Chapitre 42 - Evan

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La révélation de Zoé reste en suspens quelques secondes avant que je ne reprenne la parole.

Je m'inquiétais pour sa santé. Mais je ne pensais pas mettre au jour un tel secret.

Néanmoins je suis heureux qu'elle me l'ait dit. Mais un peu surpris, je dois bien le reconnaître.

— Je suis désolé que tu l'aies appris de cette façon.

— Je ne sais pas s'il y avait une façon idéale de l'apprendre. Mais c'est vrai que pour le coup, ça a été un peu brutal.

— Est-ce que Zach est...

— Zach est au courant, oui. Mais lui est bien le fils biologique de notre père.

Zoé semble désemparée et elle me fait beaucoup de peine. Elle qui est d'habitude si lumineuse...

— Si tu ne veux pas...

— En parler ? Si je n'avais pas voulu le faire, je ne t'aurais rien dit, mais c'est quelque chose que je veux partager avec toi.

Elle pose sa tête contre mon torse et, de ma main libre, je caresse ses cheveux.

— Je n'en ai jamais parlé à mon père. Enfin à mon...

Elle ne finit pas sa phrase et je devine à quel point il doit être difficile pour elle de parler de tout ça aujourd'hui.

— Ce qui fait que je n'ai aucune réponse aux questions que je me pose.

Elle marque une pause et, comme si elle savait que j'allais l'interroger, elle poursuit.

— Qui est-il ? Pourquoi est-ce qu'il m'a abandonné ? Est-ce qu'il sait au moins que j'existe ? Est-ce qu'il est toujours en vie ? Est-ce que mon... père savait que je n'étais pas sa fille biologique ?

Pourquoi ma mère ne m'a jamais rien dit ? Elle énumère les questions si vite...

Je comprends qu'elle a déjà dû se les poser un millier de fois.

— Je ne peux pas imaginer ce que c'est.

— Non, c'est vrai. Mais on ne peut pas dire que tu aies eu les parents du siècle, toi non plus... Au moins les miens étaient aimants. Même si ma vie est basée sur un mensonge.

Je passe mes bras autour d'elle et, une nouvelle fois, embrasse le sommet de son crâne.

— Je t'aime.

Elle se redresse et je vois les larmes qui perlent sur ses joues.

— Dis-le encore.

Je me rapproche de son oreille et murmure, pour qu'elle soit la seule à entendre.

— Je t'aime.

Je la vois sourire et je me sens soulagé. Je n'aime pas la savoir malheureuse.

— Je t'aime aussi, Evan. Et je remercie le ciel de t'avoir mis sur mon chemin.

Je ne pensais pas que ce serait si difficile... Mais la vérité c'est que traverser les couloirs de la clinique dans laquelle Zoé a rendez-vous est très éprouvant. Parce que chaque mur blanc, chaque personne que je croise... Personnel ou patient... Tout me rappelle cette journée abominable où j'ai perdu ma femme.

Je revois le médecin qui vient me chercher et qui m'annonce que mon monde s'effondre.

Je n'ai pas remis les pieds à l'hôpital depuis ce jour-là.

— Est-ce que tout va bien ?

Les doigts de Zoé sont entremêlés avec les miens et je réalise que je serre sa main un peu trop fort. Je relâche immédiatement la pression et porte sa main à mes lèvres.

— Excuse-moi, je crois que je suis un peu stressé.

Et c'est vraiment le cas.

D'une part parce qu'être ici me fait revivre le pire moment de toute mon existence... Et d'autre part parce que je suis terrifié à l'idée qu'on puisse déceler quelque chose de grave à Zoé.

Après avoir perdu Kate, je ne sais pas si je pourrais supporter de la perdre, elle aussi.

Pas maintenant qu'elle a pris tant de place dans ma vie.

— Tout va bien se passer.

Je lui souris même si, au fond de moi, je suis mort d'inquiétude

Je sais qu'elle a raison et que c'est un examen banal... Il n'en ressortira pas forcément quelque chose de mauvais... Pourtant, j'ai du mal à rester rationnel.

— Oui, j'en suis certain.

J'essaie de la convaincre, mais aussi de me convaincre moi-même.

Alors que nous avons passé l'accueil et procédé à un certain nombre de démarches, Meryl semble surgir de nulle part et vient à notre rencontre. Elle enlace immédiatement Zoé.

— Je passe juste te faire un petit coucou.

Elle se tourne vers moi, souriante. C'est drôle de la revoir ici, si sérieuse, alors que la dernière fois que nous nous sommes croisés... C'était à Vegas.

— Contente de te revoir, Evan.

— Moi aussi.

C'est grâce à son enterrement de vie de jeune fille que Zoé et moi nous sommes trouvés alors, je lui dois beaucoup. Elle jette un coup d'œil furtif à nos mains entrelacées.

— Tu n'avais pas besoin de venir jusqu'ici, lui dit Zoé.

— Je t'en prie tu es deux étages en dessous de mon service et tu croyais que je ne n'allais pas venir ?

Elles rient toutes les deux et j'apprécie de voir Zoé détendue.

— Par contre, je ne peux pas trainer, mais on se téléphone OK ?

— Ce soir, sans faute.

Elle me regarde puis je la vois lever les pouces en direction de son amie alors qu'elle fait demi-tour.

— Ça voulait dire quoi, ça ?

— Ça voulait dire qu'elle est heureuse pour moi. Et qu'elle te trouve canon.

— Oh, tu crois que je pourrais tenter ma chance ?

Zoé me frappe sur le torse.

— J'ai toute confiance en Meryl, mais juste au cas où l'idée te viendrait avec une autre... Sache qu'à nous deux on pourrait faire disparaitre ton corps à peu près n'importe où dans cette ville.

Elle me fait un large sourire et je l'attire à moi.

— Je prends cette menace très au sérieux, mais saches que tu n'auras jamais à la mettre à exécution. Je t'aime bien trop pour faire quoique ce soit qui t'éloigne de moi.

Elle s'apprête à me répondre, mais nous sommes interrompus par la voix d'une infirmière qui l'appelle.

— Les médecins ne sont-ils pas censés être toujours en retard ? plaisanté-je.

Je l'aurais bien gardé dans mes bras encore un peu... Mais il est temps pour elle d'y aller alors je la libère de mon étreinte.

— À tout de suite.

J'acquiesce. 

Quelques minutes. Rien de plus.

Une seule nuitWhere stories live. Discover now