CHAPITRE 36 : Trio

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Anne s'est levée rapidement lorsque nous sommes entrés, mais elle se touchait encore délicatement le ventre.

"Je suis désolée pour tout à l'heure. Ces douleurs sont difficiles à supporter". Elle rit d'un air penaud. Ominis posa ses mains sur les épaules d'Anne, l'aidant à s'asseoir sur la chaise, elle tendit sa main gauche pour prendre la sienne.

"Ça va, Anne ?" Je me suis placée à sa droite et elle m'a regardé avec les yeux bruns et profonds de Sébastien. "Je ne voulais pas m'imposer..."

"Tu ne voulais pas ! Vraiment ! Je vais bien, vraiment. La douleur causée par cette malédiction arrive par vagues et souvent soudainement." Elle tourna le nez vers Sébastien qui s'était assis sur la chaise en face de la table, lui tendant la main. "Ce n'est la faute de personne."

Elle sourit par-dessus son épaule à Ominis, puis à moi, un sourire taquinant ses lèvres. "Et je n'ai pas envie que cette visite se passe sous votre regard solennel. Je vous en prie", dit-elle en désignant les autres chaises et en attirant Ominis dans l'une d'elles, tandis que je m'enfonçais dans l'autre. "Racontez-moi tout ! Je veux en savoir plus sur l'école, sur ces crédules premières années, sur les ennuis qu'a eus mon frère..." Elle sourit à Sébastien et un peu de lumière revint dans ses yeux.

"Ne me parlez même pas des feux d'artifice..." Ominis fredonna et Anne pencha la tête avec curiosité, plissant les yeux vers Sébastien. "Je ne me souviens pas avoir lu des feux d'artifice dans vos lettres. Elle haussa les sourcils et étouffa un sourire.

"Ominis, j'espère que tu sais que je te regarde avec insistance".

"Oh, je sais."

"C'était vraiment un accident mais... nous avons peut-être... fait exploser l'arrière du magasin de feux d'artifice de Pré-au-Lard..." Les mots m'ont fait grimacer.

Le sourire d'Anne s'agrandit. "Tu y étais aussi ?" Elle s'est adossée à sa chaise et a fait mine de croiser ses bras devant son corps. "Oh, j'aime bien celle-là."

"Moi aussi". Les yeux de Sébastien brillent.

Nous sommes restés assis autour de la table, à parler et à rire pendant des heures. Sébastien sortit deux grenouilles en chocolat de son cartable et les glissa sous la table à Anne, comme s'il s'agissait d'une sorte d'échange de drogue. Elle a rigolé et les a glissées dans les poches profondes de sa jupe.

Les voir tous les trois ensemble, c'était comme voir une partie de leur cœur se remettre en place. Ils formaient vraiment le trio ultime.

Je n'avais jamais vu Ominis sourire aussi largement, ses joues étaient presque roses de rire.

Sébastien observait lui aussi sa sœur avec un regard que je n'avais jamais vu auparavant. Son sourire était large mais ses yeux doux, la regardant comme si, s'il détournait le regard trop longtemps, Anne risquait de disparaître complètement. Même lorsqu'elle me parlait, ses yeux suivaient nos sourires. Deux parties de son monde enfin réunies en un seul endroit.

Une pensée s'immisça au fond de mon esprit, me rappelant doucement que Sébastien et moi avions voulu explorer Feldcroft d'un peu plus près, pour comprendre pourquoi il était mentionné dans mon livre, mais je ne pouvais pas supporter de briser le peu de temps que nous avions déjà passé ici. Nous devrions revenir un autre jour.

C'était trop important.

Les rires et les taquineries se poursuivirent jusqu'à ce qu'Anne mentionne qu'elle avait besoin de déplacer quelques objets dans son coin de la maison, mais qu'elle n'avait pas la force de le faire. Sébastien et Ominis ne demandaient qu'à lui donner un coup de main, s'éclipsant derrière le rideau pour voir ce qu'ils pouvaient faire.

Me and the Devil : Sebastian Pallow (FR)Where stories live. Discover now