Chapitre 45 - Zoé

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Trop de choses à gérer en même temps. Mon cerveau est à deux doigts d'imploser !

— Je monte ça dans la chambre ? me demande Evan.

— Oui, s'il te plaît.

Il est tellement attentionné...

Si lui se demande comment sa vie a pu changer autant en si peu de temps, c'est également mon cas.

Il y a à peine quatre mois, j'avais deux boulots et des perspectives d'avenir quasiment réduites à néant.

Sans compter que ma seule façon d'avoir un orgasme consistait en de courtes séances de plaisir solitaire.

Et aujourd'hui, je suis en train d'emménager avec l'homme que j'aime. Un homme que j'ai rencontré par le plus grand des hasards, mais avec qui j'ai senti une connexion immédiate.

Il y avait une chance sur des milliers pour que l'on se retrouve. Peut-être même sur des millions.

Mais je suis là. Et lui aussi.

Je me le répète, comme pour m'en convaincre.

Mais tout ça est bien réel. L'amour, la jolie maison aux clôtures blanches et à la pelouse parfaitement entretenue... Et l'adorable petite fille qui doit grandir sans sa maman.

Je pense souvent à Kate.

J'ai vu des photos d'elle. Abby en a une sur sa table de chevet qu'elle embrasse chaque soir avant de dormir. C'était une femme magnifique. Une femme dont le destin a été brisé tragiquement un soir d'hiver par un homme ivre. Je n'en sais pas beaucoup plus.

Ce n'est pas qu'Evan refuse d'en parler, mais c'est un sujet compliqué et je ne me vois pas lui jeter au visage mes interrogations sur les circonstances précises du décès de sa femme.

C'est une épreuve difficile pour lui, encore aujourd'hui, près de deux ans après.

Mais je lui suis incroyablement reconnaissante de me faire une place dans sa vie.

Je me sens nettement mieux depuis le début de mon traitement. Plus de douleurs, ou presque, et plus d'angoisses. On dirait que tout s'arrange. Enfin, tout... Il me reste une chose majeure à gérer. Et j'ignore vraiment comment je suis censée m'y prendre.

J'imagine que ce n'est pas tous les jours qu'on découvre l'identité de son père biologique. Quoique...

C'est une situation qui doit arriver à bien d'autres que moi... Et j'aimerais beaucoup savoir comment font les autres pour y faire face.

Parce que moi, je suis perdue.

J'ai toujours pensé que le fait de ne pas savoir était une bonne chose. Si personne ne m'en avait parlé, ce n'était peut-être pas pour rien.

Je me suis imaginé un million de raisons pour expliquer pourquoi on m'avait maintenue éloignée de la vérité.

Et quand je dis un million, j'exagère à peine.

J'ai pensé à toutes les hypothèses. De la plus pragmatique à la plus folle.

Sans doute mon père était-il quelqu'un de terrible. Peut-être était-il violent avec ma mère... Peut-être qu'il voulait simplement passer du bon temps et que mon arrivée a contrarié ses plans... Peut-être que je suis le fruit... d'un viol. C'est terrible, mais j'y ai pensé. Je l'ai envisagé.

Tout ça ne cesse de s'entrechoquer dans ma tête depuis quelques jours alors que, jusqu'à présent, j'étais parvenue, de façon plutôt convaincante, à tout mettre de côté.

Une seule nuitWhere stories live. Discover now