chapitre 32: tempête en salle de classe

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Au petit déjeuner, Sam m'expliqua que Lise la harcelait, qu'elle la suivait comme si elle se prenait pour « le chien de garde de la directrice » selon ses mots. J'étais très énervée contre Lise ce matin là en arrivant en magie de l'air. Et bien sur, un nouvel exploit se produisit.

Notre professeur, une Nymphe de l'air à l'âge avancé, était en train de nous apprendre à faire voler une simple lettre sans que nous n'ayons besoin de regarder pour qu'elle arrive à destination. Il fallait simplement manipuler un petit courant d'air les yeux fermés. Alors que j'avais toujours étais au moins « passable » dans cette matière, ce jour là, mes pouvoirs en avaient décidé autrement.

Je fis virevolter mon bout de parchemin comme les autres, mais au moment de le faire atterrir sur la table... En ouvrant les yeux après avoir entendu un énorme craquement absolument pas prévu, je m'aperçus que mon pupitre avait laissé place à un tas de petites planches. Le professeur se frotta le tête pour faire tomber les copeaux de bois dans ses cheveux blancs. La vieille Nymphe observa les restes du bureau qui gisaient à ses pieds.

— Mademoiselle DeTolane, ce sont des choses qui arrivent... Malheureusement, dans votre cas, ce sont des choses qui arrivent trop souvent. Madame la directrice a demandé à vos professeurs de lui signaler s'il y avait un nouvel incident. Je pense qu'il vaudrait mieux que vous alliez vous expliquer vous même.

Je laissais trainer ma besace en cuir sur les pavés granitiques, le tirant par la lanière, les épaules voutés, en prenant le chemin familier du bureau de la directrice. C'était officiel, je m'y rendais au moins une fois par mois.

— Encore toi! Qu'est-ce que tu as encore bien pu faire?

Mes visites étaient devenues si régulières que la directrice Valdés n'utilisait même plus de vouvoiement. Mon seigneur Kigrat prit place sur le divan au fond de la pièce qui était désormais devenu sa place, pendant que j'expliquais sobrement que j'avais perdu le contrôle de mon petit courant d'air et qu'il s'était, contre ma volonté, transformé en tornade.

— Ethyléne, dit la directrice d'un ton condescendant en se massant les tempes, c'est la cinquième fois que tu perds le contrôle de tes pouvoirs. Dégradation de l'équipement en magie du feu, deux inondations en magie de l'eau, trois coccyx fêlés la dernière fois que tu as voulu remplir une bouteille d'eau et maintenant une tempête dans une salle de classe... ça ne peut plus continuer, tes professeurs ne peuvent pas passer leur temps à essayer de limiter les dégâts. Tu n'auras plus cours de spécialisation Nymphe jusqu'à nouvel ordre. à la place, tu auras un cours particulier avec le professeur Sodiar pour apprendre à maitriser tes pouvoirs.

L'idée de me retrouver seule, douze heures par semaine, avec un Asime, surtout si cet Asime était monsieur Sodiar, était loin de m'enchanter.

— Mais madame, comment un Asime peut aider une Nymphe? Pourquoi n'arrêterais-je pas tout simplement d'utiliser mes pouvoirs?

Une option qui me paraissait beaucoup moins désagréable.

— Premièrement, parce que je ne tolère pas l'abandon. Deuxièmement, tu ne peux pas. Je te rappel que ta téléportation se déclenche malgré toi. Je t'ai vu tomber dans le lac dimanche dernier! J'étais déjà en train d'alerter les secours quand tu es sortie!

ça me faisait mal de l'admettre, mais elle n'avait pas tout à fait tord...

Je n'avais pas de devoirs ce soir là, j'allais donc rejoindre Sam, Charline et Alex dans la salle de repos en attendant l'heure du diner. Charline et Alex étaient assis sur un canapé, ils ne craignaient pas de se faire quelques patouilles en publique. Nous avions peut-être ouvert la voix à de nouveaux couples de Racinar. Sam était par terre contre le mur. Je l'imitai et m'appuyai sur ses jambes. Elle passa ses doigts dans mes cheveux en me demandant ce qui n'allait pas.

— Je ne comprends pas ce qu'il y a de si flippant à rester avec Sodiar, dit-elle après que j'ai déversé mon lot de plaintes.

Le moment idéal se présentait, en l'absence de Lise, pour évoquer les Asimes et leur trafic de magie noire. Je ne voulais pas tout leur révéler, aussi, j'utilisais des chemins détournés. Mais à force de vouloir garder pour moi certains détails dont m'avait parlé Iode, je m'embourbais dans mes explications jusqu'à ce que mon récit soit totalement incohérent. Si bien, qu'au bout de dix minutes, après qu'ils m'aient posé assez de questions pour comprendre quelque chose, je dû me rendre à l'évidence. J'avais tout raconté.

— Une guerre. Vraiment, demanda Charline à voix basse?

— ça ne m'étonnerait pas de Kimko, enchaîna Alex.

— Oui, vraiment, répondis-je. C'est pour ça que j'aimerai que vous arrêtiez vos bêtises avant qu'on vous repère et qu'un Asime essaie de vous tuer pour récupérer vos fioles de magie noire. Mais surtout, j'aurais besoin de savoir comment vous vous la procurez. Sam, la première fois tu as dit « l'ancienne méthode ».

Je m'attendais à ce qu'elle soit une peu régissante à me confier un tel secret, mais elle sembla tout à fait décontractée.

— Et bien, l'an dernier, on demandait tous à Lucie. Mais depuis qu'elle est partie on utilise « l'ancienne méthode ». En gros, tu prends un truc, t'y met de l'argent, ton nom et ton numéro de chambre. Tu le balances discrètement dans la poubelle, et le lendemain matin t'as une fiole sur ton bureau.

— Tu veux dire qu'il y a un Asime sous magie noire qui vient te livrer dans notre chambre, s'indigna Charline!

— Chut, lui ordonna Sam! Je faisais ça les weekends où vous n'étiez pas là...

— Il faut que l'on découvre qui est le livreur, proposa Alex. Peut-être que nous pourrons apprendre comment il se la procure.

— Tu as raison, lui répondis-je. Il faut que je réfléchisse à un plan. 

Emmerson école pour futurs Guerriers, Mages et DiplomatesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant