me répétais m'apportaient du réconfort. Et me faisais me concentrer sur mes plans futurs pour sauver ma vie, et non pas sur ce désir de vengeance qui me brûlait désormais chaque pores de ma peau et qui me dévorait la raison. Je ne pouvais penser à une quelconque vengeance. Pas quand la vie de mon frère était en jeu. Or, cela faisait maintenant vingt quatre heures qu'il devait être enfermé. Trop jeune. Il était trop jeune pour avoir à vivre ça. Et moi aussi...

Ma respiration toujours saccadée, mon cœur battant encore à mille à l'heure, je déboulai dans la bibliothèque. Mes tremblements se diffusèrent de mes mains à l'intégralité de mon corps. Un bibliothécaire a l'air aussi ancien que le plus archaïque des livre de cet endroit poussa un cri de surprise et de frayeur en me voyant surgir de l'ouverture. Il se pressa contre le mur, lorsque je me mis brusquement à courir, ne souhaitant que mettre le plus de distance possible entre cet enfer des profondeurs de la Terre.

Ce qu'il venait de se passer... Je frémis et redoublait d'ardeur dans mon fuite désespérée. Ces portes d'émeraudes cachaient quelque chose. Et j'étais persuadée que Ménévras n'y avait pas accès. Du moins jusqu'à aujourd'hui. Mon sang avait ouvert un puits étrange en moi lorsque j'avais touché ces portes. J'avais eut conscience de toute sa profondeur. De chacun de ses recoins. Et chaque parcelle de pouvoir qu'il représentait. Je fut prise d'une nausée intense quand je repensais à l'onde de choc qui c'était propagée me faisant perdre l'équilibre. Elle n'était pas partie des imposants battants. Non, je l'avais sentit naître au plus profond de ce puits obscur dans mon cœur pour jaillir de moi. J'étais à l'origine de cette manifestation. Je m'écrasait brutalement contre un mur et l'intégralité de mon estomac se souleva. Entre deux hoquets, j'entendis à peine la clameur dans mon dos. Les gens criaient et courraient en tout sens. Mais je ne pouvais que penser à ce que je venais de faire. Contre mon gré, certes, mais cela venait de moi. L'air fier et machiavélique du roi et de la reine restait imprimé dans ma rétine.

Je me redressai et compris alors l'agitation du palais. Sur mon passage, partout là où mes pas c'étaient arrêtés, pendant ma course désespérée, les murs et tapisserie étaient déchirées, les tapis brûlés et les meubles renversés. Des flammes s'échappaient de plusieurs endroits. Je baissai les yeux sur mes pieds. De la fumée montaient du sol sous eux. Je regardai mes mains, effarée de ce que je devenais. Un monstre. Je me muais en monstre. Je refermai mes poings. Un serviteur passa en courant à côté de moi. A peine fut il a un mètre de moi, qu'il vola en l'air et alla s'écraser contre le mur opposé. Je sentais que tout m'échappait. D'autre tentèrent de passer et connurent le même sort que le malheureux. Je me collais contre le mur, en tentant de leur montrer que je ne leur voulais rien. Mais ils me regardaient comme si j'étais un démon de l'Autre Monde. Et je ne pouvais que leur donner raison. Je sentais mes cheveux tourbillonnaient autour de moi, comme plus tôt devant la reine. Le puits sombre se creusait de plus en plus. Je le sentais s'accroître sans que je ne puisse rien faire. Il allait m'avaler. Je suffoquais. J'ignorai ce que le roi m'avait fait, mais son intervention en bas, m'avait fais perdre le contrôle sur mon propre esprit. Je le sentais être grignoter petit à petit par des ténèbres.

Le Royaume perduWhere stories live. Discover now