chapitre 6: mélodie entêtante

624 69 0
                                    


Entre les tables rondes sur lesquelles on avait surélever tous les tabourets, quelqu'un, une femme de ménage supposais-je, passait le balai dans le réfectoire. La mélodie émanait d'une boite à musique Elfe que je connaissais pour avoir vu un client de mon père essayer de payer avec l'une d'entre elles. Ces boites contenaient un cylindre métallique arpenté pas une pointe qui, en bougeant, actionnait de petites figurines avec des instruments qui reproduisaient une musique enregistrée. La femme dansait sur les notes des petits bonhommes. Déchainée, elle chantait en de dandinant. À regarder de plus prés, je vis que ce n'était pas une femme de ménage, c'était elle, Sam.

Même en blouse en se servant d'un manche à balai comme amplificateur de voix, elle restait magnifique. La belle brune faisait osciller son corps dans les airs en rythme et m'étonna encore par sa grâce alors qu'elle ne faisait que s'amuser pour, du moins je le supposais, lâcher prise.

Elle donna un coup de bassin dans le vide et fit un demi tour sur elle même. Elle se trouvait désormais face à moi et un sourire finit d'éclairer son visage. Mon premier réflex fut de me baisser pour me cacher. Il me fallut dix bonnes secondes pour me rendre compte du ridicule de la situation. Je me relevais donc. Ces dix secondes avaient suffit à Sam pour arriver jusqu'à la fenêtre qu'elle ouvrit.

— Tu admirais mon déhanché?

Que répondre? Oui, assurément. J'aurais voulut dire quelque chose de drôle. Ou même quelque chose qui ne paraisse pas stupide, pour lui faire croire que je ne venais pas de perdre la once d'assurance que je possédais lorsqu'elle avait ouvert la bouche.

— Hein, euh non, balbutiais-je. Pourquoi tu fais le ménage?

Drôle, raté. Assuré, raté. Pauvre tache, réussit avec brio.

— Je suis punie, répondit-elle.

— Qu'est ce que tu as fait?

— Je me suis fait prendre voilà tout.

Je tentais de reprendre un peu d'aplomb.

— Sanction la première semaine, tu fais fort.

— Ce n'est pas exactement ma première semaine.

— Ah, redoublante. Manque de travail?

J'arrivais à faire des phrases mais j'avais beaucoup de mal à y incorporer des verbes.

— Disons juste que j'ai eu une rupture difficile qui n'a pas aidé à ma concentration.

À ce moment là, Alex vint me sauver d'un blanc interminable.

— Le prof m'a envoyé te chercher, dit-il à mon adresse.

— Comment as tu su où j'étais?

— J'ai suivit le chat, dit-il amusé. Où que tu aies voulu aller, tu te serais arrêtée au portail, l'école est protégée des téléportations.

Il jeta un regard noir à Sam, appuyée sur son manche à balai, de l'autre côté de la fenêtre.

— Samanta, la salua-t-il de façon glacial.

— Xander.

La tension était palpable. Un instant, je me demandai si ce n'était pas lui la fameuse rupture difficile. N'osant pas poser la question, je retournai en cours à contre coeur.

En entrant dans la salle, je fus accueillie pas un tonnerre d'applaudissement. Le professeur Sodiar vint même me serrer la main.

— Félicitation, dit-il. Un sort de rang 4 en première année, je n'en attendais pas moins de la soeur d'Iode mais tout de même. Vous serez dans l'élite des lundis matins et vendredi après-midi. Je sens que cette promotion est prometteuse.

Alex me chuchota à l'oreille.

— T'emballe pas, j'y suis aussi grâce à mon masque. On n'est que six à avoir réussit notre sort.

N'avait-il donc aucun sens des limites personnelles? On se connaissait depuis à peine une heure et il se permettait de se pencher à quelques centimètres de moi seulement.

Le soir à l'internat, je reçus une lettre par la voie des airs. C'était surement Iode, elle maitrisait parfaitement ce sort. Le message avait plané jusqu'ici, voltigeant devant la fenêtre jusqu'à ce que je l'aperçoive. J'ouvris l'enveloppe avec précaution. Ma soeur était capable de lui avoir incorporé un mécanisme explosif.

« J'ai eu mon concours! Je viens te chercher demain midi pour qu'on mange ensemble! Bisous! Iode. »

Un demi sourire vint relever ma pommette droite. Lise entra dans la chambre. Elle posa une fiole de peinture pour ongle sur mon bureau.

— J'ai besoin d'aide.

Décidément, tous les membres de cette école étaient adeptes du contact physique mais elle tentait un rapprochement, j'en étais flattée. Je ne l'avais vu adresser la parole qu'à Sam depuis que nous étions à Emmerson. Je m'installai sur son lit pour lui faire les ongles. J'étais loin d'être habile pour se genre de chose mais le gardais pour moi, elle en prendrait conscience bien assez tôt.

— Tu as reçu du courrier, me demanda-t-elle?

Toujours concentrée sur son doigt avec mon petit pinceau, je lui répondis sans trop d'implications dans la conversation.

— Oui, ma soeur, elle vient me voir demain, ça me fera du bien.

— Du bien? Tu ne te sens pas bien ici? Tu ne t'es pas fait d'amis?

J'avais envie de lui répliquer que nous n'étions que le premier jour et qu'elle non plus n'avais pas parlé à grand monde. Seulement nous allions devoir partager la même chambre durant une longue année, il était préférable de ne pas se la mettre à dos.

— Et bien j'ai Charline et Mathilde, puis j'ai fait la connaissance de Sam et Alex.

Elle se mit à rire, je ne comprenais pas.

— Tu vas te faire une belle réputation toi, annonça-t-elle.

— De quoi tu parles?

— Pour commencer, commenta-t-elle, nous sommes le premier jour et tout le monde connait déjà Charline, elle a allumé la moitiés des élèves en une soirée. Alex est vu comme un tombeur qui est loin de s'intéresser aux études. Quand à Sam... Il parait qu'elle est sortie avec une Elfe de deuxième année l'an passé, qu'elles faisaient du commerce pas très net et... C'est une Elfe.

Son commentaire réveilla en moi un sursaut de colère. Dans un premier temps, Charline avait toujours eu cette tendance à se mettre en avant. Je la connaissais depuis assez longtemps pour savoir que c'était la meilleure technique qu'elle ait trouvé pour se forger une carapace. Elle faisait ça pour tester les gens. Ceux qui s'arrêtaient à l'image qu'elle renvoyait au plus grand nombre, ceux là ne valaient pas la peine de chercher à devenir leur amie. Cette Asine était sans conteste parmi cette catégorie.

Quant à Sam, je trouvais Lise bien hypocrite de médire dans son dos alors qu'elle était la seule personne avec qui elle avait sympathisé. Je retins mon envie de lui répondre pour ne pas faire de vague. Je préférais me venger en ratant son index volontairement.

— Je croyais que vous étiez amies, fis-je l'étonnée.

— Il vaut mieux être proche des gens dont tu te méfie et je me méfie des Elfes.

Je ne savais pas quoi répondre. Je ne voyais pas en quoi le fait que Sam soit une Elfe pouvait changer quoi que ce soit. Ce charme et ce sourire qu'elle avait en parlant éclipsait totalement ses oreilles pointues. Car c'était bien ça, du charme. Ce n'était pas de la séduction comme Charline, elle n'en avait pas besoin. Elle n'avait qu'à sourire, regarder ou effleurer son interlocuteur pour qu'il soit envouté. Lise n'avait donc rien comprit à ce qui faisait de Sam ce qu'elle était, le fait d'être une Elfe n'y changeait rien.

À cet instant, l'ensorceleuse en question revint dans la chambre. Je baissai les yeux et terminai la main de Lise. C'était peut-être à Sam de se méfier de moi en fin de compte.

La voix de la surveillante résonna dans le couloir.

— Charline, en pyjama!

— Je dors à poil.

— Et bien vas te coucher!

Emmerson école pour futurs Guerriers, Mages et DiplomatesHikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin