Chapitre 44: Chasse-poursuite dans la pénombre

13.8K 1.2K 64
                                    

   Ils sont très nombreux, trop nombreux, même; je dirais au moins une vingtaine. Tous vêtus de leurs impers et pantalons noirs, ils se fondent parfaitement dans la pénombre qui règne à l'extérieure. Les Tracs pénètrent chez Kat tous en même temps, en nous menaçant de leur fusil alteran.

   - Plus un geste! aboie l'un d'eux.  

   Je tourne sur moi-même en cherchant une issue. Cependant, nous sommes complètement pris au piège. Mes amis et nous resserrons les uns contre les autres et levons les bras en l'air. Nous sommes encerclés. Je dois avouer que je commence à paniquer sérieusement. Nous n'avons aucun moyen de nous échapper ou de nous défendre en cas de besoin. À mes côtés, Kat halète à une vitesse folle et est au bord des larmes.

   - Jenn, fais quelque chose! gémit-elle à voix basse. Ils sont en train d'anéantir ma maison! Ils vont nous tuer...

   - Nous n'avons pas d'armes, répliqué-je, aussi paniquée qu'elle mais sans le laisser paraître. On ne peut rien contre eux.

   - On fait quoi, alors? On fait quoi?

   Kat est vraiment en train de craquer. La pauvre n'a jamais vécu ce genre de situation auparavant. Enfin, comme la plupart des gens normaux. Je voudrais tant lui écraser le pied pour la faire taire, pour l'inciter à cesser de geindre comme une fillette, mais je ne réussirais sûrement qu'à la faire crier. Ô joie.

   - Suivez-nous, et en silence! ordonne durement celui qui semble être le chef de l'intervention avant de me pointer du doigt. Toi, tu restes là!

    D'un bref geste de son arme, il fait signe à ses hommes de reconduire mes amis dehors. Ceux-ci s'y prennent à deux pour les maîtriser et ils les entraînent dans la nuit glaciale, en file indienne. Mon coeur se met à battre à une vitesse ahurissante: il ne faut pas qu'on se fasse prendre maintenant, si près du départ! Si on se fait ramener à Alteran maintenant, c'est adieu à la prophétie et à notre monde.

   Je suis désormais seule avec le chef du groupe de Tracs dans l'imposant et luxueux halle d'entrée. Le gigantesque luminaire en cristal qui pend lourdement au plafond vertigineux est éteint; la pièce semble donc horriblement sombre et froide. Le vent frigorifiant qui souffle du cadre de porte vide me donne des frissons; reste que je suis Alteranne et donc beaucoup moins sensible au froid que les humains.

   L'homme qui se trouve à quelques mètres de moi est plus terrifiant que n'importe quel Trac à qui j'ai dû faire face auparavant. Il doit mesurer près de deux mètres. Ses épaules sont très larges et définies, et à son manteau de cuir sont épinglées de nombreuses médailles; il doit être un homme très haut placé. Si Atenas l'a envoyé, c'est probablement parce que cette mission est de la plus haute importance.

   C'est à ce moment-là que je réalise que je suis fichue. Bravo, Jenn. Tu as à nouveau trouvé une façon de te mettre dans le pétrin.

   - Vous connaissez sûrement la raison pour laquelle nous sommes ici, mademoiselle Akson, débute alors impassiblement le Trac. Voyez-vous, Atenas s'indigne de votre mauvaise conduite.

   - Non, pour de vrai? ne puis-je m'empêcher de marmonner sarcastiquement.

   - Vous avez désormais deux choix, poursuit-il en ignorant ma remarque. Soit vous entrez avec nous et vos amis à Alteran sans histoire... (Il pointe lentement son fusil dans ma direction.) ... Ou bien je mets fin à vos jours immédiatement et nous exécutons le reste de votre bande.

   Je sens mon coeur tambouriner à toute vitesse dans ma poitrine. Qu'est-ce que je suis censée faire, à présent? Un faux mouvement, et mes amis y passent tous. Je jette alors un coup d'oeil dehors et réalise avec effroi que mes camarades sont tous agenouillés au sol, fermement maintenu par les Tracs et alignés devant la porte d'entrée, un fusil sur la tempe. Ils tentent de se débattre, mais je sais pertinemment qu'ils ne peuvent pas s'échapper.

UndergroundWhere stories live. Discover now